A la suite des "allégations d'exactions présumées commises sur des civils (...), des enquêtes ont été ouvertes par la gendarmerie nationale sur instructions du ministère de la Défense et des Anciens combattants pour mener des investigations approfondies afin de faire toute la lumière sur ces allégations", a écrit dans un communiqué le procureur auprès du tribunal militaire de Mopti, grande ville proche de Moura.
Le procureur se rendra "très prochainement" sur place avec des enquêteurs et un médecin légiste, ajoute le communiqué.
Les autorités dominées par les militaires arrivés au pouvoir par la force en 2020 étaient pressées de maintes parts d'ouvrir une enquête indépendante sur les faits survenus entre le 27 et le 31 mars à Moura, dans une région qui est l'un des principaux foyers des violences sahéliennes.
L'armée malienne et des témoins interrogés par la presse ou l'ONG Human Rights Watch (HRW) offrent des versions diamétralement opposées.
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L'armée dit avoir "neutralisé" 203 jihadistes lors d'une opération d'envergure.
Les témoins cités rapportent une masse d'exécutions sommaires de civils, des viols et des actes de pillage commis par des soldats maliens et des combattants étrangers présumés être des Russes.
HRW affirme que 300 civils, dont certains soupçonnés d'être des jihadistes, ont été exécutés, et parle du "pire épisode d'atrocités" commises depuis le déchaînement des violences au Mali en 2012.
Mercredi, l'expert indépendant de l'ONU sur les droits de l'homme au Mali, Alioune Tine, a mêlé sa voix à celles de la France, des Etats-Unis, de l'Union européenne ou encore de la Commission malienne des droits de l'homme pour demander une enquête.
L'ONU enquête
Le porte-parole de l'ONU Stéphane Dujarric a indiqué devant la presse à New York que les Nations unies avaient ouvert une enquête et que les experts de la Mission onusienne au Mali (Minusma) cherchaient à se rendre sur le site "le plus rapidement possible".
Un tel déplacement est soumis au bon vouloir des autorités maliennes. Le communiqué du tribunal militaire de Mopti ne dit rien concernant l'éventualité que ses investigations associent des enquêteurs non-maliens.
En 2021, des enquêteurs de la Division des droits de l'homme de la Minusma s'étaient rendus sur le site d'une frappe de la force antijihadiste française Barkhane à Bounti (centre) le 3 janvier. Leur rapport avait conclu en mars suivant à la mort de 19 civils réunis pour célébrer un mariage, et pas seulement des jihadistes comme Paris l'a toujours maintenu.
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L'armée malienne, comme d'autres au Sahel, est régulièrement accusée d'exactions. L'armée assure enquêter chaque fois qu'il y a lieu.
Mais les défenseurs des droits dénoncent constamment le fait que de tels agissements restent impunis.
L'expert onusien Alioune Tine a exhorté dans un communiqué les autorités maliennes à "accorder un accès sans entrave à la Division des droits de l'homme afin qu'elle puisse mener une enquête approfondie".
"Compte tenu des graves allégations de crimes de masse, des dizaines de civils ayant été tués au cours de ces opérations, je demande aux autorités maliennes de mener dans les meilleurs délais une enquête approfondie, indépendante, impartiale et efficace", a dit M. Tine.
Les conclusions de ces investigations devront être rendues publiques, a-t-il ajouté.
Les évènements de Moura ont pour toile de fond la reconfiguration en cours depuis que la junte s'est détournée de la France et de ses alliés européens, et tournée vers la Russie pour reprendre le terrain perdu aux jihadistes depuis 2012.