Soudan: la nouvelle instance de transition mise en place

Le général Abdel Fattah al-Burhane, président du Conseil Souverain du Soudan.

Le général Abdel Fattah al-Burhane, président du Conseil Souverain du Soudan.. DR

Le 21/08/2019 à 10h22, mis à jour le 21/08/2019 à 10h25

La transition vers un pouvoir civil au Soudan, née de l’accord historique entre les militaires et la contestation, prend corps mercredi avec l’intronisation du conseil souverain, qui doit être suivie de la nomination d’un Premier ministre de consensus.

Le Conseil souverain remplace le “Conseil militaire de transition”, qui dirigeait le pays depuis la destitution du président Omar el-Béchir, le 11 avril.

L’actuel chef du Conseil militaire, le général Abdel Fattah al-Burhane, “a prêté serment comme président du Conseil souverain”, a indiqué l’agence officielle Suna en fin de matinée.

Selon les termes de l’accord officiellement signé samedi, il sera aux manettes du Conseil pendant 21 mois et un civil lui succédera pour le reste des 39 mois de transition prévus.

La formation de cette instance survient après des mois de manifestations des Soudanais qui réclamaient un pouvoir civil, sur fond de grave situation économique.

Les noms des 11 membres du Conseil -cinq militaires et six civils- ont été annoncés mardi soir tard, avec deux jours de retard sur le calendrier prévu, en raison de différends au sein des Forces pour la liberté et le changement (FLC), issues de la principale organisation du mouvement de protestation.

Après M. Burhane, les dix autres membres de l’instance doivent aussi prêté serment mercredi. Dans la foulée, le Premier ministre proposé par la contestation, Abdallah Hamdok, doit rapidement entrer en fonctions.

Le Conseil souverain, qui comprend deux femmes, dont l’une est issue de la minorité chrétienne, devra superviser la formation du gouvernement -une annonce est prévue le 28 août- et d’un Parlement de transition.

Conclu à la faveur d’une médiation de l’Ethiopie et de l’Union africaine, l’accord sur la transition entre les militaires et la contestation a été signé samedi lors d’une cérémonie à laquelle assistaient de nombreux responsables étrangers, signe que le Soudan pourrait perdre son statut de paria sur la scène internationale.

Le pays a souffert notamment de dizaines d’années de sanctions économiques appliquées par les Etats-Unis, qui continuent de le maintenir sur la liste noire des “Etats soutenant le terrorisme”.

Défis intérieurs et extérieurs

Le Conseil souverain cherchera par ailleurs à convaincre l’Union africaine d’obtenir la levée de la suspension du Soudan de l’UA, décidée en juin quelques jours après la dispersion meurtrière d’un sit-in des protestataires à Khartoum.

Selon un comité de médecins proche de la contestation, 127 personnes avaient été tuées le 3 juin lors de cette répression devant le siège de l’armée.

Sur le plan intérieur, le Conseil souverain et le gouvernement auront la lourde tâche de redresser une économie exsangue et de pacifier un pays marqué encore par plusieurs conflits, notamment dans la région du Darfour, dans l’ouest du pays.

Les nouvelles institutions se mettent en place en même temps que le début du procès du président déchu Omar el-Béchir, porté au pouvoir par un coup d’Etat et qui a dirigé le pays pendant près de 30 ans. 

L’ancien homme fort du pays est apparu lundi dans une cage en métal dans la salle d’audience d’un tribunal de Khartoum, pour répondre d’accusations de corruption. Selon des enquêteurs, il a reconnu avoir perçu 90 millions de dollars en espèces de l’Arabie saoudite, hors budget de l’Etat.

Son procès ne concerne toutefois pas les accusations de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et de génocide dans la région du Darfour portées par la Cour pénale internationale (CPI) depuis une décennie.

Amnesty International a exhorté à ce sujet les nouvelles institutions de transition à ratifier le Statut de Rome de la CPI, ce qui permettrait de transférer M. Béchir devant ce tribunal international.

Malgré l’euphorie engendrée par la signature de l’accord de transition samedi, un malaise est palpable dans le camp des protestataires en raison notamment de l’omniprésence de Mohamed Hamdan Daglo, numéro deux du Conseil militaire et chef d’une redoutée force paramilitaire accusée d‘être impliquée dans la répression de la contestation.

Depuis avril, il est omniprésent, et c’est lui qui a cosigné samedi l’accord avec la contestation.

Ses Forces de soutien rapide (RSF) sont aussi accusées de crimes au Darfour sous le régime Béchir.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 21/08/2019 à 10h22, mis à jour le 21/08/2019 à 10h25