La Commission nationale anti-corruption (CONAC) a reçu quelque 24.000 cas de dénonciations en 2018, contre 3000 l’année précédente. Certaines de ces dénonciations mettaient notamment en cause la «corruption rampante» qui règne au sein de la magistrature et «pourrit considérablement le système judiciaire camerounais», déplore la structure en charge de la lutte contre ce phénomène dans le pays.
«Le versement des dessous de table, le monnayage des décisions de justice et des actes administratifs, les lenteurs judiciaires et l’embourgeoisement des magistrats sont quelques-uns des griefs qui caractérisent le malaise actuel», écrit le président de la CONAC, Dieudonné Massi Gams, dans une correspondance adressée le 23 novembre 2018 au chef de l’Etat Paul Biya, et qui circule depuis quelques jours sur les réseaux sociaux.
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Dans ce document, le président de la CONAC affirme que les enquêtes diligentées par son organisme ont confirmé ces accusations de corruption de magistrats à Douala, la métropole économique. Le cas le plus particulier, dit-il pour le fustiger, est celui du procureur de la République près le tribunal de première instance (TPI) de Douala-Bonanjo, Jean-Paul Kiam, «dont les accusations de corruption, d’enrichissement ostentatoire et d’abus divers proviennent de diverses sources».
Aussi, «pour prévenir et juguler» la corruption dans la magistrature au Cameroun, la CONAC recommande-t-elle la réforme profonde du Conseil supérieur de la magistrature. Ce, afin d’alléger et d’accélérer la procédure de sanction des magistrats, «dont l’impunité accentue les pratiques décriées».
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Elle propose également la réforme des modes de recrutement et de formation des magistrats, notamment en privilégiant le modèle anglo-saxon qui ouvre l’accès à la magistrature prioritairement aux avocats expérimentés et intègres.
Pour le président de la CONAC, la longévité à un poste alimente les «mauvaises pratiques», d’où la nécessité de penser à une «mobilité régulière» des magistrats. La révision du statut de la magistrature, accompagnée d’une revalorisation des salaires des magistrats, devrait être également envisagée, selon l’organisme chargé de combattre la corruption.
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Le ministère de la Justice figurait en troisième position des administrations les plus corrompus au Cameroun, révélait la CONAC dans son rapport annuel en 2017. Dans son dernier rapport dévoilé le 19 décembre dernier, la structure indique que l’Etat camerounais a perdu 40 milliards de francs CFA à cause de la corruption. Toutefois, soulignait son président, le travail de la CONAC a permis de restituer 4 milliards de francs CFA à travers les juridictions.