«Les programmes sont en inadéquation avec les réalités nationales, les enjeux du numérique et les besoins de l’économie nationale. À cela s’ajoutent le phénomène de la déperdition scolaire, le manque d’infrastructures et le déficit d’enseignants face à des effectifs d’élèves sans cesse croissants» avait noté le président Bassirou Diomaye Faye qui a demandé, en juin 2024, au gouvernement d’engager une évaluation du système éducatif.
Ces recommandations ont été suivies par la première analyse du secteur de l’éducation du Sénégal, en collaboration avec l’Unicef et l’Unesco, et qui fournit un diagnostique complet du système éducatif.
Intitulé «Le prix de l’inaction», ce rapport présenté le 4 juin à Dakar, alerte que «d’ici à 2030, les coûts fiscaux et sociaux de l’insuffisance des compétences de base des enfants sénégalais s’élèveront à 5 milliards de dollars, soit 17% du PIB».
Le gouvernement a en conséquence annoncé des réformes parmi lesquelles la suppression de l’examen d’entrée en sixième et l’introduction des technologies dès l’école élémentaire.
Parmi les mesures phares figure la suppression de l’examen d’entrée en sixième. Une mesure saluée par certains professionnels dont Abdou Gaye, enseignant dans une école de Dakar qui considère la suppression de l’examen d’entrée en sixième comme une avancée positive. Cet examen ne sert qu’à «sacrifier» les élèves en les soumettant à des compositions supplémentaires, alors que le Certificat de Fin d’Études Élémentaires (CFEE) reste le diplôme officiel. «La suppression de l’entrée en sixième est une bonne chose parce que ça ne mène à rien sinon les sacrifier, avec des compositions et des essais, sans parler du CFEE qui est le diplôme officiel», explique-t-il.
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Cette réforme vise à alléger le parcours scolaire des élèves et à réduire la redondance des évaluations.
Cependant, cette décision ne fait pas l’unanimité. Yoro Diallo, parent d’élève, exprime ses préoccupations quant aux motivations des autorités. Il appelle à une évaluation approfondie des avantages et des inconvénients de cette réforme. «Je ne comprends pas les motivations des autorités. Il faut bien peser le pour et le contre parce qu’il y va de l’avenir des enfants», déclare-t-il.
Pour lui, il est essentiel que les réformes éducatives soient le fruit d’une concertation inclusive, impliquant tous les acteurs concernés.
Par ailleurs, le gouvernement a annoncé l’intégration des technologies émergentes, notamment l’intelligence artificielle, dans les curricula scolaires dès l’école élémentaire. Cette mesure vise à préparer les jeunes Sénégalais aux défis de demain et à renforcer leurs compétences dans un monde en constante évolution.
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Globalement, la digitalisation de l’enseignement est saluée par tous. Abdou Gaye s’en réjouit, soulignant l’importance de familiariser les enfants avec les nouvelles technologies dès le primaire. «La digitalisation de l’enseignement est une bonne chose dès le primaire parce que cela permet aux enfants de se familiariser avec les nouvelles technologies dès le primaire», affirme-t-il.
Les réformes annoncées par le Premier ministre Ousmane Sonko témoignent d’une volonté de transformation en profondeur du système éducatif sénégalais. Elles visent à le rendre plus inclusif, moderne et adapté aux réalités du 21e siècle.
Cependant, leur succès dépendra de leur mise en œuvre effective et de l’adhésion de tous les acteurs concernés, car les défis restent énormes: «Près de 38% des enfants de 6 à 16 ans ne sont pas scolarisés, un phénomène particulièrement prononcé dans les zones rurales et certaines régions de l’intérieur du pays. Le taux d’achèvement du primaire est stable depuis plus de 10 ans et le système éducatif est confronté à des inégalités d’accès, notamment pour les enfants en situation de handicap» alerte le diagnostique présenté à Dakar.