International Crisis Group (ICG), ONG spécialisée dans la prévention et la résolution des conflits, alerte les autorités algériennes au sujet de la situation économique que traverse le pays. Ce lundi 19 novembre, le groupe de réflexion a émis une note alarmante, estimant que l'Algérie doit diversifiier au plus vite son économie mono-sectorielle, caractérisée par des recettes publiques dépendant à plus de 70% des hydrocarbures et de leur exportation, dont plus de 95% en sont liés.
Cette ONG, qui se trompe rarement sur ses prévisions, rappelle qu'entre 2014 et 2017, la chute effrénée des cours du pétrole a considérablement impacté la santé financière du pays et créé un déficit budgétaire abyssal.
Toujours selon les analystes d'ICG, le pays fait actuellement face à de nouvelles réalités financières qui n'autorisent plus les dépenses élevées qui ont prévalu entre 2005 et 2014. Malheureusement, le contexte économique est tel, qu'il est devenu difficile de mener les réformes de façon adéquate.
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“Malgré les promesses des gouvernements successifs de faire des réformes et de rééquilibrer les finances publiques, la paralysie politique a fait obstacle à toute mesure décisive”, s'inquiète ICG. De plus, la perspective d'une candidature à un cinquième mandat du président Bouteflika, en avril 2019, renforce la paralysie observée en ce qui concerne les réformes.
De plus, en dépit du “rétablissement du cours du pétrole, la crise économique pourrait frapper le pays dès 2019” et “se greffer aux tensions entourant la présidentielle”, avertit ICG dans sa note.
Pourtant, selon cette ONG , les autorités algériennes sont les premières à se rendre compte que le fameux modèle d'autarcie et du "tout-Etat" qu'ils ont tant défendu est aujourd'hui à bout de souffle.
Cette politique n'a mené l'Algérie qu'à sa perte, en trahissant la promesse de faire d'un pays immensément riche sur le plan géologique un véritable Eldorado.
Néanmoins, la recherche permanente d'une stabilité sociale et les pressions venant de "groupes d'intérêt influents" poussent les responsables algériens à reporter sans cesse la mise en oeuvre de réformes qu'ils savent obligatoires pour redresser l'économie.
En effet, le souvenri de la guerre civile des années 1990, dont l'origine était le mécontentement social de 1988 est encore vif, selon ICG. De plus, le pays n'a été stabilisé qu'en instaurant un système clientéliste, qui tend à se perpétuer et à garder les privilèges de certains au détriment de nécessaires réformes.
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Selon ICG, les coupes bugétaires et la "politique monétaire expansionniste, qui alimente l’inflation et permet seulement au gouvernement de gagner du temps sans s’attaquer aux problèmes de fond”, sont loin d'être suffisantes pour remettre la pays sur les rails.
Et d'ajputer: “à terme, l’Algérie ne pourra pas se contenter d’apporter de petits ajustements techniques à sa politique économique”. L'Etat devra, tôt ou tard, renégocier le "contrat social implicite" qui veut qu'il pourvoie aux besoins des ménages, tout en exigeant que l'Algérien moyen se taise et s'exécute.
Mais “toute renégociation doit être envisagée avec prudence”, a souligné l’ICG. Les moins de 30 ans (55% de la population selon les statistiques officielles) “entrent aujourd’hui sur le marché du travail avec de sombres perspectives et une capacité considérablement réduite de l’Etat à les soutenir”.
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Evidemment, l’Algérie peut toujours faire appel à l'endettement extérieur, puisque ses engagements étrangers sont inférieurs à 2% du PIB...
En outre, ICG demande aux autorités algériennes de se montrer beaucoup plus transparentes en ce qui concerne l'état des comptes publics et d'éviter de cacher ses difficultés économiques. L'ONG les incite enfini à davantage communiquer sur les réformes à mettre en oeuvre, tout en accordant plus de place "aux jeunes dans l'élaboration du programme de réformes". Basée à Bruxelles, International Crisis Group, ONG multinationale dont le sérieux ne peut être remis en doute, va-t-elle être entendue El Mouradia? L'avenir le dira...