Fatou Niang Mbaye, ménagère, dit craindre pour ses maigres revenus suite à l’annonce du gouvernement de taxer les transferts d’argent via le mobile money «franchement, ce n’est pas une bonne idée. Nous effectuons des transferts d’argent via le mobile money tous les jours. Si on ajoute encore des frais, ça va trop peser sur nous. Même avec des envois de 50 ou de 100 francs plusieurs par mois, ça finit pas peser lourd».
Avec un taux de pénétration estimé à 95%, le mobile money est devenu incontournable au Sénégal. Mais la taxe, fixée entre 0,5% et 2% selon les opérations, inquiète de nombreux usagers qui redoutent une hausse des prix.
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Ibrahima Diène, gérant de quincaillerie à Dakar, dit craindre revoir ses prix à la hausse, ce qui pourrait lui faire perdre des clients «je reçois souvent mes paiements par mobile money. Si on me prélève encore une taxe, je serai obligé d’augmenter mes prix. Et ça, c’est le client qui va en souffrir.»
De son côté, l’État justifie cette réforme par la nécessité de renflouer ses caisses. L’objectif affiché est de mobiliser près de 220 milliards de francs CFA entre 2025 et 2028.
Loin du ressenti populaire, l’Association sénégalaise des établissements de paiement et des émetteurs de monnaie électronique a publié sa réponse chiffrée au projet gouvernemental de taxer de tels envois d’argent.
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Le Mobile Money a vu ses transactions croître de 34% en moyenne annuelle entre 2022 et 2024, passant de 14.308 milliards FCFA en 2022 à 48.073 milliards en 2024, soit +230 % en deux ans. Cependant, une taxation des volumes pourrait inverser cette dynamique, avertit l’Association «Si les volumes de Mobile Money venaient à être taxés, comme semble le prévoir la proposition actuelle du Gouvernement, ceux-ci diminueraient de 30% à 50%, sur la base des données observées dans d’autres pays»
Maniang Diop, vendeur de chaussures et d’habillements assure: «On comprend que l’État cherche de l’argent pour financer ses projets. Mais il faut faire attention, car le début sera très difficile pour les consommateurs. Si on prend une taxe sur ce que l’on reçoit alors qu’on n’a pas de salaire à la fin du mois, ce sera compliqué. Mais on comprend que c’est dans le cadre de redresser l’économie du pays.»
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Entre nécessité budgétaire pour l’État et craintes d’un recul de l’inclusion financière, la nouvelle taxe sur le mobile money divise déjà les Sénégalais. Même les gérants de services de transfert, potentiellement impactés, restent prudents dans leurs déclarations. Beaucoup préfèrent attendre de voir si la mesure sera maintenue en l’état ou si la pression populaire obligera le gouvernement à revoir sa copie.