Environ 3.000 tonnes de fleurs fraîchement coupées quittent chaque semaine l'aéroport international de Nairobi pour le Vieux continent, réfrigérées dans des conditions similaires à celles requises pour conserver les vaccins.Ceux commandés par l'Afrique doivent être maintenus à basse température depuis l'usine de production jusqu'à leur livraison finale, une exigence impossible à remplir pour de nombreux pays du continent en manque d'infrastructures."Ce sont les conditions dans lesquelles nous transportons nos fleurs fraîches, donc c'est très commun et habituel pour nos mécanismes de contrôle de la température", explique à l'AFP Peter Musola, directeur général du transport de marchandises chez Kenya Airways. "L'expertise que ce marché implique en termes de respect de la chaîne du froid est sans égale."
Lire aussi : Tests Covid-19: les vols d'Ethiopian Airlines en France suspendus pendant 4 jours
Transporter les vaccins vers l'Afrique et ses 1,3 milliard d'habitants représente un enjeu crucial. La compagnie se prépare donc avec de nouvelles lignes, la transformation d'appareils transportant des passagers en avions cargos et l'ouverture d'un entrepôt de stockage dédié aux vaccins.
- Pouvoir des fleurs -
Kenya Airways - dont l'Etat kényan possède un peu moins de la moitié des parts (48,9%) - se dispute ce nouveau marché avec sa voisine d'Afrique de l'Est, la compagnie aérienne 100% publique Ethiopian Airlines.Plus gros transporteur aérien d'Afrique, le concurrent éthiopien a acheminé son premier chargement de vaccins anti-Covid début février. Venue de Chine et destinée au Tchad, la cargaison lui a permis d'afficher ses ambitions sur le continent et de démontrer sa fiabilité.
Lire aussi : Transport aérien. Covid-19: Kenya Airways va licencier 40% de ses effectifs
Kenya Airways espère de son côté acheminer vers le Kenya les premières doses de vaccins commandées par le gouvernement et promises pour février, mais pour lesquelles aucune date précise n'a été fixée.Mais la compagnie souhaite également convaincre à l'étranger et compte sur la réputation du Kenya, l'un des principaux producteurs mondiaux de fleurs coupées. Chaque jour, ses roses et ses œillets embarquent à bord d'avions en partance pour les capitales européennes, notamment Amsterdam. Pour conserver l'éclat de leurs pétales, les fleurs doivent être réfrigérées à une température entre deux et huit degrés pendant tout le voyage.Si les gouvernements africains ont déjà fait une croix sur les vaccins anti-Covid de Pfizer et Moderna, qui doivent être transportés à des températures extrêmes et requièrent des super congélateurs difficiles à obtenir, ils se tournent en revanche vers ceux produits par Sinopharm, AstraZeneca ou Johnson&Johnson, qui doivent eux aussi être conservés entre deux et huit degrés. Un "avantage décisif pour le Kenya", selon M. Musola. "L'expertise dans le transport de produits frais représente une vraie valeur ajoutée quand il s'agit de contrôler la température pour les vaccins."
- "Solution durable" -
En difficulté financière, Kenya Airways mise sur le transport de vaccins pour se diversifier.Son activité de transport de marchandises a légèrement progressé en 2020, mais le transport de passagers, qui reste son cœur de métier, s'est effondré avec la chute des vols internationaux provoquée par la pandémie.La compagnie a supprimé des centaines d'emplois l'an dernier et le gouvernement, son principal actionnaire, lui a accordé 91 millions de dollars pour l'aider à supporter ses pertes, a révélé cette semaine la presse économique du pays.Pour assumer ses nouvelles ambitions, l'entreprise vient de convertir un Boeing 787, initialement affecté au transport de passagers, en avion cargo. Un deuxième appareil devrait suivre.
Lire aussi : Kenya Airways en crise, l’Etat opte pour la nationalisation et le changement du modèle économique
Dans les prochains mois, rythmés par la Saint-Valentin et la fête des mères, elle espère que ses longs-courriers remplis de fleurs pour l'Europe pourront revenir chargés de vaccins, selon M. Musola.Depuis septembre, elle dispose d'un entrepôt dédié au stockage à basse température, permettant d'accueillir 300 tonnes de vaccins toutes les six heures. Le bâtiment inclut un congélateur spécial capable de conserver le vaccin de Moderna, qui requiert des températures négatives.Au-delà de la pandémie, Kenya Airways espère rentabiliser ses investissements en continuant à transporter d'autres produits pharmaceutiques vers l'Afrique."Nous sommes persuadés que même après le Covid, il y aura autre chose", conclut M. Musola. "Nous voulons donc nous positionner comme une solution durable pour l'industrie."