Condamné en première instance, en décembre 2023, à cinq ans de prison ferme, l’ancien président de Mauritanie a été reconnu, en appel, coupable d’«enrichissement illicite, trafic d’influence, blanchiment de capitaux». Mercredi 14 mai, un tribunal de Nouakchott a aggravé la peine à 15 ans de prison ferme assortie de sa privation de ses droits civiques. Lors de l’audience, qui s’est déroulée sous haute surveillance policière, la cour a également confirmé la confiscation des biens de M. Aziz.
Dénonçant des irrégularités dans la procédure, la défense a introduit un pourvoi de cassation devant la cour suprême. Les avocats des deux parties préparent l’ultime épisode d’un feuilleton inédit, qui a tenu en haleine l’opinion nationale et internationale pendant prés d’une décennie.
Maitre Moussa Diagana, avocat de l’Etat de Mauritanie, constitué partie-civile, estime que «la cour d’appel de Nouakchott a dit le droit. La juridiction de second degré s’est engouffrée dans un boulevard ouvert par la défense elle-même et qui n’a pas suivi son client. Ce dernier a avoué avoir reçu une valisette. J’ai prouvé à l’ancien président que sa défense l’a laissé tomber et même enfoncé. La défense a en effet revendiqué une immunité fonctionnelle qui prend naturellement fin avec la fonction».
L’avocat de l’Etat fait allusion à l’aveu du prévenu d’avoir reçu deux valises remplies de plusieurs millions d’euros que lui aurait remises son successeur au lendemain de son élection en 2019.
Ces éléments, ajoutés à l’attitude d’une défense refusant de demander au tribunal de reconnaître à leur client des circonstances atténuantes, alors que tous les éléments du dossier accablent son client, expliqueraient l’aggravation de la peine devant la cour d’appel.
Maître Bah Mbareck Rachid, avocat de la défense, conteste la thèse servie par son collègue. Il rappelle que «l’arrêt de la cour d’appel de Nouakchott, rendu le 14 mai 2025, a fait l’objet d’un pourvoi en cassation le 21 mai. Après notification de la décision, nous avons déposé le mémoire de cassation de la défense de l’ancien président de la République dans les délais légaux».
L’avocat ajoute que «le dossier a été transmis aux greffes de la cour suprême. Le fondement de notre pourvoi est la violation de l’article 93 de la Constitution et l’irrégularité de la constitution de partie civile de l’Etat de Mauritanie. Notre client est toujours détenu en situation d’isolement, alors qu’il souffre de plusieurs pathologies».
Au moment de son inculpation, en mars 2021, les enquêteurs ont chiffré à 67 millions d’euros le patrimoine et le capital de Mohamed Ould Abdel Aziz, 68 ans.