La polémique autour des contrats pétroliers liant l’Etat du Sénégal aux compagnies étrangères menant des explorations prend une autre dimension. Face à une opposition qui persiste, depuis de longues semaines dans ses accusations, le chef du gouvernement, Mahammad Boun Abdallah Dionne, est monté au créneau pour brandir des menaces à l’encontre des diffuseurs de «fausses nouvelles».
«Désormais, quiconque diffusera de fausses nouvelles (concernant les contrats pétroliers) s’exposera à la rigueur de la loi pénale», a-t-il mis en garde. Dans le viseur du Premier ministre, Ousmane Sonko, l’inspecteur des impôts et domaines récemment révoqué de la Fonction publique pour ses révélations fracassantes sur le régime de Macky Sall, notamment sur le rôle du frère de celui-ci (Aliou Sall) dans l’octroi d’un permis de recherche à la société Petro Tim Limited.
Sonko n’a pas tardé à réagir à cette menace voilée du chef du gouvernement. Droit dans ses bottes, il persiste dans son rôle d’œil de Caïn du gouvernement : «tant qu’ils ne répondront pas à nos questions, nous reviendrons à la charge. C’est faire preuve de faiblesse que de se réfugier derrière l’appareil d’Etat pour menacer d’honnêtes citoyens qui n’ont commis d’autres crimes que de poser des questions sur la gouvernance publique», dit-il, annonçant une conférence de presse, ce jeudi, pour démonter un en un les arguments avancés par le Premier ministre pour disculper le pouvoir.
L’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye, visé aussi par cette menace, a fait dans l’ironie : «J’ai lu qu’on me taxait d’ignorant en matière de questions pétrolières. Comment donc peut-on reprocher à un ignorant de poser des questions? J’ignore, donc je pose des questions».
Pour Birahime Seck du Forum civil (société civile), le Premier ministre Dionne a fait cette sortie non pas pour éclairer les Sénégalais sur les contrats pétroliers mais uniquement pour «essayer de dédouaner Aliou Sall, le frère du président».
Pourtant, le PM s’est expliqué, longuement d’ailleurs (durant 50 minutes), donnant force détails sur le code pétrolier et ses dispositions, les exonérations fiscales pour l’activité d’exploration, la nature des gisements, allant même jusqu’à proposer, dans un souci de transparence, une task-force chargée de mettre en ligne tout ce qui a trait aux contrats pétroliers détenus par Petrosen.
Mais sa sortie est loin de convaincre les opposants. Ceux-ci voient même un «affolement» du pouvoir. Finalement, aux yeux de beaucoup de Sénégalais, pas forcément des opposants, la sortie du chef du gouvernement a suscité plus de questions qu’elle n’en a résolues.