C’est une place peu enviable que l’Algérie occupe. En effet, selon la dernière publication de l’Association du transport aérien international (IATA), représentant environ 290 compagnies et couvrant plus de 84% du trafic mondial, l’Algérie arrive en tête de la liste des pays qui bloquent les fonds des compagnies aériennes étrangères.
Il faut rappeler que les compagnies aériennes qui desservent un pays y vendent des billets, assurent d’autres services dont le fret et perçoivent leurs recettes en monnaie locale. Toutefois, pour leur rapatriement, ces compagnies ont besoin de changer leurs revenus en devises étrangères, en dollar américain notamment. Pour ce faire, ces compagnies ont besoin des autorisations des Etats qu’elles desservent.
En dépit des conventions encadrant ces rapatriements de fonds en devises vers le pays où est basé le siège de chaque compagnie, tous les pays, et pour diverses raisons, ne facilitent pas ces rapatriements de fonds qui restent ainsi bloqués. Dans certains cas, ces restrictions comprennent des procédures d’autorisation de rapatriement complexes ou incohérentes, des retards dans l’obtention de ces autorisations, une pénurie de devises ou d’autres limitations imposées par les gouvernements ou les banques centrales. Quand il ne s’agit pas tout simplement d’un manque de volonté des autorités. A ces facteurs s’ajoutent aussi l’instabilité politique et les crises économiques qui touchent certains pays.
Malgré les conventions signées par les Etats, selon l’IATA, à fin octobre 2025, plus de 1,2 milliard de dollars de fonds des compagnies aériennes étaient bloqués par les gouvernements. Sur ce montant, 93% sont immobilisés en Afrique et au Moyen-Orient. A eux seuls, dix pays d’Afrique et du Moyen-Orient concentrent 89% du total des fonds des compagnies aériennes bloqués à travers le monde.
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A la tête de ces pays, se trouve actuellement l’Algérie avec 307 millions de dollars de fonds bloqués, soit 25,5% du total. Ce montant n’était que de 178 millions de dollars au 1er juin 2025, affichant ainsi une progression de 72,47% en un peu plus de six mois. Une augmentation significative qui fait suite à une nouvelle exigence d’approbation du ministère du Commerce, qui alourdit davantage des formalités administratives d’autorisation de change déjà complexes. L’IATA exhorte le gouvernement algérien à supprimer les procédures et exigences superflues imposées aux compagnies aériennes.
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Pourtant, l’Algérie, avec officiellement près de 70 milliards de dollars de réserves (d’autres sources évoquent environ 50 milliards) est le second pays africain ayant la plus importante réserves en devises du continent, derrière l’Afrique du Sud qui détient plus de 72 milliards de dollars à fin novembre 2025.
Selon l'IATA, à fin octobre 2025, plus de 1,2 milliard de dollars de fonds des compagnies aériennes étaient bloqués par des gouvernements. Dix pays d’Afrique et du Moyen-Orient concentrent 89% du total des fonds bloqués.. DR
De plus, la banque centrale d’Algérie dispose dans ses coffres de la plus importante réserve d’or du continent. Alors une question s’impose: pourquoi le gouvernement algérien bloque-t-il les sorties de devises des compagnies aériennes étrangères desservant le pays?
Vu le montant en question, cela ne saurait relever d’un manque de devises, comme c’est le cas de certains pays en crise de liquidités. Ce blocage des fonds trouve son origine dans la mauvaise gouvernance, œuvre d’un régime qui ne se soucie guère de l’image du pays, qui s’en trouve égratignée par de tels comportements irresponsables.
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Dans ce classement peu glorieux, l’Algérie devance les pays de la Zone Franc CFA de l’Afrique centrale regroupant six pays (Cameroun, Centrafrique, Tchad, Congo, Guinée équatoriale et Gabon) qui totalisent 179 millions de fonds bloqués. Le trio de tête est complété par le Liban avec 138 millions de dollars de fonds bloqués.
Les autres pays du Top 10 sont le Mozambique (91 millions de dollars), l’Angola (81 millions), l’Érythrée (78 millions), le Zimbabwe (67 millions), l’Éthiopie (54 millions) le Pakistan (54 millions) et le Bangladesh (32 millions).
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Il faut souligner que ces blocages de fonds peuvent avoir des conséquences néfastes aussi bien sur les compagnies aériennes elles-mêmes que sur les Etats. Pour les premières, le blocage est une épine financière majeure, ces fonds étant nécessaires aux investissements et aux opérations d’exploitation quotidiennes. Le gel de leurs avoirs peut contraindre les compagnies aériennes étrangères à réduire les dessertes à destination de ces pays réfractaires. Ainsi, ces blocages de fonds accentuent les risques pour le transport aérien, les voyages et les échanges régionaux en fragilisant les compagnies les plus touchées.
Face à cette situation, l’IATA appelle les gouvernements à lever toutes les restrictions sur le rapatriement des devises et à permettre aux compagnies aériennes d’accéder à leurs recettes en dollar américain provenant de la vente de billets, du fret et d’autres activités, comme le garantissent les accords bilatéraux sur les services aériens et les traités internationaux.







