Cette suspension vient réduire un peu plus l’espace de diffusion en Afrique de l’ouest de ces deux médias publics français, suspendus depuis plusieurs années au Mali, Burkina Faso et Niger, trois pays sahéliens dirigés par des juntes militaires.
«Plusieurs émissions récentes ont relayé des propos inexacts, tendancieux, voire contraires aux faits établis, portant atteinte à la stabilité des institutions républicaines et à l’image du pays», a annoncé la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC) du Togo, dans un communiqué.
La HAAC ajoute que cette mesure «fait suite à des manquements répétés, déjà signalés et formellement rappelés en matière d’impartialité, de rigueur et de vérification des faits».
«Le pluralisme des opinions n’autorise pas la diffusion de contre-vérités ni la présentation partiale de l’actualité. La liberté de la presse ne saurait être synonyme de désinformation ou d’ingérence», poursuit l’institution.
Début juin, des manifestations lancées sur les réseaux sociaux par des jeunes et des militants de la société civile ont eu lieu à Lomé pour protester contre le régime.
Le Togo est dirigé depuis 2005 par Faure Gnassingbé, successeur de son père resté près de 38 ans à la tête du pays.
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Les manifestants dénonçaient notamment les arrestations de voix critiques, la hausse du prix de l’électricité et la réforme constitutionnelle qui a permis à M. Gnassingbé de consolider son pouvoir.
Nouveaux appels à manifester
Ces manifestations avaient notamment été initiées par le rappeur Aamron, critique du pouvoir, qui avait été arrêté fin mai avant de réapparaître dans une vidéo le 5 juin, depuis un hôpital psychiatrique où il présentait des excuses envers M. Gnassingbé.
Dans sa décision dont l’AFP a eu copie, la HAAC pointe trois reportages ou interventions: la diffusion sur France 24 d’une interview dans laquelle «des propos inexacts ont été tenus au sujet de conditions alléguées dans lesquelles l’artiste Aamron aurait été interpellé», des «prises de position publiques de la correspondante régionale de France 24 appelant à la mobilisation contre les institutions républicaines», et des propos relayés dans le journal Afrique et dans une chronique de RFI «présentant un caractère tendancieux».
Une cinquantaine de personnes ont été arrêtées puis libérées, selon le procureur qui précisait la semaine dernière que «quelques-unes» encore détenues allaient être rapidement présentées au parquet.
Des journalistes qui couvraient les manifestations ont été brièvement interpellés et contraints par les forces de l’ordre d’effacer leurs images.
La nouvelle Constitution adoptée en avril 2024 permet à M. Gnassingbé de consolider son pouvoir désormais au sein d’un régime parlementaire dont il occupe la plus haute fonction, celle de président du Conseil.
Elle cristallise les tensions au Togo: l’opposition et la société civile accusant M. Gnassingbé de vouloir rester indéfiniment à la tête de l’Etat, les autorités répondant que la réforme constitutionnelle vise plutôt à «dépersonnaliser» le pouvoir et renforcer «l’unité nationale et la cohésion du pays».
De nouveaux appels à manifester ont été lancés sur les réseaux sociaux, pour les 26, 27 et 28 juin.
Le Togo est au 121e rang sur 180 dans le classement 2025 de la liberté de la presse de Reporters sans frontières (RSF), en recul de 8 places par rapport à 2024.