L’oignon est mis à toutes les sauces au Sénégal comme en Mauritanie. Mais le bulbe, pourtant de large consommation, se fait rare dans ces deux pays et dans d’autres grands pays africains qui en sont importateurs. Une pénurie qui s’est traduite par une flambée des prix dans les marchés mauritaniens et sénégalais.
A Dakar, le kilogramme d’oignon qui est passé de 800 à 1300 FCFA, soit une hausse de 62,50%, est encore beaucoup plus cher dans d’autres régions du Sénégal comme Kaolak ou Ziguinchor où le kilo varie entre 1.500 et 2.000 FCFA.
En Mauritanie, l’oignon est encore beaucoup plus cher. Le kilogramme est passé de 300 ouguiyas anciens à 1.000 ouguiyas (soit autour de 2,4 euros) la semaine dernière, soit une hausse de 233% par rapport à la période d’avant crise. Après bien de fluctuations, l’oignon est vendu aujourd’hui à plus de 700 ouguiyas.
Ingrédient indispensable à la cuisine des deux pays, de grandes quantités sont utilisées pour la préparation de certains plats (riz à la viande, yassa, sauces à la viande…). Les Sénégalais consomment entre 850 et 1000 tonnes d’oignons par jour. Du coup, cette raréfaction ne fait évidemment pas les affaires de la ménagère et des pères de famille.
Mais alors comment peut-on expliquer cette soudaine flambée des prix de l’oignon sur ces deux marchés? Plusieurs raisons sont avancées.
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Cette carence peut trouver son explication dans la faiblesse de la production au Sénégal et la quasi absence de cette culture en Mauritanie.
Autre fait corsant davantage l’addition, l’oignon marocain n’arrive plus sur les étals des marchés mauritaniens et sénégalais. L’explication officielle étant les effets négatifs des deux années de sécheresse qui ont impacté sur la production marocaine d’oignon.
Une baisse de la production qui s’était fait sentir même au Maroc où le kilogramme d’oignon avait flambé, en février dernier, pour atteindre les 18 dirhams le kilogramme. C’est à cette date que les autorités marocaines ont décidé d’interdire l’exportation de certaines légumes, dont l’oignon et la pomme de terre, afin de juguler la hausse des prix sur le marché local. Cette mesure a eu pour effet collatéral, les pénuries en Mauritanie et au Sénégal et dans une moindre mesure dans d’autres pays de la sous-région, notamment au Mali.
En réaction à la l’arrêt des exportations marocaines, les pays de la sous-région avaient fini par renforcer leurs importations auprès des Pays-Bas, un des grands producteurs et surtout exportateurs d’oignon au monde, à telle enseigne que pendant une période la quasi totalité des quantités disponibles en Mauritanie provenaient des Pays-Bas.
Au Sénégal, afin de faire face à la pénurie aggravée par l’arrêt des importations en provenance du Maroc, en plus des Pays-Bas, pays qui l’approvisionne historiquement en oignon, les importateurs se sont aussi orientés vers l’Egypte afin de compenser une partie des approvisionnements. Sachant que les Pays-Bas assurent 20% des exportations mondiales d’oignon, la pénurie a pu être jugulée sans qu’il y ait une augmentation significative des prix, aussi bien en Mauritanie qu’au Sénégal en 2022. A cette date, le Sénégal était le premier importateur au monde d’oignons en provenance des Pays-Bas, devant la Côte d’Ivoire et le Royaume-Uni.
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Seulement, la baisse de la production en Europe, en raison de conditions climatiques défavorables, a impacté négativement la production d’oignon des Pays-Bas, premier producteur européen de ce bulbe et l’un des plus grands exportateurs au monde, occasionnant des problèmes d’approvisionnement aux principaux importateurs d’oignons hollandais du continent, particulièrement le Sénégal et la Mauritanie.
Conséquence, la pénurie d’oignon est devenue inquiétante et les prix ont flambé sur le marchés sénégalais et mauritaniens avec des fluctuations importantes.
Ainsi, pour faire face à cette situation, les autorités sénégalaises ont sollicité une aide d’urgence au Maroc afin de contrer la pénurie et la flambée des prix. Une demande à laquelle le Maroc a répondu en envoyant 2.400 tonnes d’oignon, par voie maritime, en attendant les 10.000 tonnes supplémentaires qui suivront incéssamment, rapporte SeneAgriculture.
D’après ce média sénégalais, «ces quantités seront renforcées par d’autres importations en provenance du Maroc, grâce à une suspension temporaire des exportations vers le Sénégal». A ce titre, une délégation sénégalaise va se rendre au Maroc pour «discuter avec les autorités de ce pays des modalités de mise en place d’un couloir d’approvisionnement», révèle le média, citant de sources officielles.
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Cette crise de l’oignon et ses conséquences devraient inciter les autorités sénégalaises et mauritaniennes à trouver des solutions durables à ce problème. Pour le Sénégal, bien qu’il soit un des plus grands producteurs d’oignon d’Afrique de l’Ouest, avec le Nigeria et le Niger, le pays devrait s’approvisionner de l’extérieur durant les six mois à venir, en attendant la prochaine récolte et le rétablissement des prix normaux. Le gros problème du Sénégal est l’absence de structures de conservation des récoltes. Une situation qui entraine des bradages et des pourrissements d’une partie des oignons juste après les récoltes.
Pour la Mauritanie, qui n’en produit presque pas, la situation est beaucoup plus complexe du fait de la dépendance quasi totale aux importations. Une situation que les autorités gagneraient à corriger en encourageant la production locale de ce légume indispensable qui ne nécessite pas de gros moyens.