Les deux ONG de défense des droits soulignent dans un communiqué qu’à l’approche de la première élection présidentielle depuis le coup de force du président Kaïs Saied de l’été 2021, «les autorités ont intensifié leur répression de la liberté d’expression» en se basant sur le décret-loi 54 contre les «fausses nouvelles» et «d’autres lois archaïques».
«En s’en prenant à des journalistes et d’autres figures des médias, le gouvernement de M. Saied enfonce le dernier clou dans le cercueil de l’espace civique en Tunisie», fustige Lama Fakih, directrice régionale de HRW.
L’ONG souligne «la fragilisation du système judiciaire» avec la révocation de plus de 50 juges par le président Saied peu après s’être octroyé les pleins pouvoirs il y a trois ans, l’arrestation depuis février 2023 de dizaines d’opposants et des interpellations ayant touché récemment des ONG d’aide aux migrants et réfugiés.
«Les autorités tunisiennes sont en train d’anéantir les derniers gains de la Révolution de 2011: la liberté d’expression et des médias», abonde Heba Morayef, directrice régionale d’Amnesty International, selon le communiqué.
En vue de la présidentielle prévue à l’automne, Mme Morayef exhorte le pouvoir tunisien à «garantir que les médias indépendants puissent réaliser leurs couvertures sans harcèlement ni intimidation».
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Les deux organisations réclament «la libération immédiate et l’arrêt des poursuites» pour une opinion exprimée. Elles appellent aussi à «abroger le décret 54, ainsi que les dispositions vagues ou trop larges d’autres textes, utilisés pour criminaliser la liberté d’expression».
Le communiqué cite les cas de deux chroniqueurs, Borhen Bssaiss et Mourad Zeghidi, condamnés le 22 mai à un an de prison, et du cofondateur du média indépendant Inkyfada, condamné à neuf mois de prison avec sursis.
Les deux ONG rappellent aussi les poursuites engagées en vertu du décret 54 contre l’avocate et chroniqueuse Sonia Dahmani, arrêtée brutalement le 11 mai dans les locaux du barreau de Tunis, et la condamnation à six mois de prison du journaliste Mohamed Boughalleb.
Selon HRW et Amnesty, «plus de 70 personnes» - opposants, avocats, journalistes, défenseurs des droits et simples internautes - «ont fait l’objet de poursuites arbitraires depuis fin 2022″, dont «au moins 40 restent arbitrairement détenues».