La Tunisie a récemment obtenu un accord de prêt du Fonds monétaire international (FMI) de 1,9 milliard de dollars sur 4 ans. Toutefois, cet accord ne sera entériné qu’en décembre prochain, lorsque le Conseil d’administration de l’institution de Bretton Woods donnera son quitus. En attendant, le gouvernement tunisien souhaite donner des gages sur la série de réformes que le FMI exige d’elle.
Parmi celles-ci figurent certaines réformes jugées prioritaires, dont, entre autres, la baisse de la masse salariale astronomique, qui représente 15% du PIB du pays, soit l’un des plus élevés au monde, l’élimination progressive des subventions sur les carburants et d’autres produits de base, ainsi que la privatisation des entreprises publiques déficitaires afin de redynamiser certains secteurs d’activité et alléger le déficit budgétaire.
Autant de réformes impopulaires que tous les précédents gouvernements tunisiens s’étaient engagés à entreprendre, mais sans plus. Vacciné, le FMI a fait durer les négociations avec afin d’obtenir les garanties nécessaires à l’application des engagements pris par le gouvernement tunisien actuel. Seulement, suite aux déclarations du ministre des Finances, Sihem Boughdiri, il s’avère que le gouvernement a décidé d’inciter au départ volontaire 6.000 fonctionnaires par an.
Lire aussi : Tunisie: la centrale syndicale UGTT rejette les réformes voulues par le FMI
Ainsi, ce sont 24.000 travailleurs qui devront quitter la fonction publique durant les 4 prochaines années dans le cadre d’un programme de «départs volontaires». Seulement, ce nombre est une goutte d’eau dans la pléthore de fonctionnaires tunisiens estimée à 670.000, soit plus de 5,6% de la population totale. Les départs annoncés ne représentent qu’à peine 3,6% des effectifs de la fonction publique.
En tenant compte de ces départs, auxquels s’ajouteront les départs à la retraite normale, d’une part, et en tenant compte des recrutements annuels obligatoires dans les secteurs névralgiques que sont la santé, l’éducation et la sécurité, d’autre part, on peut à l’avance souligner que le dégraissage du mammouth ne sera pas au rendez-vous si on se fie aux annonces des autorités. On pourrait même se retrouver avec un nombre beaucoup plus élevé de fonctionnaires qu’actuellement.
Or, c’est cette pléthore de fonctionnaires qui plombe les finances publiques tunisiennes, sachant que la masse salariale du pays s’établit à 20,1 milliards de dinars, selon le budget en cours d’exécution, soit l’équivalent de 15% du Produit intérieur brut (PIB) du pays.
Lire aussi : Des centaines de Tunisiens manifestent dans la nuit contre la pauvreté, l'inflation et les pénuries
En clair, à l’instar des gouvernements précédents, il sera difficile pour l’actuel de dégraisser la fonction publique dans un contexte difficile où ceux qui seront «licenciés» auront du mal à retrouver du travail. Sinon, cette réduction des effectifs se traduira par les départs des meilleurs profils de certains secteurs clés (santé, éducation…) qui profiteront surtout aux pays occidentaux.
Pour le FMI, ce dégraissage est crucial pour réduire la masse salariale et la ramener à moins de 12% du PIB du pays. L’autre recommandation de l’institution internationale qui devrait contribuer à réduire les effectifs des entreprises publiques est leur privatisation, particulièrement celles qui sont budgétivores à cause des déficits qu’elles cumulent. Or, sur ce point, la puissante Union générale tunisienne du travail (UGTT), qui fait la pluie et le beau temps, est opposée catégoriquement à cette réforme.
Bref, à l’instar des précédents gouvernements, l’équipe dirigée par Najla Bouden a du pain sur la planche. Et ce, d’autant plus que cette fois-ci, les décaissements du prêt du FMI seront fonction de la poursuite des réformes entreprises par les autorités.