Plusieurs pays africains membres de l’OPEP peinent à respecter les quotas de production dans le marché pétrolier mondial en raison de défis internes persistant, relèvent les dernières données de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Bien que leur part de production reste relativement modeste, leur contribution revêt une importance géopolitique et économique cruciale.
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Sur les six pays africains membres de l’OPEP (Nigeria, Algérie, Libye, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale) trois n’ont ni atteint les objectifs de production de février, ni ceux de mars. Pour ce premier trimestre 2024, ils ont été aux abonnés absents au rendez-vous des quotas. Il s’agit du Congo, de la Guinée Equatoriale et du Nigeria (voir tableau).
En effet, les pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole sont soumis à des quotas de production de pétrole déterminés par l’OPEP. Leur fixation vise à réguler l’offre mondiale de pétrole et essayer de stabiliser les prix. C’est un outil de gestion de l’offre pétrolière que les pays membres sont censés respecter, d’autant plus qu’ils sont convenus en commun au sein de l’OPEP.
Le Nigeria et la Libye affichent les niveaux de production les plus élevés. Le Nigeria, premier producteur de pétrole africain, a vu sa production baisser à 1,34 million de barils par jour (mb/j) en mars, manquant son objectif de 1,5 mb/j. Soulignons qu’en février 2024, le pays a produit 1.36 mb/j. Cette baisse reflète les difficultés persistantes du pays à maintenir ses niveaux de production en raison de problèmes d’investissement, de sabotage et de vols de pétrole. Cependant, le pays dispose encore d’une capacité de production durable de 1,46 mb/j, ce qui offre une marge de manœuvre.
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La Libye, malgré son potentiel de production élevé, reste confrontée à l’instabilité politique et sécuritaire, ce qui entrave ses efforts pour atteindre sa capacité de production durable estimée à 1,23 mb/j. Sa production en mars s’est établie à 1,16 mb/j, idem qu’en février 2024.
L’Algérie a, pour sa part, maintenu une production stable de 0,91 mb/j, conforme à son objectif, après avoir produit le même nombre de barils en février. Avec une capacité durable de 0,99 mb/j, le pays dispose d’une marge de manœuvre raisonnable pour augmenter sa production si nécessaire, souligne l’AIE.
Si l’Angola, classée 3e au Top 10 des producteurs africains de pétrole en 2023 après le Nigeria et la Libye avec 1,1 mb/j, ne figure pas dans les statistiques des pays membres de l’OPEP. Cela est dû au fait que le pays voisin du Congo a quitté l’organisation depuis le 1er janvier 2024.
Quid des petits contributeurs ?
D’autres pays africains comme le Congo, le Gabon et la Guinée Equatoriale ont contribué de manière plus modeste à la production totale, mais jouent néanmoins un rôle important dans l’équilibre global de l’offre et de la demande. Le Congo a produit 0,26 million mb/j en mars 2024, tandis que son objectif implicite était de 0,28 mb/j et sa capacité de production durable de 0,27 mb/j.
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Quant au Gabon, bien qu’il ait dépassé son objectif implicite de 0,17 mb/j en atteignant 0,24 mb/j, sa capacité durable demeure limitée à 0,22 mb/j. Enfin, la Guinée équatoriale a produit 0,06 mb/j, soit légèrement en deçà de son objectif de 0,07 mb/j, avec une capacité de production durable équivalente à son niveau de mars. La production combinée de ces trois pays d’Afrique centrale s’est élevée à environ 0,56 mb/j, ce qui reste marginal comparé à celle des grands producteurs africains tels que le Nigeria et la Libye.
Au total, les six pays africains membres de l’OPEP ont produit seulement 3,97 mb/j en mars, soit à peine 14,67% de la production totale de l’OPEP, et seulement 9,52% de la production totale de l’OPEP+, légèrement plus que la production des Emirats Arab Unis (3,22 millions de barils par jour) et 2,2 fois moins que l’Arabie Saoudite (9,02 millions de barils par jour). Cependant, cette production reste inférieure à leur capacité de production durable combinée de 4,23 mb/j, offrant une marge de manœuvre potentielle de 0,26 mb/j. Soulignons que l’OPEP+ fait référence à une alliance entre les pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et d’autres pays producteurs de pétrole non membres.
Pays producteurs | Production janvier 2024 (en mb/j) | Production février 2024 (en mb/j) | Ecart de production de février par rapport aux quotas | Production mars 2024 (en mb/j) | Ecart de production mars 2024 par rapport aux quotas |
---|---|---|---|---|---|
Algérie | 0,91 | 0,91 | 0,0 | 0,91 | 0,0 |
Congo | 0,26 | 0,25 | -0,03 | 0,26 | -0,02 |
Guinée Équatoriale | 0,05 | 0,05 | -0,02 | 0,06 | -0,01 |
Gabon | 0,22 | 0,22 | 0,05 | 0,24 | 0,07 |
Nigeria | 1,39 | 1,36 | -0,14 | 1,34 | -0,16 |
Libye | 1.03 | 1.16 | non précisé | 1.16 | non précisé |
Cette capacité inutilisée, ou « spare capacity », revêt une importance particulière dans le contexte actuel de tensions géopolitiques et de risques pour la sécurité énergétique mondiale. En effet, l’AIE souligne que si l’OPEP+ produisait conformément à la demande mondiale prévue pour 2025, sa capacité de réserve effective pourrait atteindre 6 mb/j, son plus haut niveau historique hors période Covid-19.
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Cependant, l’exploitation de cette capacité de réserve dépendra de la capacité des pays africains à résoudre leurs défis spécifiques, notamment en termes d’investissements, de sécurité et de stabilité politique.
En parallèle, de nombreux pays africains non membres de l’OPEP, comme le Ghana, le Niger, le Sénégal, la Côte d’Ivoire et la Mauritanie, émergent progressivement comme de nouveaux acteurs de l’industrie pétrolière, offrant de nouvelles opportunités mais aussi de nouveaux défis en termes de gouvernance des ressources naturelles et de développement durable.
Ainsi, malgré les défis persistants, la contribution des pays africains à l’équilibre pétrolier mondial reste cruciale en 2024. Leur capacité à relever ces défis aura un impact direct sur la sécurité énergétique mondiale et les équilibres géopolitiques dans les années à venir.