«Il est très difficile pour un orphelin de réussir dans la vie. Surtout lorsqu’il a perdu ses parents en bas âge» reconnaît une habitante du quartier Etoa Meki à Yaoundé. De tels filles et garçons, de moins de 18 ans, devant se frayer seuls un chemin dans la vie forment au Cameroun une population de près de 2 millions d’individus selon l’enquête démographique et de santé réalisée en 2018. Selon cette dernière, «16% des enfants de ce groupe d’âges ne vivent avec aucun parent biologique» sur une population totale de 30 millions d’habitants.
Et les conséquences dont multiples et souvent graves: «En l’absence de prise en charge parentale, les enfants sont exposés à un risque plus élevé que la normale de discrimination, de violence, d’abus, d’exploitation et de protection inadéquate, étant donné que leur bien-être n’est pas toujours bien contrôlé" alerte une étude de l’Union Africaine intitulée «Les enfants sans protection parentale» parue en 2023.
Lire aussi : Cameroun: voici pourquoi les orphelinats perdent en crédibilité
Ne demandez surtout pas à dame Sigah Yvette, notre interlocutrice, comment elle le sait, mais elle professe que l’avenir d’un enfant dépend à 90% de ses parents, 5% de son environnement et 5 autres de la nature. Une fois les parents disparus, il devient extrêmement difficile de réussir dans la vie.
Et c’est le contexte africain en général et camerounais en particulier qui suscite des débats entre experts et observateurs.
Pour Pierre Hervé Lakom, un sociologue de l’université de Yaoundé I «les sociétés africaines sont toutes devenues mercantiles. Il n’y a plus d’actions sans qu’il y ait des intérêts derrière même au sein des familles. C’est dans cette logique qu’un parent ne va s’intéresser qu’à l’avenir de ses parents, plutôt qu’à celui de ses neveux», a-t-il déclaré.
Le témoignage qui prouve que la réussite est possible
Noubi Kévine, une étudiante nous a raconté son histoire. «J’ai perdu ma mère deux ans après la mort de mon père. C’est mon oncle maternel qui m’a recueillie. Trois ans après, il a cessé de m’inscrire à l’école alors que je préparais mon concours d’entrée en 6ème. Je suis devenue la bonne à tout faire à la maison tandis que ses enfants partaient tous à l’école. J’ai eu la vie sauve grâce à la femme de notre voisin qui m’a prise chez elle contre l’avis de mon bourreau d’oncle. Cette inconnue m’a aidée à poursuivre mes études. À présent, je suis en Master 2», Ce témoignage émouvant est salué par plusieurs Yaoundéens.
De nombreux conseillers sociaux appellent aux efforts personnels quelle que soit sa condition dans la société: Dieu n’aide que ceux qui ont la volonté de réussir.