Dimanche 13 septembre, 637.000 lycéens en classe de terminale en Algérie sont convoqués pour subir les épreuves du bac, fameux sésame pour accéder à l’université. Pour les autorités algériennes, l’importance de ce diplôme pousse souvent les candidats à s’adonner à la triche comme dans le fameux film «les sous-doués passent le bac». Sauf qu’ici, l’usage généralisé de l’Internet est un facteur favorisant la fraude. Il suffit d’un téléphone, d’un complice à l’extérieur pour pouvoir lui envoyer les épreuves avec un Smartphone et attendre patiemment les réponses et le tour est joué.
1,7 milliard d'euros perdus
De même, du fait des conditions d’organisation douteuses avec des méthodes surannées où les académies régionales dépendent entièrement d’Alger, certains parviennent même à avoir accès aux épreuves quelques heures avant. Et là aussi, les nouvelles technologies de l’information sont une aubaine pour les cancres et un cauchemar pour les autorités en charge de ce qui est considéré comme le premier diplôme universitaire. Du coup, depuis 2016, l’Algérie a choisi la solution de facilité: couper totalement l’Internet mobile dans tous les pays, au lieu d’installer des brouilleurs dans les centres d’examens, comme ce qu’avait promis l’armée l’année dernière.
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Pourtant, selon les experts, chaque heure de coupure d’Internet coûte quelque 50 millions d'euros aux entreprises du pays et aux citoyens algériens. Le régime semble visiblement n’en avoir cure. Résultats: ce n’est pas moins de 1,7 milliard d'euros que l’économie algérienne perd durant les cinq jours que se déroule le baccalauréat.
La Mauritanie sur les pas de l'Algérie
Autre pays, la Mauritanie. Pour les mêmes raisons, l’Internet mobile est également coupé dans l’ensemble du pays pour éviter le recours à ces nouvelles méthodes de fraude. Cette année, cela a également été le cas. Conséquence: il a été pratiquement impossible aux Mauritaniens d’utiliser correctement Internet la semaine dernière.
Là également, les conséquences pour l’économie se chiffrent à plusieurs centaines de millions d’ouguiyas. Mais encore aujourd’hui, aucune autre solution n’a été envisagée, notamment devant l’impossibilité de fouiller les candidats devant les salles d’examen.
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Au Cameroun aussi, il arrive au gouvernement de choisir des solutions de facilité. Cette semaine, l’accès à Internet a connu des perturbations mardi 22 septembre, alors que des manifestants étaient descendus dans la rue à l’appel de l’opposition pour réclamer le départ du président Paul Biya. Le réseau Internet a connu des perturbations ces derniers jours au Cameroun.
Cameroun: sas de réseaux sociaux les jours de manifestations
«J’ai constaté que ma connexion n’était pas fluide. J’ai appelé des amis abonnés chez d’autres opérateurs pour savoir s’ils avaient le même problème ou si c’était juste mon fournisseur d’accès à Internet. Ils m’ont répondu qu’ils avaient également de la peine à se connecter», confie une abonnée à Yaoundé, la capitale. «J’ai eu l’impression que mon fournisseur d’accès à Internet a considérablement ralenti le débit. Il était très difficile de télécharger ou d’attacher des fichiers», indique un autre basé à Bertoua, la capitale régionale de l’Est. Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes se sont plaint de la dégradation du réseau, interpellant les opérateurs sur leurs pages.
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Les perturbations ont commencé samedi 19 septembre et se sont amplifiées le 22 septembre. Certains ont estimé que cette mauvaise qualité de la connexion avait un lien avec les manifestations interdites du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) de l’opposant Maurice Kamto. Ce dernier avait appelé à des «marches pacifiques» le 22 septembre pour exiger le départ du président Paul Biya, à la tête du pays depuis 1982 et réélu pour un septième mandat lors de l’élection présidentielle du 7 octobre 2018. Les réseaux sociaux sont utilisés par le parti pour y véhiculer ses idées. Cette version a fortement prospéré au sein de l’opinion publique, surtout qu’un retour à la normale a été observé dans la soirée du 22 septembre.
Rien d’officiel sur le sujet cependant. A la filiale camerounaise du groupe français Orange, souvent décriée pour la qualité de ses services, des sources évoquent juste «quelques perturbations sur le réseau» sans aucun lien avec les manifestations du MRC. Dans un message à ses clients jeudi 24 septembre, l’opérateur de téléphonie mobile camerounais YooMee indique que «des perturbations sur le réseau affectent nos services Internet. Nous travaillons à fixer le problème promptement». En octobre 2018, le gouvernement avait formellement démenti toute coupure d’Internet pendant le scrutin présidentiel cette année-là, parlant de «manipulations» et de «fake news». Début 2017, Yaoundé avait coupé Internet pendant trois mois dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, en proie à la crise anglophone depuis bientôt quatre ans.