Plusieurs des quinze camions de ce convoi transportant des aides alimentaires cruciales destinées à des familles d’el-Facher touchées par la famine, ont été incendiés pendant cette attaque survenue près de Koma, au Darfour-Nord, selon un communiqué conjoint du Programme alimentaire mondial (PAM) et de l’Unicef.
Le convoi comprenant des camions des deux organisations de l’ONU attendait une autorisation pour achever son trajet jusqu’à El-Facher après avoir parcouru plus de 1800 km depuis Port-Soudan, selon la même source.
Conformément aux procédures, son «itinéraire avait été communiqué à l’avance et les parties sur le terrain étaient informées et conscientes de la localisation des camions», selon la même source.
«Les deux agences exigent l’arrêt immédiat des attaques contre le personnel humanitaire, leurs installations et véhicules - une violation du droit international humanitaire», poursuit le texte qui n’identifie pas les attaquants.
Le Soudan, troisième plus grand pays d’Afrique en superficie, est en proie depuis avril 2023 à une lutte pour le pouvoir entre le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du pays depuis le coup d’État de 2021, et son ancien adjoint, Mohamed Hamdane Daglo, chef des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).
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Les deux camps s’accusent mutuellement d’avoir mené l’attaque de Koma.
Les FSR affirment que «le convoi a été délibérément visé par l’armée», tandis que le gouvernement, qui soutient l’armée régulière, accuse les paramilitaires de l’avoir attaqué «à l’aide de drones».
Séries d’attaques
L’attaque de Koma s’inscrit «dans une série d’attaques contre des opérations humanitaires au cours des deux dernières années», selon le PAM et l’Unicef qui dénoncent «l’impunité» de ceux qui s’en prennent aux civils et aux acteurs humanitaires.
Jeudi dernier, le PAM avait annoncé que son centre d’el-Facher -ville assiégée par les paramilitaires depuis mai 2024- avait été «endommagé par les bombardements répétés» des FSR.
Koma, située à environ 80 kilomètres d’el-Facher, se trouve dans une zone stratégique du Darfour, théâtre d’intenses affrontements ces dernières semaines.
Après avoir perdu la capitale Khartoum en mars, les FSR ont redirigé leurs offensives vers l’ouest du pays, dans le but de s’emparer d’el-Facher, dernière capitale provinciale échappant encore à leur emprise.
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Trois camps de déplacés autour de la ville ont déjà été déclarés en état de famine par l’ONU. Cinq autres zones, dont el-Facher, risquent d’y basculer selon l’ONU.
Entrée dans sa troisième année, la guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, déraciné 13 millions de personnes et plongé le pays en partie dans la famine.
Le conflit a engendré la «plus grande crise humanitaire», au monde, selon l’ONU.
«Jalon dévastateur»
Quatre millions de personnes ont fui le Soudan depuis le déclenchement de la guerre, a indiqué Eujin Byun, porte-parole du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), mardi lors d’une conférence de presse à Genève.
Parmi elles, 1,5 million ont fui vers l’Égypte, plus de 1,1 million vers le Soudan du Sud - dont près de 800.000 Soudanais du sud qui étaient réfugiés au Soudan - et plus de 850.000 vers le Tchad.
«Il s’agit d’un jalon dévastateur dans la plus grave crise de déplacement de population au monde», a déclaré M. Byun.
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En un peu plus d’un mois, 68.556 réfugiés sont arrivés dans les provinces tchadiennes de Wadi Fira et de l’Ennedi Est, avec une moyenne de 1.400 personnes traversant la frontière chaque jour ces derniers jours, a-t-il précisé.
Les deux belligérants sont accusés à l’international de viser des civils, bombarder aveuglément des zones habitées et faire obstacle à l’acheminement de l’aide humanitaire.
Dimanche, les FSR ont accusé l’Égypte voisine d’avoir fourni des armes à l’armée soudanaise, utilisées ensuite pour bombarder des civils dans plusieurs villes, notamment au Darfour, à Khartoum, Al-Jazira, Koma et Nyala.
Déjà en octobre, le général Daglo avait publiquement mis en cause Le Caire, qui avait aussitôt rejeté ces allégations.
Les autorités soudanaises, de leur côté, accusent régulièrement les Émirats arabes unis d’armer les FSR.
Abu Dhabi a toujours nié toute implication dans le conflit malgré plusieurs rapports d’experts de l’ONU et d’organisations internationales.