Les rideaux sont tombés sur les Mondiaux d’athlétisme qui se sont déroulés du 13 au 21 septembre à Tokyo, au Japon. Un seul record du monde a été battu par le perchiste suédois Armand Duplantis qui a franchi la barre des 6,30, améliorant son record pour la 14e fois. Neuf records des Championnats du monde ont été battus et 22 meilleures performances mondiales de l’année ont été établies.
Lors de cette 20e édition des Mondiaux d’athlétisme, 51 pays dont huit africains ont glané des médailles. Sans surprise, ce sont les Américains qui se hissent au premier rang mondial en nombre de médailles: 26 dont 16 en or, loin devant leurs poursuivants.
L’Afrique a gagné 23 médailles (contre 26 en 2023) par les athlètes de huit pays dont dix en or, sept en argent et six en bronze.
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Cependant, il faut tempérer les exploits du continent: seuls deux pays ont brillé. En revanche, l’Ethiopie, l’Ouganda, le Maroc et le Nigeria, qui avaient l’habitude de se distinguer de belle manière, ont déçu.
L’Ethiopie a gagné deux médailles en argent et autant en bronze. Le Maroc, le Nigeria et l’Algérie ont obtenu chacun une seule médaille en argent. L’Afrique du Sud n’a obtenu qu’une médaille de bronze. L’Ouganda est revenue bredouille.
Ainsi donc, hormis le Kenya et le Botswana, la moisson de médailles du continent africain est bien maigre. Plus inquiétant encore, l’Afrique s’est fait distancer dans des disciplines dont elle détenait presque le monopole. C’est particulièrement le cas du 3000m steeple et du 10.000m.
Le Kenya 2e derrière les États-Unis
Le Kenya a été la grande satisfaction africaine. Le pays des hauts plateaux a concrétisé sa domination sur le demi-fond mondial. Avec onze médailles, le Kenya est le seul pays, après les Etats-Unis, à avoir dépassé la barre des dix titres et devance le Canada, 3e de la compétition qui remporté cinq médailles dont trois en or.
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Avec sept médailles d’or, le Kenya a plus que doublé sa moisson de la précédente édition et a égalé sa performance signée lors des Mondiaux de 2015 à Pékin, en Chine, lorsqu’il avait occupé le tête du tableau des médailles devant la Jamaïque et les États-Unis. Le Kenya doit à sa domination du demi-fond.
Il faut dire que les stars de l’athlétisme kenyan n’ont pas déçu. A noter que six des sept médailles d’or du pays ont été rapportées par des Kenyanes. Chez les hommes, c’est la déception, à l’exception d’Emmanuel Wanyonyi.
En effet, Beatrice Chebet a ramené deux médailles d’or en réalisant le doublé du 5000m (14min 54sec 36) et du 10000m femme, le premier doublé sur les deux disciplines depuis 2011. La championne olympique et recordwomen du 5000m confirme sa domination sur ces distances. Sur le 5000m, les kenyanes ont réalisé le doublé, Faith Kipyegon ayant pris la seconde place sur cette distance.
Sur le 3000m steeple, si les Kenyans ont été dépossédés du titre depuis quelques années, le Kenya a ramené le «joyau» au pays grâce à une femme, Faith Cherotich qui a décroché son premier titre mondial, en surprenant à la dernière rivière l’athlète bahreïnie d’origine kenyane, spécialiste du 3000m steeple, championne du monde en 2023 à Budapeste et championne olympique à Paris en 2024.
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Sur le 1500m, Faith Kipyegon a décroché son 4e titre de championne du monde du 1500m (elle compte aussi un titre mondial sur le 5000m) asseyant un peu plus son hégémonie sur le demi-fond. Détentrice du record du monde de la distance et triple championne olympique, elle a mené sa course d’une main de maitre, du début à la fin, devançant sa compatriote Dorcus Ewoi et l’Australienne Jessica Hull.
Championnats du monde d'athlétisme: 8 pays africains ont remporté 23 médailles (contre 26 en 2023) dont 10 en or, 7 en argent et 6 en bronze. Le Kenya a lui seul remporté 11 médailles dont 7 en or, 2 en Argent et 2 en Bronze.
Pour sa part, Emmanuel Wanyonyi, grand favori de la distance, a été sacré champion du monde devant l’Algérien Djamel Sedjati et l’italien Marco Arop dans la finale du 800m masculin la plus rapide de l’histoire, avec 6 athlètes en dessous du record des Mondiaux. Le jeune homme de 21 ans, champion olympique en titre, n’a laissé aucune chance à ses rivaux en prenant les commandes de la course et bouclé les deux tours en 1mn 41sec 86, réalisant ainsi le record des Mondiaux.
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Sa compatriote Lilian Odira l’a imité sur la même distance en remportant le 800m féminin, créant la surprise en s’imposant en 1mn 54sec 62, établissant elle aussi un nouveau record des Championnats du monde. L’Athlète de 26 ans, qui n’avait pas couru entre 2019 et 2023 et qui a été éliminée en demi-finale aux Jeux olympiques de Paris-2024, a remporté la course devant la favorite, la Britannique Keely Hodgkinson qui a signé en août dernier la meilleure performance mondiale de l’année. Cette médaille, très peu attendue, a été particulièrement célébrée par la délégation kenyane.
Et enfin, Peres Jepchirchir, la marathonienne kenyane de 31 ans, a remporté le marathon féminin en 2h 24min 43 sec, devant l’Éthiopienne Tigst Assefa lors d’un duel âprement disputé.
Si le Kenya a remporté sept titres mondiaux, ce n’est pas vraiment une surprise pour un pays qui a occupé la première place des Mondiaux il y a de cela dix ans et dont les athlètes animent les courses des différents meetings mondiaux. Le pays est toutefois saigné par la «fuite des muscles» qui alimente en athlètes les pays du Golfe et les Européens (Turquie, Pays-Bas,…).
400 m et 4x400 (h): le Botswana a dompté les Etats-Unis
Si le Kenya ne fait que confirmer son rang de pays de grands athlètes dominateurs des courses de fond, le Botswana se distingue sur les courses à courte distance.
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Si la star du pays du 100 m, Letsile Tebago, champion olympique du 200m aux Jeux de Paris en août 2024, a déçu, ses compatriotes sur cette distance, les athlètes botswanais ont créé la surprise sur le 400m et le 400x4, des disciplines largement dominées, depuis des décennies, par les États-Unis.
Sur le 400m, ce sont deux Botswanais qui sont montés sur le podium. Busang Collen Kebinatshipi a décroché l’or en 43sec53, réalisant la meilleure performance de l’année, et son compatriote Bayapo Ndori s’est adjugé la médaille de bronze. C’est la deuxième fois de l’histoire de la compétition que les États-Unis ne placent aucun de leurs représentants sur cette distance.
Après ce succès, les Botswanais ont remporté, sans surprise, après avoir placé trois finalistes à la finale du 400m, le relais 4x400m hommes grâce à un formidable finish de Busang Colen.
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Kebinatshipi a coiffé l’Américain Rai Benjamin sur la ligne. Le relais botswanais a été complété par la star du pays, Letsile Tebogo, spécialiste du 100 et 200m, champion olympique du 100m à Paris. Disqualifié pour faux départ en finale du 100m et 4e du 200m lors de ces Mondiaux, la star du pays a décroché sa première médaille de ces Mondiaux.
Les Botswanais ont bouclé les quatre tours de piste en 2mn57seco76, devant les Américains, triple champions du monde en titre (2 :57 :83) et les Sud-Africains.
Avec un total de trois médailles dont deux en or et une en bronze, le Botswana fait partie du Top 10 des pays les plus médaillés en se classant au 5e rang mondial.
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Hormis le Kenya et le Botswana, la Tanzanie aussi a engrangé une médaille d’or grâce à Alphonce Felix Simbu qui a remporté le marathon en 2h09 mn 48sec à la photo finish, suite à une accélération éclair dans les 60 derniers mètres.
Avec ces Mondiaux, l’Afrique a perdu certes sa couronne sur le 3000 steeple, discipline pour laquelle seuls les Marocains étaient parvenus à rompre la domination des Kenyans.
Seulement, pour ces Mondiaux, si le Marocain Soufiane el-Bakkali était le grand favori de la distance après avoir dompté les Kenyans, il a trop surveillé ses rivaux des hauts plateaux et s’est fait surprendre par le Néo-Zélandais Geordie Beamish dans les tous derniers instants de la course, anéantissant l’espoir de la seule médaille d’or à la portée du Maroc.
En 2023, lors de la précédente édition, les trois médailles étaient revenues aux Africains: Soufiane el-Bekkali (Maroc), Lamecha Girma (Ethiopie) et Abraham Kibiwot (Kenya).
Mondiaux d’athlétisme 2025: Voici le tableau des médailles des pays africains
Rang Afrique | Pays | Rang mondial | Or | Argent | Bronze | Total des médailles |
---|---|---|---|---|---|---|
1er | Kenya | 2e | 7 | 2 | 2 | 11 |
2e | Botswana | 5e | 2 | 0 | 1 | 3 |
3e | Tanzanie | 19e | 1 | 0 | 0 | 1 |
4e | Ethiopie | 22e | 0 | 2 | 2 | 4 |
5e | Algérie | 27e | 0 | 1 | 0 | 1 |
6e | Maroc | 27e | 0 | 1 | 0 | 1 |
7e | Nigeria | 27e | 0 | 1 | 0 | 1 |
8e | Afrique du Sud | 40e | 0 | 0 | 1 | 1 |
Ce n’est pas seulement le 3000 m steeple que l’Afrique a perdu mais le 5000m et le 10.000m aussi. Kenyans, Ethiopiens, Marocains, Ougandais… qui brillaient sur ces distances se sont inclinés. Chose inimaginable, au départ de la finale du 5000m, on ne comptait que trois Africains !
Or, lors des précédentes éditions, pour ces deux disciplines, ce sont les armadas kenyanes, ougandaises, éthiopiennes et marocaines qui se battaient pour la médaille d’or laquelle revenait presque toujours à l’un d’eux. En 2023, c’est l’Ougandais Joshua Cheptegei qui avait remporté l’or du 10.000m, devant Daniel Ebenyo (Kenya) et Selemon Barega (Ethiopie).
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Seulement, si l’Afrique a perdu des disciplines sur lesquelles elle avait assis sa domination, le continent est parvenu à en conquérir d’autres. L’Afrique, grâce au Botswana, est devenue la reine du tour de piste. Avec trois finalistes du 400m homme, ce petit pays est désormais un concurrent des Américains qui sont les dépositaires de cette discipline. En remportant, aussi bien le 400m que le 4x400m, les Botswanais s’affichent désormais comme les concurrents directs des Américains, sur le tour de piste.
Une situation qui montre la poursuite de la démocratisation des différentes disciplines de l’athlétisme. La victoire de l’ancien footballeur français Jimmy Gressier sur le 10.000m et sa médaille de bronze sur le 5000m, illustre cette nouvelle donne sur les courses de toutes les distances. Une tendance qui devrait se confirmer lors des 21e Championnats du monde d’athlétisme qui se dérouleront en 2027 à Pékin, en Chine.