Réunis à Pau, en France hier lundi 13 janvier, les chefs d'Etat français et des pays du G5 Sahel ont pris une importante décision portant sur la mise en place d'un commandement unique des forces en place afin de mieux contrer les avancées de l'Etat islamique.
Emmanuel Macron, Ibrahim Boubacar Keïta, Roch Marc Christian Kaboré, Mouhamadou Issoufou, Mohamed Cheikh El Ghazouani et Idriss Déby Etno annoncent la mise en place d'une nouvelle "Coalition pour le Sahel" qui verra se renforcer la coordination entre les armées africaines, le G5 Sahel et la force française Barkhane.
Dans une déclaration lue par le président Macron, la nouvelle force concentrera ses efforts sur la zone des trois frontières, entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Un triangle qu'il est difficile de défendre à cause des nombreux lieux de repli qu'il offre aux djihadistes.
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Dans sa nouvelle mouture, cette force multinationale verra ses prérogatives transfrontalières renforcées. Cela veut dire qu'il lui sera plus facile de poursuivre en territoire malien des terroristes ayant commis des attaques au Burkina Faso ou au Niger et vice versa.
Par la même occasion, le président Emmanuel Macron a annoncé le renforcement de la force Barkhane, avec 220 hommes supplémentaires.
Cependant qu'Emmanuel Macron souhaitait une plus ample implication des forces étrangères, notamment américaines, les Etats-Unis lui font faux bond. Car parallèlement, le Pentagone a annoncé le redéploiement de ses troupes vers des zones prioritaires dont le Sahel ne semble pas faire partie. En Afrique, seuls la Libye et l'Est du continent devraient continuer à accueillir les plus gros contingents américains.
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Le ministre américaine de la Défense, Mark Esper, envisagerait ainsi de fermer une base de drones à Agadez, dans le nord du Niger, dont le coût a été estimé à une centaine de millions de dollars et qui donne aux Etats-Unis une plate-forme de surveillance de premier plan au Sahel.
Questionné à ce sujet, le chef du Pentagone, le général Mark Milley, à Bruxelles ce 13 janvier pour une réunion de l'Otan, a assuré que le chef du Pentagone n’avait encore "pris aucune décision". "Economiser nos forces ne veut pas dire les ramener à zéro", a-t-il assuré, avant de dire que l’examen de la présence des forces en Afrique "se poursuit".
Dans ce contexte, beaucoup de questions se posent concernant la nouvelle force conjointe et combinée Barkhane-G5 Sahel. Y aura-t-il un commandement tournant, comme c'est le cas actuellement avec le G5 Sahel ou bien appartiendra-t-il à l'armée française d'en être à la tête?
Dans le premier cas, le G5 Sahel ayant montré ses limites, ce ne serait pas une excellente idée de confier le commandement aux généraux des cinq pays du Sahel. Car visiblement, ils peinent à mobiliser au-delà de leur propres troupes nationales. Alors qu'un commandement français pourrait ne pas être une bonne idée, dans un contexte de critiques acerbes sur le rôle de l'ancienne puissance coloniale.
Actuellement, près de 10.000 hommes sont déjà sur place, dont 4.200 de Barkhane et 5.000 du G5 Sahel, sont dans cette zone vaste comme l'Europe. Pourtant, ils n'ont pas réussi à freiner l'expansion des djihadistes. La question se pose de savoir si les changements envisagés dans le commandement et les règles d'engagement seront suffisants pour venir à bout des djihadistes. Les récentes attaques, de plus en plus fréquentes et de plus en plus meurtrières permettent d'en douter.
Quoi qu'il en soit, la France et les pays du G5 Sahel ne sont pas sortis de l'auberge. Les solutions préconisées à Pau seront mises en oeuvres sans délai et feront l'objet d'une évaluation à Nouakchott dans six mois, lors d'un nouveau sommet des six chefs d'Etat. D'ici là, les camps militaires, nigériens, maliens et burkinabè ont intérêt à renforcer leur défense et les armées des cinq pays leurs services de renseignement pour éviter de nouvelles hécatombes.