Les opérations de vote pour la présidentielle ont commencé timidement dimanche au Congo-Brazzaville, privé d'internet par les autorités, où six candidats - dont l'un est malade du Covid-19, affrontent l'indétrônable président Denis Sassou Nguesso qui vise une réélection dès le 1er tour.
L'accès à internet était coupé depuis plusieurs heures à l'ouverture officielle des bureaux de vote à 07H00 (6H00 GMT), ont constaté des journalistes de l'AFP. Contrairement au précédent scrutin de 2016, les communications téléphoniques et par SMS restaient toutefois possibles.
Dans plusieurs bureaux à travers le pays, où l'affichage des listes d'électeurs n'était pas terminé à 07H00, le vote a commencé avec retard, jusqu'à parfois une heure. Peu d'affluence était constatée à l'heure de début de vote.
"Nous sommes venus voter pour apporter le changement dans notre pays et accomplir notre devoir civique (...) On avait dit que ça devait commencer à 07H00 et je suis là qu'il pleuve, qu'il neige, a expliqué à l'AFP Simon Mountandi, 50 ans, fonctionnaire devant un bureau de la capitale, où il s'est rendu malgré la pluie annoncée.
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Un autre électeur, ayant requis l'anonymat est venu pour rien: "mon nom n'est pas sur les listes affichées devant le bureau de vote. Je n'ai pas ma carte non plus. Ça me fait mal. C'est regrettable".
"Un coup, K-O", demande sur ses affiches de campagne le président-candidat, 77 ans dont 36 cumulés au pouvoir, tout à sa volonté de valider dès dimanche un nouveau mandat de cinq ans. L'ancien officier a déjà été réélu trois fois depuis 2002.
Son principal adversaire, l'opposant Guy-Brice Parfait Kolelas, malade, est quant à lui bel et bien apparu K-O dans une vidéo diffusée samedi.
"Mes chers compatriotes, je me bats contre la mort, mais cependant, je vous demande de vous lever. Allez voter pour le changement. Je ne me serai pas battu pour rien", a déclaré Kolelas, alité, affaibli, juste après avoir retiré un masque d'assistance respiratoire qu'il remet à la fin de son message.
Testé positif au Covid-19 vendredi après-midi, Kolelas, 60 ans, doit être évacué ce dimanche vers la France, d'après son directeur de campagne, Cyr Mayanda.
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Le message du candidat est daté de vendredi, jour où il n'avait pas pu tenir son dernier meeting de campagne à Brazzaville.
Autre candidat de l'opposition, l'ancien ministres des Finances Mathias Dzon a prévenu sur Radio France Internationale (RFI) qu'il n'accepterait sans doute pas les résultats officiels car "la commission électorale actuelle est une commission partisane, qui ne prévoit que la victoire du candidat au pouvoir".
Appels à la paix
"La seule incertitude est quel score monsieur Sassou demandera à la Commission électorale prétendument indépendante de lui attribuer", ironise le célèbre romancier congolais Emmanuel Dongala, joint par l'AFP à son domicile aux Etats-Unis.
Les adversaires du président sortant ont déjà dénoncé le vote anticipé jeudi des membres des forces de sécurité (entre 55 et 60.000), source de fraude potentielle selon eux.
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Sassou Nguesso a dirigé le Congo entre 1979 et 1992, à la tête d'un régime de parti unique. Il a été battu lors des premières élections pluralistes en 1992 par Pascal Lissouba, mais ce très rare exemple d'alternance pacifique en Afrique centrale a pris fin en 1997 avec le retour au pouvoir de Sassou Nguesso, après une guerre civile dont il est sorti victorieux.
En 2015, il a fait sauter le verrou constitutionnel qui imposait une limite d'âge et restreignait à deux le nombre de mandats présidentiels.
Cette année, les autorités ont refusé de délivrer à la conférence épiscopale - qui a émis des réserves sur la transparence du scrutin - l'accréditation lui permettant d'envoyer des observateurs dans les bureaux de vote. Elles ont également refusé d'accréditer une journaliste de RFI.
Un militant des droits humains, Alexandre Dzabana, a été arrêté dix jours avant le scrutin, accusé d'être impliqué dans une tentative de déstabilisation des institutions, selon le gouvernement.
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Le climat semble moins lourd qu'en 2016, lorsque la réélection contesté de Sassou Nguesso, avait déclenché une violente rébellion dans la région du Pool, entre Brazzaville et Pointe Noire. Frédéric Bintsamou, alias le pasteur Ntumi, qui en avait pris la tête, a souhaité cette année que l'élection se déroule "dans la paix, la transparence et le respect des règles du jeu".
Le secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres a appelé "toutes les parties prenantes à œuvrer en faveur d'un processus électoral apaisé".