Pétrole: un tweet de Trump, et le prix du baril bondit de +21%, une première depuis sa cotation sur les marchés

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Le 03/04/2020 à 09h38, mis à jour le 04/04/2020 à 13h01

Le cours du baril de pétrole a enregistré un bond de 21%, jeudi 2 avril, après un tweet du président américain, inquiet du prix bas sur la production américaine, dont certains producteurs ont fait faillite. Une bonne nouvelle pour les pays pétroliers africains, aux coûts de production élevés.

Le cours du baril de pétrole a enregistré, à hier, jeudi 2 avril, une forte hausse, au lendemain d'un discours du président américain Donald Trump, qui a multiplié les initiatives ces derniers jours pour inverser la tendance baissière du baril de Brent de la mer du Nord, qui s’approchait dangereusement des 20 dollars.

«Je pense qu’ils {la Russie et l'Arabie Saoudite} vont régler cela dans les prochains jours (…). Elles savent toutes deux ce qu’elles doivent faire», a-t-il souligné, au cours d’une conférence de presse à la Maison Blanche, mercredi dernier, 1er avril 2020 en soirée, après avoir posté des tweets.

Le président américain a même dit s’attendre à un accord «imminent» entre Moscou et Riyad sur la production de brut.

Il n’en a pas plus suffi pour tirer les cours du baril de Brent vers le bas.

Au cours de la journée d'hier, jeudi 2 avril, le cours du baril de Brent de la mer du Nord, pour livraison en juin, a bondi de 21% (à +5,2 dollars) s'établissant à 29,94 dollars, et le WTI américain a pris 25% (à +5,1 dollars), s'établissant à 25,32 dollars.

Il s’agit de la plus forte hausse, en termes de pourcentages, sur une séance, dans l’histoire des références du cours de l’or noir.

Mieux encore, en cours de cette séance, le baril de Brent a même frôlé une hausse de l'ordre de 50%.

Ces hausses sont intervenues alors même que les stocks américains de brut sont actuellement à leur plus haut niveau avec 13,8 millions de barils.

L’implication de Donald Trump pour réorienter les cours du baril vers le haut n’est pas fortuite. Il a d’ailleurs souligné que «dans le monde entier, l’industrie pétrolière a été ravagée», et annoncé son souhait que l’industrie pétrolière mondiale redevienne «comme elle était auparavant».

Avec cette intervention auprès des deux premiers exportateurs de pétrole au monde, l'Arabie Saoudite et la Russie, le président américain souhaite avant tout sauver l’industrie pétrolière américaine, à quelques mois d’une élection présidentielle loin d’être gagnée pour le camp des Républicains, surtout avec sa gestion, pour l'heure chaotique, de la crise du coronavirus.

En effet, avec un baril de pétrole proche des 20 dollars, peu de pays pouvaient produire du pétrole de manière rentable. Bien des pays producteurs de pétrole avaient évolué, ces derniers temps, autour de leur seuil de rentabilité (profit net zéro).

En effet, selon l’Agence d'information sur l'énergie (AIE), le coût d’extraction du baril de pétrole se situe aux Etats-Unis entre 10 et 30 dollars, et beaucoup plus chez les producteurs de pétrole de schiste, contre 5 à 8 dollars pour les Saoudiens et les Irakiens, 15 à 20 dollars pour les Russes.

En conséquence, beaucoup de producteurs de pétrole américains, hormis les majors, s'étaient retrouvés dans une situation intenable.

D’ailleurs, certains d'entre eux venaient de déclarer faillite, tel le groupe Whiting Petroleum Corporation, spécialisé dans la production de pétrole de schiste dans le Dakota du Nord et dans l'ouest du Colorado, qui venait de déclarer faillite le jour même de la déclaration de Donald Trump à Washington, le mercredi 1er avril.

Le président américain avait, au cours de cette conférence de presse, invoqué un article de la législation américaine à propos des mises en faillites, qui permettent à ceux qui se retrouvent dans cette situation, de se restructurer à l’abri de leurs créanciers.

Et si le baril de pétrole n'était pas remonté après les annonces du président américain, les déclarations de faillite auraient pu alors concerner, cette fois-ci, les petits producteurs de pétrole américains, qui auraient pu suivre ce groupe initial. 

Ce coup de pouce de Donald Trump au cours du baril est bien apprécié par les pays producteurs de pétrole africains (dont le Nigeria, l'Angola, l'Algérie, la Libye, le Gabon, la Guinée Equatoriale ou encore le Congo), très impactés par la baisse de la demande mondiale et par un cours du baril exceptionnellement bas, qui ne permettait plus à certains d’exploiter de manière rentable leur pétrole.

C’est le cas du premier producteur de pétrole africain, le Nigeria, dont le coût de production se situe autour de 30 dollars, mais c'est aussi le cas de l'ensemble des producteurs de pétrole d'Afrique (hors Maghreb). 

Globalement, tous les pays producteurs de pétrole africains ont tablé, lors de leurs calculs prévisionnels pour leur élaboration du budget de l'Etat pour l'exercice 2020, sur un cours du baril compris entre 50 et 55 dollars, donc très loin des 25 dollars de son cours actuel.

Certains pays producteurs,comme le Nigeria et l’Algérie, ont donc été contraints, suite à cette crise sanitaire mondiale du coronavirus, de faire des coupes conséquentes sur les dépenses qu'ils avaient programmées.

Dans ces moments très difficiles pour les producteurs de pétroles africains, très impactés par les effets du Covid-19 et par la faiblesse de la demande mondiale en or noir, cette hausse des cours du brut, enregistrée hier, donne un petit espoir d'amélioration dans la gestion des finances publiques des pays producteurs, et d'une atténuation des effets de la crise sur leur activité économique. 

Par Moussa Diop
Le 03/04/2020 à 09h38, mis à jour le 04/04/2020 à 13h01