Algérie: Bouteflika «parle» enfin de son 5e mandat et «attaque» durement ceux qui y s’opposent

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Le 29/11/2018 à 13h18, mis à jour le 29/11/2018 à 13h47

Abdelaziz Bouteflika sort enfin de son silence. Le président algérien s'est exprimé sur un éventuel 5e mandat à la tête de son pays, à travers un message ferme, et des mots très durs à l’encontre de ceux qui doutent ou qui s’opposent à sa candidature. Un message où tout est dit (ou presque).

Jusqu’à présent, le président Bouteflika n’avait pipé mot sur un éventuel 5e mandat à la tête de l’Algérie. Il avait laissé le soin à ses proches, tout particulièrement à l’ancien Secrétaire général du FLN, de communiquer à sa place. Ce dernier en avait apparemment un peu trop fait et à fini par être débarqué de son poste, sans ménagement.

Désormais, le président lui-même semble vouloir prendre les devants et parle même en son nom.

Ainsi, hier, mercredi 28 novembre, le président Bouteflika a annoncé son intention de briguer un cinquième mandat. Il l’a fait dans un message lu en son nom à l’occasion de l’ouverture d'une rencontre entre les walis et le gouvernement.

Annonçant la couleur, le président Bouteflika s’est d’emblée attaqué à ceux qui guettent l’Algérie à l’approche de la présidentielle et à ceux qui s’opposent à son éventuelle candidature pour un 5e mandat consécutif à la tête du pays.

Au lieu de son habituel terme, celui de la «main extérieure», Bouteflika a utilisé des mots d’une rare virulence: «cercles de prédateurs», «spectateurs guetteur ou conspirateur», «aventuriers», «faucilles du massacres» et même le jargon terroriste a été utilisé avec une allusion aux «cellules dormantes».

Les traditionnels discours-fleuve sur les réalisations de la révolution et surtout les phrases dithyrambiques sur les avancées socio-économiques de ses 20 ans de pouvoir ont été, cette fois-ci, mises au placard. Preuve que l’heure est grave.

Désormais, c’est la pérennité au pouvoir, qui passe nécessairement par la présidentielle de 2019, qui est l’enjeu fondamental pour le président Bouteflika, et/ou son entourage.

Seulement, conscient des divergences et surtout des oppositions sourdes à un éventuel 5e mandat, Bouteflika, en quelques phrases intelligemment tournées, n’a rien dit sur sa candidature, mais ce discours reste sans équivoque.

«Si certains réduisent les enjeux du présent et de l’avenir au changement et à la succession des responsables et des personnes, et entreprennent, pour des raisons obscures, de propager cette idée, vous savez, vous qui êtes sur le terrain, à relever au quotidien les défis sécuritaires et socio-économiques, que l’enjeu est beaucoup plus grand», a t-il ainsi souligné dans ce discours lu en son nom.

Pour lever toute ambiguïté, le président devient rapidement plus précis en attaquant ceux qui appellent à l’alternance.

«Les aventuriers qui font dans la promotion de la culture de l’oubli, du déni et de la négation en sauront jamais des forces de construction et d’édification. Bien au contraire, ils dissimulent les faucilles du massacre, qu’ils n’hésiteront pas à utiliser pour faire basculer le pays dans l’inconnu», a t-il asséné à l’encontre de ceux-ci.

Et pour ôter tout équivoque, le président a été encore plus affirmatif: «nous continuerons nos efforts car nous sommes convaincus que nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère avec de nouvelles priorités et des orientations différentes», a t-il expliqué.

Bref, tout est dit. Sans clairement annoncer qu’il briguait un 5e mandat, avec ce discours, le président Bouteflika lève toute ambiguïté. Il se porte candidat à la présidentielle de 2019 pour un 5e mandant consécutif, après 20 ans passés à la tête de l’Algérie et ce, malgré son état. 

Il ne fait plus de doute désormais que Bouteflika, candidat à un 5e mandat, lui sera assuré du fait de l'absence de candidats de poids.

Toutefois, avec ce discours, il cible ceux qui hésitent encore ou qui s’opposent à ce 5e mandat, qu’ils soient internes et externes.

Seul facteur bizarre, lors de cette importante rencontre au cours de laquelle le discours du président a été lu, le Premier ministre, chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, n'était pas là, lui dont on dit qu'il est le candidat favori des puissances étrangères, notamment de la France pour succéder au président Bouteflika. Ahmed Ouyahia n’a soutenu jusqu’à présent le 5e mandat de Bouteflika que du bout des lèvres.

D’ici l’échéance électorale, tout peut arriver et ce, d’autant que beaucoup d’observateurs avancent la possibilité d’un report de la date de l’élection présidentielle.

Et la guerre des clans, qui secoue actuellement le pays, n’offre aucune visibilité d’ici à cette date-clé du scrutin d'avril 2019.

Par Karim Zeidane
Le 29/11/2018 à 13h18, mis à jour le 29/11/2018 à 13h47