Guinée. «Nous vivons sous embargo»: à Kolissokho Sokoto, l’unique station essence est à l’arrêt

Du gasoil de contrebande vendu sur les bords des routes.

Le 12/06/2025 à 11h28

VidéoÀ Kolissokho Sokoto, dans la région minière de Boké, la fermeture de la seule station-service met à sec toute une région déjà enclavée. Faute de carburant, les activités économiques tournent au ralenti, les prix explosent.

À l’entrée de Kolissokho Sokoto, une station de carburant et puis, plus rien silence. Aucune activité. Des pompes rouillées, et figées. Ici, sur la route nationale numéro 3, à près de 350 km de Conakry, tout tourne au ralenti.

Cette localité minière fût une cité dynamique à une certaine époque. Mais depuis le décès du propriétaire de la station, plus rien ne bouge. Les pompes sont à l’arrêt depuis plusieurs mois, laissant place au marché noir, déplore Ibrahima Sory Camara, chauffeur.

«Seul l’État peut relancer la distribution de carburant dans les stations, car c’est une activité vitale. Aujourd’hui, sincèrement, les populations souffrent. Depuis l’arrêt de cette station, rien ne marche malgré les nombreuses demandes émanant des paysans, chauffeurs... tous travaillent avec du carburant».

Et ce carburant, devenu denrée rare, se négocie à des prix exorbitants, regrette Alseny Sylla. «Nous sommes fréquemment confrontés à des crises du carburant. Nous vivons un blocus. Ici, c’est une zone minière, c’est ce qui aide un peu les habitants. Le gasoil est souvent disponible au marché noir, mais c’est l’essence le problème. Voilà pourquoi nous espérons voir la station reprendre du service qui vend le litre à 12.000 francs guinéens alors qu’au marché noir la même quantité est cédée entre 13.000 et 15.000».

Les conséquences vont bien au-delà des seules activités économiques. La mobilité, elle aussi, est fortement impactée. Ibrahima Sory Camara, chauffeur, en témoigne. «Pour trouver une station fonctionnelle, il nous faut aller souvent jusqu’à Kolaboungni, à plus de 20 km. Conséquence, le prix du transport connaît une forte hausse. Pour faire près de 60 km jusqu’à Boké, il faut payer au minimum 30.000 francs guinéens et il faut prévoir le double pour pouvoir rallier la capitale Conakry. C’est vraiment compliqué».

À Kolissokho Sokoto, l’espoir repose sur un éventuel sursaut des autorités pour redonner vie à cette station, symbole d’un service public vital. En attendant, le carburant coule au compte-gouttes, mais la colère, elle, est lisible sur chaque visage.

Par Mamadou Mouctar Souaré (Conakry, correspondance)
Le 12/06/2025 à 11h28