Cette modification ouvre la voie à un maintien indéfini au pouvoir du président Mahamat Idriss Déby, proclamé président de transition par l’armée en avril 2021, puis élu chef de l’Etat en mai 2024 lors d’une élection contestée et boudée par une partie de l’opposition.
«En supprimant la limitation du nombre de mandats présidentiels, les autorités tchadiennes ont démantelé un garde-fou important contre l’autoritarisme», a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale à HRW. Il souligne que cette réforme, adoptée par un Parlement dominé par le Mouvement patriotique du salut (MPS, parti au pouvoir), «affaiblit les perspectives d’un changement démocratique conforme aux normes internationales».
Les amendements, approuvés à une écrasante majorité en septembre (236 voix pour, 0 contre sur 257 membres), rallongent également la durée du mandat présidentiel de cinq à sept ans. Les députés de l’opposition du Rassemblement national des démocrates tchadiens ont boycotté le vote, le qualifiant d’«inconstitutionnel et autoritaire».
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Cette réforme s’inscrit dans un contexte marqué par la répression des opposants et de la société civile, devenue «monnaie courante» selon l’organisation.
En mai 2025, Succès Masra, président du parti d’opposition Les Transformateurs et ancien Premier ministre, a été condamné à 20 ans de prison pour «incitation à la haine et à la violence», dans un procès jugé «politiquement motivé» par HRW.
En octobre 2022, les forces de sécurité avaient réprimé dans le sang des manifestations exigeant une transition vers un régime civil, faisant des dizaines de morts et des centaines d’arrestations arbitraires.
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La suppression de la limitation des mandats avait déjà été mise en place en 2005 sous Idriss Déby Itno, père de l’actuel président, puis rétablie en 2015. Une pratique qualifiée de «coup d’État constitutionnel» par certains experts est contraire à la Charte africaine de la démocratie, qui interdit les révisions constitutionnelles visant à prolonger indéfiniment le pouvoir.
HRW appelle les autorités tchadiennes à annuler cette réforme constitutionnelle qui restreint davantage les droits des citoyens et à organiser un référendum pour toute modification constitutionnelle.
L’ONG exige également la libération immédiate des opposants emprisonnés, comme Succès Masra, et la fin des poursuites judiciaires à motivation politique.