C'est un pays qui en a vécu des moments difficiles, mais l'Algérie s'apprête à traverser, si elle ne le fait pas déjà, une période de grandes catastrophes socio-économiques.
Il y a d'abord la pandémie, dont les nouvelles ne sont pas bonnes et pour laquelle les experts attendent le pire. Depuis le 12 mars, date du premier décès, jusqu'à ce samedi 11 avril, l'Algérie compte 256 morts, ce qui en fait le pays d'Afrique du nord le plus durement touché par la pandémie. C'est nettement plus que l'Egypte et le Maroc réunis, qui ont respectivement 135 et 110 décès depuis le début de l'épidémie.
On attendait que l'impact soit plus sévère pour ces deux pays d'Afrique du nord qui reçoivent plus de 10 millions de touristes chaque année et qui étaient donc beaucoup plus exposés. Mais, visiblement l'Egypte avec ses 100 millions d'habitants s'en tire mieux, même si elle compte un peu plus de cas. Le Maroc aussi, pour le moment, a une position plus enviable que son voisin.
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Les experts pensent que le pire est à venir. Le docteur Aziz Ghedia, médecin algérien, tire la sonnette d'alarme depuis quelque temps, estimant que les autorités sous-estiment le nombre de personnes infectées faute d'avoir des kits de tests suffisants. On devine alors que seuls les patients qui sont gravement malades qui se présentent à l'hôpital et qui figurent dans les statistiques. Le risque de les voir être emportés par la maladie est donc plus grand. Ce qui correspond à un taux de mortalité plus élevé qu'il n'aurait dû être.
En effet, d'après les chiffres communiqués, ce taux de mortalité est de 14,54%, loin devant l'Italité avec ses 12,77% de décès, ou de l'Espagne (10,16%) ou encore de la France (10,56%). Il ne reste alors qu'à souhaiter que le niveau de contamination de l'ensemble de la population reste bas. Sinon, les morts pourraient malheureusement se compter par milliers, voire dizaines de milliers. Le corps médical est également en train de payer un lourd tribut: quatre de ses membres ont déjà péri, faisant détenir à l'Algérie un triste record sur le continent.
Pour le moment, la gestion de la pandémie laisse beaucoup à désirer. Contrairement à ses voisins, l'Algérie a tardé à prendre les mesures adéquates pour protéger sa population. Seul un confinement partiel d'Alger et de Blida a été décidé, là où le Maroc et la Tunisie ont opté pour le confinement total de l'ensemble du pays. Tunis a même décidé un couvre-feu de 18h à 6h du matin, alors qu'au Maroc, les commerces sont fermés à partir de 18h, ce qui réduit davantage les mouvements des rares personnes autorisées à sortir.
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L'Algérie aurait dû aller vers de telles solutions dès les premiers cas enregistrés à Blida à partir du 25 février. Cela lui aurait fait gagner un précieux temps qu'il est aujourd'hui impossible de rattraper.
Sur le plan économique, les nouvelles ne sont pas bonnes pour les pays pétroliers qui n'ont pas réussi à trouver un accord cette fin de semaine, dans le cadre du dialogue entre le cartel des 13 Etats de l'Organisation des pays producteurs de pétrole (OPEP) et les 10 non-membres. Les espoirs de beaucoup d'entre eux sont anéantis. Le cours du baril risque de rester encore longtemps autour de 30 dollars, voire en-deçà.
Ce sera alors une période de vaches maigres pour les producteurs. L'Algérie avait tablé sur un baril de Brent autour de 60 dollars pour espérer limiter son déficit budgétaire autour de 12,5 milliards de dollars. La question qui se pose est de savoir jusqu'où ira le déséquilibre des ressources par rapport aux dépenses publiques.
Le gouvernement a d'ores et déjà annoncé une diète budgétaire, portant sur plus de 30% des dépenses de fonctionnement. Il devrait néanmoins faire une croix sur l'essentiel des recettes budgétaires qui étaient prévues, en décembre dernier, autour de 6200 milliards de dinars, soit près de 49 milliards de dollars. Dans les conditions actuelles, ce serait une prouesse d'en recevoir la moitié.
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Par ailleurs, les transferts sociaux liés notamment aux retraites qui avoisinent 1800 milliards de dinars, soit 14,2 milliards de dollars, vont poser une équation insolvable au gouvernement algérien.
Cette année, l'Algérie va sûrement oublier les dépenses d'équipement qui étaient prévues pour baisser, dans la loi de finances initiale, de 39,7%. Désormais, il faudra penser blé, lait, sucre et médicaments.
Les prix actuels du pétrole vont également accélérer l'épuisement des réserves de change. Au début de l'année, la Banque centrale d'Algérie évaluait à 62 milliards de dollars le matelas financier en devises du pays, couvrant un peu plus d'une année d'importation. Mais, avec le changement du contexte, le pays sera à court d'argent bien avant ces délais, puisque tout est devenu beaucoup plus cher.