Le gouvernement algérien reconnaît enfin que la situation économique est critique. Elle est même qualifiée de «préoccupante» par les autorités. Il faut dire que le tableau est sombre.
D'ailleurs, une lecture des principaux indicateurs économiques en donne une idée. Les finances publiques sont de plus en plus mal-en-point depuis 2014. Le déficit commercial est de près de 18 milliards de dollars en 2016, malgré toutes les restrictions entreprises par le gouvernement, dont les interdictions et les quotas d’importation. Le déficit de la balance des paiements ne cesse lui aussi de s’aggraver. Les 71 milliards de dollars du Fonds de régulation des recettes ont totalement été épuisés en cinq ans. Les réserves en devises, restent certes importantes encore, mais elles fondent d’année en année (de 193 milliards de dollars en 2014 à 105 milliards de dollars en juillet 2017). Quant au déficit budgétaire structurel abyssal, il s’aggrave avec la chute de la fiscalité pétrolière.
La situation est intenable. Pour preuve, le Fonds de régulation des recettes (FRR) qui culminait à 7.912 milliards de dinars, soit 72 milliards de dollars en 2012, lorsque le baril de pétrole était à son plus haut niveau, ne contient plus un rond depuis février dernier. Or, c’est grâce à celui-ci que l’Etat algérien achetait la paix sociale à coups de subventions de toutes sortes (carburants, électricité, produits alimentaires de base, etc.) et supportait des projets d’investissements en infrastructures.
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Conséquence, après l’austérité proclamée par le gouvernement Sellal, avec l’arrêt des chantiers d’infrastructures et de BTP, qui n’a fait qu’aggraver la crise et le nombre de chômeurs, aujourd’hui, l’Etat des finances publiques est tel qu’il est impossible de poursuivre cette politique d’achat de la paix sociale par les subventions. Les caisses de l’Etat étant vides, malgré le tournant de la loi de finances de 2017 avec la hausse de certaines taxes et la revalorisation des prix des carburants, l’Etat était appelé à trouver une solution.
La première parade a été le droit de s’octroyer un moyen de financement «illimité» avec le recours de la planche à billets. Seulement, qui dit planche à billets, dit aussi dépréciation de la valeur de la monnaie locale et par ricochet d’une inflation annoncée. Et c’est la population qui supportera ainsi indirectement le coût de cette politique avec la hausse du coût de la vie et l’appauvrissement des ménages.
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Cette politique n’étant pas une panacée, l’Etat algérien, face à l’amenuisement des avoirs extérieurs nécessaires pour assurer les importations des biens et services, à la faiblesse des recettes tirées des exportations des hydrocarbures et au creusement des déficits jumeaux demandera certainement d’autres sacrifices aux Algériens.
Ainsi, le projet de loi de finances 2018 risque d’apporter des changements importants au niveau des subventions. Déjà, depuis quelques semaines, les autorités essayent de faire passer certains messages concernant les subventions relatives à l’électricité. Ainsi, dans sa dernière sortie, le ministre de l’Energie, Mustapha Guitouni, a mis l’accent sur le gaspillage d’énergie résultant du coût bas de l’électricité. Alors que le coût de production du kilowatt/heure est de 11,43 dinars algériens, celui-ci est vendu au consommateur à seulement 4 dinars. L’Etat prenant en charge le différentiel de 7,43 dinars.
Du coup, à cause du gaspillage, avec une capacité électrique installée dépassant 14.000 MW, le pays n’arrive pas à satisfaire une demande croissante. De ce fait, depuis quelques jours, après les menaces du ministre visant les gros consommateurs, on se penche de plus en plus sur la hausse des tarifs d’électricité.
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La sortie de l’ex-président de la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG), Abdelaali Badache, qui souligne qu’une augmentation des tarifs de l’électricité et du gaz est «inévitable et nécessaire» dans la loi de finances 2018, sinon la Sonelgaz serait en péril, illustre la volonté des autorités à revenir sur certaines largesses de nature sociale. L’objectif non avoué est d'habituer le consommateur à payer le «prix réel» des prestations en matière énergétique. Ces augmentations pourraient aussi toucher bien d’autres produits encore comme l’eau, les carburants, etc. C’est dire que la mouture du projet de loi de finances 2018 en préparation risque d’être amère pour le consommateur.
Elle sera aussi un véritable casse-tête pour les dirigeants algériens qui devront tout faire afin de ne pas trop mécontenter les citoyens et éviter des émeutes, comme celles de l’année dernière.
Mais, ont-ils d’autres choix? Les solutions apportées jusqu’à présent, dont l’emprunt national et l’endettement auprès de la Banque africaine de développement (BAD), n’ont pas été très utiles, tellement le déficit est grand. Pour preuve, le déficit budgétaire sera encore important cette année et les difficultés devront persister pour 2018, reconnaissent les autorités algériennes, dans le sillage des institutions financières internationales.
Dans ces conditions, la question que tout le monde se pose est de savoir jusqu’à quand Alger sera capable de ne pas recourir à l’endettement extérieur? La réponse ne dépend pas seulement de la volonté du gouvernement mais surtout de l’évolution du cours du baril de pétrole. Autant dire qu’Alger a perdu la main.