Malick Sall, nouveau ministre de la Justice, veut marquer de son sceau, son passage à la tête de l'institutions judiciaire sénégalaise.
Le remplaçant du très controversé ancien Garde des Sceaux, Ismaïla Madior Fall, dit vouloir résoudre les nombreux problèmes dont souffre son département.
Il entend tout d'abord s’attaquer aux longues détentions préventives et a sur sa ligne de mire les magistrats qui ne remplissent pas leurs missions au sein des différents tribunaux du Sénégal.
«Il faut que la Justice revienne dans le cœur des Sénégalais», a donc déclaré, en sbstance, Malick Sall, dès sa première intervention.
Selon lui, «il ne peut pas y avoir d’Etat de droit, là où la Justice n’est pas bien acceptée par les populations. La Justice sénégalaise a des problèmes et des faiblesses».
Loin de prétendre soigner tous les maux qui gangrènent le système judiciaire sénégalais, le nouveau Garde des Sceaux s’est plus pragmatiquement engagé à «les diminuer au maximum».
Il juge en effet inacceptable, dans un Etat de droit, le fait que «des justiciables restent en prison des années sans être jugés».
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S’agissant de la présence très décriée du président de la République à la tête du Conseil supérieur de la magistrature, Malick Sall n’en fait pas un cas.
«La présence du président de la République dans le Conseil supérieur de la magistrature ne pose pas de problème. Les magistrats eux-mêmes vous le diront. Aucun magistrat sérieux ne dira que cela gêne le fonctionnement du service public de la justice», indique-t-il, rassurant.
Et de conclure son propos en précisant qu'en tant que ministre de la Justice, il est «un homme libre» qui ne «[répondra] que de la loi et du président de la République».
Mais c’est là où, semble-t-il, le bât blesse.
En effet, de nombreux juristes sénégalais ont toujours soutenu que tant que le Chef de l’Etat sera présent au Conseil supérieur de la magistrature, «la justice sénégalaise ne sera pas indépendante». C’est là, du moins, l’avis de Babacar Ba, du Forum du Justiciable.
Dans un communiqué émis en noembre 2017, cette instance, une oRganisation non gouvernementale, avait signalé que «le fonctionnement du Conseil supérieur de la Magistrature, présidé respectivement par le Président de la république et son ministre de la Justice, montre une dépendance absolue vis à vis du pouvoir exécutif. Et ceci peut, d'une part, entacher gravement l'objectivité dans le choix des juges appelés à statuer sur le sors des citoyens, et, d'autre part, favoriser des calculs politico-judiciaires concernant les dossiers judiciaires dits politiques».
Les membres de cette ONG, Babacar Ba à leur tête, faisaient là très clairement allusion aux cas de Khalifa Sall, l'ex-maire de Dakar qui a eu, avant le dernier scrutin présidentiel, maille à partir avec la justice, et Karim Wade, fils de l'ancien président Abdoulaye Wade, accusé d'"enrichissement illicite", alors que nombre de citoyens reprochaient à l’exécutif de s’être servi de l'appareil judiciaire pour neutraliser les adversaires du président de la République.
Cet avis émis par Babacar Ba est d'ailleurs aussi celui de l’Union des magistrats du Sénégal (UMS) qui a toujours réclamé le départ du l’Exécutif du Conseil supérieur de la Magistrature (CMS).
En décembre 2018, l’UMS avait même demandé à Macky Sall et à son ministre de la justice de cette époque de «conférer au CSM le pouvoir de faire les propositions de nomination pour tous les magistrats, la définition et la diffusion de critères objectifs pour la nomination des magistrats en matière disciplinaire, permettre aux organes de saisir directement le Conseil de discipline». Macky Sall entendra-t-il aujourd'hui ces voix manifestement discordantes?