Les autorités administratives au Cameroun s’impliquent de plus en plus dans la désignation des chefs traditionnels. Un acte que les communautés villageoises réfutent arguant que cette ingérence fragilise l’autorité des dépositaires de la tradition ancestrale.
Le texte fondateur de la chefferie traditionnelle au Cameroun est le décret n°77/245 du 15 juillet 1977 signé par l’ancien président de la république, Amadou Babatoura Ahidjo. Selon l’article 2 de ce décret, la chefferie traditionnelle est organisée sur une base territoriale suivant les trois degrés qui sont la chefferie de premier degré, la chefferie de deuxième degré et celle de troisième degré.
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Les chefferies de premier degré sont celles dont le territoire de commandement englobe le territoire d’au moins deux chefferies de deuxième degré. Leurs limites n’excèdent pas en principe celles d’un département. Les chefferies de deuxième degré sont des chefferies dont le territoire de commandement englobe le territoire d’au moins deux chefferies de troisième degré. Leurs limites n’excèdent pas celles d’un arrondissement. Les chefferies de troisième degré correspondent aux villages en zone rurale ou aux quartiers en zone urbaine.
Tous ces territoires sont gouvernés par des chefs traditionnels, dépositaires des us et coutumes ancestrales comme l’autorité sur toutes les populations et l’arrangement quasiment à l’amiable des litiges entre les sujets suivant leurs compétences. Il faut rappeler que les chefferies de premier degré sont créées par le Premier ministre, celles de deuxième degré par le ministre de l’Administration territoriale et les dernières sont créées par le préfet du département.
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Et comment sont désignés ces chefs? C’est cette question qui fait actuellement couler beaucoup d’encre et de salives dans le pays. Mais il faut remarquer que l’autorité dans une chefferie est en principe successorale de père à fils. Toutefois, cette règle est biaisée lorsque le successeur ordinaire ne jouit pas de toutes ses facultés mentales et les populations sont ainsi contraintes de choisir une autre personne de la même lignée qui sera par la suite installée à ses fonctions par les autorités administratives.
Seulement depuis quelques années, les communautés s’inscrivent en faux contre ce qu’elles qualifient d’ingérence de ces autorités sur les chefferies. Nous sommes allés à la rencontre avec un habitant du village Nkolso’o dans la région du Centre qui en témoigne, «auparavant, les populations d’un village choisissaient leur chef et le sous-préfet venait tout simplement pour l’installer. De nos jours, certaines de ces autorités administratives imposent des chefs. Ce n’est pas normal», a-t-il déclaré.
Pour lui comme pour plusieurs personnes, l’immixtion des autorités administratives dans le cercle de désignation d’un chef traditionnel dilue l’autorité de ce chef sur ses sujets. Ce qui cause de sérieux dommages dans la gestion de ces entités. Il y a urgence de revoir la donne pour la paix dans les communautés.