C'est bien connu, «quand le bâtiment va, tout va». Ce vieil adage colle malheureusement, mais a contrario, à l’Algérie, pays dans lequel le secteur du bâtiment et des travaux public se trouve dans une situation catastrophique, signe patent de la crise profonde que traverse l’économie algérienne.
En effet, ce secteur, pilier de l’économie algérienne, juste derrière les hydrocarbures, est tout simplement menacé de faillite.
L’Association générale des entrepreneurs algériens (AGEA) a ainsi tiré la sonnette d’alarme, dans un communiqué publié le mercredi 29 août. Il faut dire que la situation est critique, et que tous les indicateurs du secteur sont au rouge.
A titre d’exemple, l’industrie de fabrication des matériaux de construction accuse une baisse de production comprise entre 70 à 80%. Une situation qui s’explique essentiellement par l’arrêt de la majeure partie des chantiers importants du pays.
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Outre la crise financière, cette situation s’explique aussi, et surtout, par l’emprisonnement des oligarques proches de l’ancien régime de Bouteflika, s'étaient s’accaparés la majorité des marchés publics.
Leur emprisonnement, et l’arrêt des prêts et financement publics, ont provoqué le quasi -arrêt du secteur du BTP et la faillite de nombreuses petites entreprises, notamment les très petites et moyennes entreprises spécialisées dans le bâtiment qui gravitaient autour de ces grandes entreprises.
Ainsi, selon l’AGEA, pour le secteur du Bâtiment, des Travaux publics et de l’hydraulique (BTPH), les opérateurs annoncent que ce sont 36.500 entreprises qui se trouvent actuellement en voie de disparition. Et en conséquence, ce sont donc au moins 175. 000 ouvriers du BTPH qui risquent de grossier le nombre des chômeurs.
Cette situation critique a déjà contraint plus de 400 entreprises du secteur du BTP à se déclarer en faillite.
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Face à cette situation alarmante, l’AGEA appelle à un dialogue national sur la situation économique préocupante que traverse le pays.
En mai dernier, Nabil Hedjari, vice-président de l'Association nationale des sociétés algériennes (ANSA) annonçait que des dizaine de milliers de PMA artisanales pourraient licencier jusqu'à 1 million de personnes.
En juin dernier, l’AGEA avait interpellé le Premier ministre algérien, Noureddine Bedoui, sur cette situation alarmante que traverse le secteur, suite à la fermeture de 3.200 entreprises et la perte de près de 265. 000 emplois depuis décembre 2018, soit en l'espace de 6 mois.
Ces fermetures en séries s’expliquent, entre autres, par les énormes impayés des entreprises, l’absence de soutien de l’Etat face à la crise économique, les difficultés d’accès au financement, des mesures bureaucratiques prises par les banques et leur méfiance accrue dans l’octroi de crédits aux entreprises.
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Un moratoire sur le paiement d'impôts et l'arrêt des versements de cotisations sociales, prônés par l'ancien Premier ministre Abdelmalek Sellal en tant que remèdes, sont en fait insuffisants face à l'ampleur de cette crise.
La situation du secteur du BTPH illustre bien le profond malaise économique que traverse l’Algérie, un malaise qui risque de s’aggraver si des mesures fortes et efficaces ne sont pas prises pour remédier à cette crise multidimensionnnelle.
Toutefois, avec l’entêtement des dirigeants actuels, il est fort probable que la situation que traverse le secteur s’aggrave dans les semaines et les mois à venir.
A moins que la rentrée sociale, qui s’annonce tendue, fasse réfléchir (et légèrement fléchir) le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense et chef d’état-major de l’armée algérienne, et surtout véritable homme fort du pays.