Cameroun: psychose face à une éventuelle baisse des salaires

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Le 25/07/2017 à 14h19, mis à jour le 25/07/2017 à 14h20

L’opinion publique camerounaise s’inquiète d’une possible réduction des émoluments dans la fonction publique, après le programme de facilité élargie de crédit signé par le pays avec le Fonds monétaire international (FMI). Le souvenir des années 1990 hante encore les mémoires.

Le Cameroun, à l'instar des pays de la sous-région d'Afrique centrale, traverse une situation économique difficile. Même si le pays fait mieux que ses voisins, le ralentissement économique est patent. Et face aux difficultés consécutives à la chute des cours du baril de pétrole, le pays s'est tourné naturellement vers le Fonds monétaire international (FMI) pour bénéficier d'un financement de 400 milliards de FCFA (610 millions d'euros).

Il n’en fallait pas plus pour raviver le spectre des années 1990 dans l'esprit des populations camerounaises. «C’est sûr, le Cameroun est à nouveau rentré sous ajustement structurel du FMI. Bientôt il y aura des baisses de salaires dans la fonction publique», déclare Grace Malong, infirmière, inquiète pour la rentrée scolaire de ses enfants.

Une crainte renforcée par le fait que le chef de l’Etat, Paul Biya, a prescrit une réduction drastique du train de vie de l’Etat pour faire face au ralentissement économique.

C’est que, dans les années 1990, au plus fort de la crise économique et avec la dévaluation du franc CFA, la politique d’ajustement structurel menée dans le pays avec le FMI avait eu d’énormes conséquences néfastes au plan social. Entre autres, des baisses de salaires et le gel des recrutements dans la fonction publique, la suppression de nombreuses subventions, l’inflation avec la libéralisation des prix, etc. Le tout, avec pour conséquence, l’augmentation de la pauvreté et des disparités sociales. Une période difficile donc qui fait craindre le pire pour les mois à venir.

Le gouvernement tente tant bien que mal de démentir les rumeurs et de rassurer. «Aucune coupe de salaires n’est envisagée et rien dans le programme triennal avec le FMI ne le prévoit», déclare Isaac Tamba, secrétaire général du ministère des Finances.

Pour le gouvernement camerounais, l’initiative de signer un programme de Facilité élargie de crédit avec le FMI est endogène et non imposée de l’extérieur.

«L’accord passé avec le FMI pour cette facilité élargie de crédit ouvre la voie à des financements bilatéraux additionnels. A ce titre, 887 milliards de francs CFA sont attendus en plus du financement du FMI, en provenance de partenaires techniques et financiers. Au titre de la seule année 2017, 510 milliards de FCFA seront mis à la disposition du Cameroun dans le cadre de réformes clés dans certains secteurs jugés critiques pour notre économie. Le taux d’intérêt pour le remboursement de ces financements est de 0%, avec un différé d’amortissement de cinq ans et demi et une échéance maximale de 10 ans», a expliqué le ministre de la Communication, Issa Tchiroma Bakary, lors d’un point de presse lundi 24 juillet 2017.

Parmi les financements attendus pour relancer l’économie camerounaise, les autorités listent 377 milliards de FCFA en provenance de la Banque africaine de développement, 247 milliards de FCFA de la Banque mondiale, 197 milliards de FCFA de la France, à travers l’Agence française de développement et 66 milliards de FCFA de l’Union européenne.

«Le programme triennal,ainsi appuyé par la FEC et les financements additionnels adossés, est fondé sur notre propre stratégie de croissance. Aucune interférence extérieure n’accompagne la signature d’un accord entre le Cameroun et le FMI. Il ne s’agit donc pas d’un programme d’ajustement structurel», rassure le ministre.

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Par Elisabeth Kouagne (Abidjan, correspondance)
Le 25/07/2017 à 14h19, mis à jour le 25/07/2017 à 14h20