Au point mort depuis trois mois en raison de désaccords persistants entre les trois pays, les négociations sur la gestion du Grand Barrage de la Renaissance éthiopienne (GERD) ont repris ce dimanche 1er novembre au Soudan, en présence des représentants de l’Egypte, de l’Ethiopie, du Soudan et du ministre de la Coopération internationale d’Afrique du Sud, Jay Bandura, pays dont le président assure la présidence de l’Union africaine.
Cette réunion intervient quelques jours après une réunion par visioconférence des ministres des Affaires étrangères ainsi que ceux en charge des questions touchant à l'rrigation dans les trois pays, visant à la reprise des négociations tripartites sur le barrage éthiopien, à l’invitation de l’Afrique du Sud.
L’objectif des Soudanais et des Egyptiens est d’arriver, au cours de cette semaine de discussions cruciales, à mettre en place un ordre du jour clair, détaillé et un calendrier serré à les négociations futures, pour, selon la partie soudanaise, aboutir à un accord final sur la gestion du barrage éthiopien.
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Toutefois, les discussions sous l'égide de l'Union africaine ne s'annoncent pas faciles. L’Ethiopie souligne que l’accord doit se limiter au remplissage du barrage et que tout accord portant sur sa gestion doit être lié à la question de partage des eaux du Nil bleu.
L’Egypte et le Soudan invoquent «un droit historique» sur le Nil, garanti par des traités conclu en 1929 et 1959, alors que l’Ethiopie s’appuie sur un traité signé en 2010 par six pays riverains, accord boycotté par l’Egypte et le Soudan. Le Soudan avait d'ailleurs menacé de quitter les négociations, si celles-ci portaient sur le partage des eaux du Nil.
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L’Egypte et le Soudan accusent de leur côté l’Ethiopie de vouloir gagner du temps en retardant les discussions sur les modalités de remplissage du réservoir du barrage.
Actuellement, le principal point d’achoppement entre les trois pays concerne les modalités de remplissage du réservoir géant du barrage, de 74 milliards de mètres cubes.
En dépit d’un accord entre les trois pays, l’Ethiopie a profité de la bonne pluviométrie au niveau de la région pour entamer le remplissage du réservoir, sans en informer préalablement ses voisins. Leur réaction n’a toutefois pas été virulente, à cause des fortes pluies et les inondations dans la région, qui ont fait que la rétention d’une partie des eaux en amont du Nil a permis de limiter l’impact des inondations au Soudan.
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Mais l’Egypte, située en aval du fleuve, souhaite que les trois pays mettent rapidement en place un accord contraignant sur la gestion du barrage éthiopien, à commencer par le remplissage du réservoir.
Le Caire souhaite que ce remplissage soit étalé sur plusieurs années, afin que le pays ne ressente pas la baisse du débit du Nil, alors que l’Ethiopie, qui juge que le barrage se situe dans son territoire, et qu’il est essentiel à son développement, reste réticent à un accord contraignant sur celui-ci.
Addis-Abeba souhaite en effet réaliser un remplissage rapide du réservoir, pour pouvoir produire de l’électricité en quantité.
Selon les autorités éthiopiennes, le barrage hydroélectrique de la Grande renaissance éthiopienne devrait fournir ses premiers kilowatts/heure au début de l'année 2021.
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L’Egypte, qui compte plus de 100 millions d’habitants, dépend des eaux du Nil à 97% pour son approvisionnement en eau.
Quant à l’Ethiopie, second pays le plus peuplé d’Afrique avec 110 millions d’habitants, le barrage hydroélectrique et ses 6.450 MW constitueront un véritable accélérateur de son développement économique, alors que dans ce pays, le taux d’électrification dépasse à peine 30% actuellement, contre un taux de 100% en Egypte. Cette mise en service sera sans nul doute une aubaine pour Addis-Abeba qui pourra exporter son surplus électrique vers ses voisins, avec, à la clé, plus de 700 millions d’euros de recettes, à terme.
C’est dire que les enjeux de la gestion de ce gigantesque barrage sont importants pour les deux pays, sachant que celui-ci est construit sur le Nil bleu, qui est à l’origine de 85% des eaux du Nil qui traversent l’Egypte... du Sud au Nord de son territoire.