Vols intercontinentaux: le top 10 des pays africains qui taxent le plus les passagers

Les pays africains les plus chers et les moins chers par coût total des taxes et redevances aériennes

Le 25/07/2025 à 13h53

Un récent rapport de l’Association des Compagnies Aériennes Africaines sonne l’alarme sur le poids des taxes et redevances, entravant la connectivité et l’économie du continent.

Alors que les diasporas africaines affluent vers leur pays d’origine en cette saison estivale, les vols intercontinentaux subissent de plein fouet le poids des taxes et redevances africaines. Une étude récemment publiée par l’Association des Compagnies Aériennes Africaines (AFRAA), intitulée «Etude de l’AFRAA sur les taxes et redevances 2024 : un avenir radieux pour l’Afrique», révèle des disparités frappantes entre les pays du continent.

Basé sur des données d’IATA ACIC (septembre 2024), ce document expose un paysage fiscal où le Gabon et la Sierra Leone écrasent les passagers de charges dépassant 290 dollars, tandis que la Libye ou le Malawi limitent leur impact à moins de 5 dollars.

Une analyse, s’appuyant sur les principes de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (ICAO), démontre comment ces pratiques entravent la connectivité et l’économie africaine.

Top 10 des pays qui taxent le plus

L’Afrique de l’Ouest et centrale dominent le classement des pays aux taxes aériennes internationales les plus élevées, avec le Gabon en tête à 297,7 dollars, suivi de près par la Sierra Leone à 294 dollars et le Nigeria à 180 dollars.

Cette tendance régionale se confirme avec Djibouti (168,7 dollars), le Niger (130,7), le Bénin (123,4), le Sénégal (122,6), le Liberia (115), le Ghana (111,5) et la République Démocratique du Congo (109,9). Ces dix pays, dont neuf appartiennent aux sous-régions ouest et centrale, illustrent une distorsion fiscale criante: leurs charges cumulées dépassent systématiquement 100 dollars, atteignant près du triple de la moyenne continentale qui est de 68 dollars.

Cette réalité s’explique par des politiques nationales déconnectées des principes de l’ICAO, où la taxation sert davantage à combler des déficits budgétaires qu’à répercuter des coûts opérationnels réels, fragilisant tant les compagnies aériennes que la demande-passager.

Ces montants, qui incluent taxes carburant, frais de sécurité et redevances passagers, contredisent frontalement les politiques de l’ICAO. Ainsi, le principe de lien aux coûts est ignoré. Disons que ces charges ne reflètent pas le coût réel des services, mais visent à combler des déficits fiscaux nationaux.

En Afrique de l’Ouest, la moyenne atteint 109,49 dollars par passager, contre 106,62 en Afrique centrale. Pourtant, ces régions ne génèrent que 23% du trafic continental, contre 35% pour l’Afrique du Nord bien moins taxée.

Top 10 des pays qui taxent le moins

À l’opposé, l’Afrique du Nord et australe affichent les taxes les plus compétitives, menées par la Libye à seulement 1,3 dollars, le Malawi à 5 dollars et le Lesotho à 5,7 dollars. Des hubs économiques majeurs comme l’Algérie (9,8 dollars), le Maroc (25,1) ou l’Angola (28,4) démontrent qu’une forte connectivité intercontinentale– notamment pour les diasporas– peut coexister avec des charges modérées.

Cette dynamique vertueuse s’étend à l’Eswatini (14,2 dollars), la Tunisie (15,4), le Botswana (18,9) et São Tomé (26), formant un bloc cohérent où aucun pays n’excède 30 USD. La moyenne nord-africaine de 25,27 dollars, la plus basse du continent, révèle une adhésion plus stricte aux principes ICAO de transparence et de proportionnalité aux coûts, offrant un modèle viable pour rééquilibrer la compétitivité aérienne africaine.

L’Afrique du Nord, avec une moyenne de 25,27 dollars, prouve qu’une fiscalité modérée est compatible avec un trafic dense. Une approche qui respecte mieux les principes ICAO.

Fracture économique criante

La cartographie des sous-régions africaines révèle une disparité économique criante, où l’Afrique de l’Ouest (109,49 dollars) et centrale (106,62) imposent les taxes aériennes internationales les plus élevées, concentrant respectivement 9 et 3 pays dans le Top 10 des plus chers. À l’inverse, l’Afrique de l’Est (63,32 dollars), l’Afrique australe (34,50) et surtout l’Afrique du Nord (25,27) – cette dernière incluant 4 pays dans le Top 10 des moins chers– illustrent des modèles plus vertueux.

Sur les 54 pays du continent, 19 dépassent la moyenne continentale de 68 dollars, tandis que 14 appliquent des charges exorbitantes supérieures à 100 dollars, marquant une hausse significative depuis 2022. Une inflation fiscale qui aggrave la vulnérabilité d’un secteur aérien déjà structurellement déficitaire, alors même qu’il soutient 8,1 millions d’emplois et contribue à hauteur de 75 milliards dollars au PIB africain.

Ainsi, l’aviation africaine reste non rentable, en partie, à cause de telles charges. Une divergence régionale qui mine la compétitivité collective et l’intégration économique du continent.

L’urgence d’une harmonisation

Ces disparités violent les quatre piliers des politiques ICAO : non-discrimination (des pays comme le Gabon taxent davantage les vols internationaux), lien aux coûts (les montants sont sans rapport avec les services), transparence (peu d’États consultent les compagnies) et consultation. Conséquences directes : renchérissement des billets, réduction de la demande et entrave à l’intégration régionale.

Plusieurs destinations africaines perdent ainsi des milliards de dollars de recettes touristiques potentielles faute de connectivité abordable.

Comme l’on peut le constater, sans réforme fiscale alignée sur les principes de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (ICAO), l’aviation africaine restera un luxe, freinant son potentiel économique. Les pays moins chers (Libye, Malawi, Lesotho, etc.) montrent la voie ; aux autres de suivre.

Les pays les plus chers et les moins chers pour les départs intercontinentaux

Aéroports les plus chersTaxes sur les départs intercontinentaux (USD)Aéroports les moins chersTaxes sur les départs intercontinentaux (USD)
Gabon297.7Libye1.3
Sierra Leone294Malawi5.0
Nigeria180Lesotho5.7
Djibouti168.7Algérie9.8
Niger130.7Eswatini14.2
Benin123.4Tunisie15.4
Sénégal122.6Botswana18.9
Liberia115Maroc25.1
Ghana111.5Sao Tome26
RDC109.9Angola28.4
Tchad105.7Afrique du Sud28.5

Source: Association des Compagnies Aériennes Africaines (AFRAA).

Par Modeste Kouamé
Le 25/07/2025 à 13h53