En Algérie, 2019 sera avant tout une année électorale et Alger entend marquer cet important évènement de la vie politique du pays par une loi de finances extrêmement "sociale".
Le budget de fonctionnement a ainsi atteint le niveau record de 5000 milliards de dinars, en hausse de 8%.
Près de 1700 milliards de dinars devraient aller au soutien aux familles, à la santé, aux retraites, à l'habitat, etc. Sans compter 500 milliards supplémentaires pour boucher l'énorme trou des caisses de retraites, en plus de ce qui est prévu comme hausse des pensions dans le budget.
Bref, l'entourage d'Abdelaziz Bouteflika veut vraiment mettre la main à la poche, comme l'avait déjà fait le président algérien en 2011 lors du printemps arabe, et en 2014, quand il avait brigué un quatrième mandat. Les salaires dans la fonction publique avaient alors été augmentés et le dispositif de subvention des biens de consommation, renforcé.
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Face à un baril de pétrole dont le cours culminait, à cette époque, à 80 dollars, c'était bien envisageable. En effet, le projet de Loi de finances a été élaboré durant l'été et le Brent de la Mer du Nord avait été sur sa phase ascendante avec un cours qui est passé de 71 à 81 dollars entre la mi-juillet et le 21 septembre dernier, sans montrer aucun signe d'essouflement. Donc, quand les techniciens du ministère des Finances avaient projeté, à cette période, un maintien des recettes à un niveau comparable à celui de 2018, et une hausse des dépenses, sur la base d'un baril de 50 dollars, leur prévision était encore très crédible.
Mais voilà: depuis début octobre dernier, ces prévisions le sont de moins en moins. En effet, il faut savoir que le budget 2018 n'a pas répondu aux attentes en termes de recette, même si les cours des hydrocarbures ont été à leur plus haut niveau sur les quatre dernières années. En juin 2018, il a fallu adopter une loi de finances rectificative, pour combler un trou dans le budget de l'Etat de l'ordre de 500 milliards de dinars.
Or aujourd'hui, les cours du pétrole sont à leur plus bas niveau. Hier jeudi, le Brent a clôturé à 62,83 dollars seulement, se maintenant dans une pente baissière. C'est dire que le gouvernement algérien sait pertinemment que sa loi de finances 2019 ne tient pas du tout la route, du fait, justement, de cette chute des cours du brut. En effet, tout en étant excessivement dépensière, elle demeure identique à tout point dans sa partie recette à celle de 2018, qui avait pourtant nécessité, rappelons-le, cette rallonge de 500 milliards de dinars.
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Peut-on, pour autant, espérer un redressement des cours à court ou moyen terme? Il est difficile de l'envisager, parce qu'on s'achemine vers un scénario identique à 2015 et 2016 où les producteurs américains de gaz de schistes ne veulent plus s'en laisser conter.
C'est ce qui explique d'ores et déjà que les réserves stratégiques des Etats-Unis sont à leur plus haut niveau depuis longtemps. De plus, l'Arabie Saoudite, empêtrée dans le scandale du meurtre de Jamal Khashoggi, a perdu momentanément de son influence et ne joue plus tout à fait son rôle de faiseur de marché. Les Russes, eux, sont occupés à écouler la production faite pour anticiper sur des sanctions contre l'Iran, moins sévères qu'annoncées.
C'est dire que Bouteflika et son entourage risquent de se rendre à l'évidence que cette année électorale sera bien différente de 2014, mais aussi de la période du printemps arabe.
Et c'est bel et bien les poches vides qu'ils devront affronter la grogne sociale, malgré toutes les promesses contenues dans l'actuelle loi de finances, actuellement en phase d'être adoptée par la chambre basse du Parlement.