Nous sommes à Soumbedioune, en début de soirée. À cette heure, jadis, les pêcheurs rentraient au quai le visage illuminé par une bonne prise. Mais aujourd’hui, les côtes sénégalaises ne sont plus aussi poissonneuses. Le froid, la surexploitation et la présence de grands bateaux ont profondément changé le quotidien des acteurs de la pêche artisanale.
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Aliou Cissé, pêcheur, témoigne de ces sorties en mer de plus en plus longues et incertaines. «Ces derniers jours, les prises sont faibles. Le froid y est pour beaucoup. Il nous arrive de rester plusieurs jours en mer sans ramener une quantité suffisante de poisson.»
Un constat partagé par Serigne Modou, également pêcheur. Pour lui, la raréfaction de la ressource a des causes multiples et des conséquences lourdes sur la vie des familles. «Nous vivons au jour le jour. La mer nous donne de moins en moins de poisson, pour de nombreuses raisons comme l’utilisation des mono-filaments, la présence des grands bateaux… Tout cela contribue à la raréfaction de la ressource. Ici, beaucoup de pêcheurs restent sans activité. Leur matériel s’est détérioré et ils ne gagnent pas assez pour le réparer.»
À quelques mètres du quai, l’impact se fait aussi sentir à terre. Lalia Sané tient un petit restaurant très fréquenté, dont l’activité dépend directement des prises des pêcheurs. Même si son commerce continue de fonctionner, la rareté du poisson complique le quotidien.
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«La rareté du poisson impacte directement mon commerce. Sans matière première, les clients s’en vont. En revanche, les jours où j’ai de quoi préparer, j’accueille beaucoup de monde.»
Pourtant, Soumbédioune reste une destination prisée par les amateurs de poisson frais. Les clients, eux, trouvent encore leur compte et saluent la qualité de la restauration, notamment celle de Lalia.
Habitué des lieux, Abdou Ka ne cache pas son enthousiasme. «Je suis ici au restaurant de Lalia. Elle prépare de très bons frits de poisson. Pour moi, c’est la meilleure, son poisson a vraiment bon goût.»
Même appréciation chez Djiby Lo venu spécialement pour le poisson grillé. «Cette dame est exceptionnelle. À Soumbedioune, il n’y en a pas deux comme elle. Elle prépare très bien le poisson.»
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Entre une mer de plus en plus avare et une demande toujours forte, Soumbedioune illustre les fragilités de la pêche artisanale sénégalaise. Un équilibre précaire, où pêcheurs, restaurateurs et consommateurs espèrent tous que la mer redeviendra, un jour, aussi généreuse qu’autrefois.




