Algérie. Coronavirus: Blida, le "Wuhan algérien", déconfinée contre l'avis des médecins

En Algérie, plus de 1600 patients ont reçu ou reçoivent le traitement à l'hydroxychloroquine qui semble avoir des effets positifs.

En Algérie, plus de 1600 patients ont reçu ou reçoivent le traitement à l'hydroxychloroquine qui semble avoir des effets positifs. . DR

Le 24/04/2020 à 11h28, mis à jour le 24/04/2020 à 11h53

Ni le président de l'ordre des médecins, ni le directeur de l'Institut Pasteur d'Alger n'étaient d'accord pour déconfiner les principales villes atteintes. Les autorités gouvernementales viennent de passer outre leur avis médical.

Ce que craignaient les plus éminents médecins algériens vient d'être décrété par le gouvernement. Selon la télévision nationale ENTV, le premier ministre, Abdelaziz Djerad, a annoncé la levée du confinement total de Blida et son allègement dans neuf autres wilayas, dont Alger. 

Désormais, les habitants de Blida, surnommée le Wuhan algérien à cause du nombre de décès, peuvent sortir entre 7h du matin et 14h, en début d'après-midi, alors qu'ils n'étaient jusqu'ici pas autorisés à mettre le nez dehors. Il s'agit d'un déconfinement partiel qui reste néanmoins un peu plus contraignant que celui des 9 autres wilayas dont Alger. En effet, ces derniers ont la possibilité de sortir de 7h du matin à 17h. 

Il s'agit d'une mesure qui en a surpris plus d'un puisque Blida a été la première zone touchée par la maladie dès le 1er mars. Elle est encore l'épicentre de la pandémie en Algérie avec 702 cas confirmés et surtout 133 morts à ce jour, soit 32% des 407 victimes de cette meurtrière maladie. 

Il est vrai que l'Algérie a vu le nombre de morts par jour diminuer de manière très sensible, avec une moyenne quotidienne autour de 5 seulement contre une vingtaine de décès au début du mois d'avril. De même, le pays compte actuellement 1355 cas de rémission sur un total de 3007 malades, donnant l’illusion que la pandémie est désormais sous contrôle. 

Il n'empêche que la mesure de déconfinement qui vient d'être décidée ne s'explique que pour des raisons politiques, notamment par le début du mois de ramadan. Elle n’est pas justifiée médicalement. Il s’agit surtout d’une promesse d’Abdelmadjid Tebboune qui a affirmé, une journée plus tôt, avoir donné des instructions au gouvernement pour revoir le confinement en fonction de l’évolution de la situation sanitaire sur le terrain.

Néanmoins, ce déconfinement s'est fait contre avis médical. En effet, pas plus tard que ce mercredi, le président du conseil de l'Ordre des médecins, le docteur Bekat Berkani, mettait en garde ses concitoyens contre une mauvaise lecture de la situation actuelle. 

Sur le site d'information Tout sur l'Algérie, il disait : "Nous avons toujours dit qu’il faut continuer à respecter le confinement et persévérer. Nous n’avons pas vaincu l’épidémie, nous sommes dans une situation où les choses se sont stabilisées, mais il faut absolument continuer toutes les mesures qui nous ont permis de fixer l’épidémie". 

Le site ajoutait que son avis était partagé par le directeur de l'Institut Pasteur, le Dr Derrar, qui prévenait que tout relâchement non calculé provoquerait certainement "une 2e vague qui sera encore plus importante que la première".

"Il faut que les Algériens s’arment de patience. Le déconfinement n’est pas encore à l’ordre du jour. On aura remarqué qu’il y a encore une dizaine de décès et une centaine de cas (positifs) par jour et des cas en réanimation même si la situation s’est stabilisée… À l’avenir, il faudra tenir dans la durée ces dispositions. Sur le plan individuel, certains comportements risquent de nous mener vers la catastrophe", insistait le docteur Berkani. 

Visiblement ni lui, ni son homologue de l'institut Pasteur n'ont été écoutés, alors que l'espoir commençait à revenir dans le pays le plus durement touché du continent avec quelque 407 morts. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 24/04/2020 à 11h28, mis à jour le 24/04/2020 à 11h53