Coronavirus: une grave pandémie pour l'Europe, juste un gros rhume pour l'Afrique

DR

Le 01/05/2020 à 09h57, mis à jour le 01/05/2020 à 11h51

Le Covid-19 est une très grave pandémie pour l'Europe et les Etats-Unis, mais il n'est pour l'heure qu'un gros rhume pour le continent africain, pour des raisons que seuls les scientifiques pourront élucider dans le futur.

Plus de deux mois après avoir enregistré son premier cas confirmé de Covid-19, le continent africain se montre étonnamment résilient, avec à peine 1632 décès et un peu plus de 38.800 infections. 

Pendant ce temps, au 1er mai, la planète compte plus de 3 millions de personnes contaminées et surtout près de 233.500 décès, selon l'Université Johns Hopkins. Les prédictions d'hécatombe ne sont finalement pas avérées. Du moins, pour l'heure. L'Europe ne semble pas vivre cette pandémie de la même manière, en tout cas. 

Depuis le début du Covid-19, pour les trois pays européens les plus touchés que sont l’Italie, l’Espagne et la France, les avis de décès portant la mention Covid-19 ont atteint 79.281, ce vendredi 1er mai.

A eux trois, ils ne comptent que 174 millions d’habitants, c’est-à-dire un poids démographique moins important que celui du Nigeria avec ses 196 millions d’habitants et à peine l'équivalent de 13% de l'ensemble de l'Afrique avec son milliard et trois cent quarante millions de personnes. 

Deux mois après avoir touché ces trois pays, le Covid-19 avait fait 18.000 victimes. Or, dans la plupart des pays du continent, le nombre de victimes reste très limité.

Si la pandémie s’était comportée de la même manière au Nigeria qu’elle l’a fait dans ces trois pays européens, on aurait compté actuellement au moins 21.000 morts chez le géant ouest-africain, c'est-à-dire deux mois après la détection du premier cas et 138.000 pour l'ensemble des 54 pays africains.

1600 morts là où on en attendait 138.000

En en gardant la même échelle et pour une durée de trois mois, le nouveaux coronavirus pourrait alors tuer plus de 87.000 personnes au Nigeria ou encore 610.000 personnes d'ici fin mai. 

Or, ce 1er mai 2020, force est de constater que les Africains sont loin d’un tel bilan à l’européenne et encore moins d’une perspective similaire.

Ce ne sont même pas 2000 personnes qui ont été infectées et seuls 58 décès ont été officiellement enregistrés dans tout le pays le plus peuplé du continent. Et pour toute l'Afrique, au lieu de 138.000 morts, le décompte n'est qu'à 1632. 

Le Nigeria, dont les structures sanitaires sont loin d’être les meilleures sur le continent, n’est qu’un exemple qui montre bien qu’il y a une grande différence dans l’évolution de la pandémie en comparaison avec l’Europe.

Dès lors, la question qui se pose est de savoir si l’on peut avoir, proportionnellement, autant de décès que l’Europe ou les Etats-Unis. Ce qui correspondrait à des centaines de milliers de victimes dans un mois. 

Aucun pays n'est venu médicalement en aide au continent, parce que tout le monde préfère garder son hydrocholoroquine, con azithromycine et ses respirateurs artificiels pour lui-même, par prudence. Pourtant, tout le monde sait que les millions de morts que prévoyait le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, il y a un peu plus d'un mois sur les ondes de Radio France internationale, sont de moins en moins probables. 

L’hécatombe n'aura visiblement pas lieu, même si les Africains ont intérêt plus que jamais à respecter les gestes barrières et les normes sanitaires. 

Pour certains, l’évolution de la maladie en Afrique n’est pas une grosse surprise, compte tenu de l’apparente résistance aux maladies infectieuses dont fait preuve la population sur le continent. Les chiffres montrent que le virus se comporte différemment sur le continent qu’en France.

Evidemment, l’absence de moyens de tests fait que beaucoup de cas en Afrique ne seront jamais diagnostiqués et un nombre important de décès liés au coronavirus pourrait ne jamais être enregistré. Mais cela pose aussi la question de savoir comment l’Afrique aurait pu faire pour cacher des centaines de milliers de morts au reste du monde. C'est parce que tout simplement, la mortalité n'a pas réellement grimpé en flèche.

Il existe ça et là des doutes sur des décès inhabituellement élevès comme à Kanu dans le nord du Nigeria, mais rien n'est pour le moment rapporté de manière officielle ou scientifique. 

Un virus plus contagieux en France qu'en Afrique

Au-delà de la mortalité, il semble aussi que le virus se soit propagé de manière fulgurante sur le continent européen, comme le montre le taux de positivité des tests réalisés en France, comparé à ceux du Maroc et du Sénégal.

En effet, les trois pays ont utilisé la même stratégie axée d'abord sur le test des personnes identifiées qui ont été en contact avec des malades. Ce qui veut dire qu'à Paris, Casablanca ou Dakar, on sélectionne tout l'entourage familial ou professionnel du malade qu'on considère comme des contacts potentiellement contaminés pour les tester.

Les résultats sont sans appel. Un Français porteur a contaminé 22% des personnes identifiées comme des contacts. Pendant, ce temps, seuls 13% de l’entourage des malades marocains ont également contracté le coronavirus. Alors qu’au Sénégal, les malades ne contaminent que 6,9% de leurs entourages.

Ces chiffres découlent des résultats des tests fournis respectivement par Santé publique France et les ministères de la Santé du Maroc et du Sénégal.

En effet, selon Santé publique France, "du 24 février au 19 avril, 457.287 tests et 102.358 (22%) tests positifs pour le SARS-CoV-2 ont été rapportés".

Au Maroc, au 28 avril 2020, sur un total de 31.250 tests effectués depuis le début de la pandémie, seuls 4.252 sont revenus positifs, soit un taux de positivité de 13,61% seulement.

Enfin, au Sénégal, au 29 avril sur 12.705 test effectués depuis le début de l’épidémie, 882 étaient revenus positifs, soit un taux de posivité de 6,9%.

Evidemment, le coronavirus a suffisamment montré ce dont il est capable, en faisait des centaines de milliers de victimes, en mettant l’économie mondiale à terre en ramenant les cours du pétrole à plus d’une vingtaine d’années en arrière. Autant de choses qui méritent que l’Afrique, comme le reste du monde, redouble de vigilance.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 01/05/2020 à 09h57, mis à jour le 01/05/2020 à 11h51