Cameroun: une clinique fermée pour une facture de 6 millions FCFA adressée à un patient atteint du Covid-19

Une vue de Douala, la capitale économique du Cameroun.

Une vue de Douala, la capitale économique du Cameroun.. DR

Le 15/05/2020 à 12h06, mis à jour le 16/05/2020 à 13h26

Le ministre de la Santé reproche à une formation sanitaire exerçant à Douala, de prendre en charge des patients Covid-19 sans agrément. Il demande également des explications sur une facture d'un montant de 6 millions de FCFA adressée à l'un d'eux. Le gestionnaire de la clinique s'en défend.

Ce jeudi 14 mai, les autorités administratives ont procédé à la mise sous scellés de la clinique Marie O, à Douala, la métropole économique. Motif : «Non-respect de la réglementation en vigueur et atteinte à la morale publique», indique le document apposé à l’entrée de l'établissement.

Il s’agit en fait de l’exécution d’une instruction du ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie. Dans un courrier adressé au préfet du département du Wouri, le ministre évoque des activités en violation des dispositions de l’arrêté portant création et fonctionnement des centres spéciaux de prise en charge des patients atteints de Covid-19, pour exiger la fermeture de l’établissement.

La pomme de discorde est notamment une facture de plus de 6,3 millions de francs CFA (9.603 euros) adressée à un client (pour six jours d’hospitalisation en réanimation) et abondamment partagée sur les réseaux sociaux. Le 7 mai dernier, cette clinique a adressé une nouvelle facture au même patient, de 14.419.238 francs CFA toujours pour des soins en réanimation (du 22 avril au 7 mai).

«Ce énième scandale vient à la suite de ma lettre du 6 mai, par laquelle je sollicitais déjà, sous 72h, les explications de cette structure sur une facture de six millions. Aucune réponse à ce jour», précise le ministre sur son compte Twitter.

«Le problème, c’est que pour les médecins aujourd’hui, le malade est perçu comme un client et non un patient. Tout est bon pour lui extorquer de l'argent», commente un internaute. Cependant, le Syndicat national des médecins du Cameroun (Synamec) juge cette décision «arbitraire».

«Après avoir été édifié sur les différents cas cliniques et à la vue des dossiers médicaux qui nous ont été présentés, le bureau n’a relevé aucune irrégularité dans la PEC (prise en charge, Ndlr) et la pratique médicale. Étant donné qu’aucune enquête n’a encore été menée et que notre confrère n’a pas eu l’occasion d'être entendu par les institutions (Ordre national des médecins et ministère de la Santé, Ndlr), nous sommes surpris de la décision de la tutelle de la fermeture», indique un communiqué du syndicat, signé par son secrétaire général.

Pour sa part, le gestionnaire de la clinique s’est longuement expliqué sur les faits qui lui sont reprochés, dans sa réponse à la demande d’explication adressée par l’Ordre national des médecins du Cameroun (ONMC). Entre autres, au sujet de la prise en charge de patients Covid-19 sans agrément et les cas de surfacturations relayés par des patients. Il convient de rappeler que la prise en charge des cas atteints par le coronavirus est gratuite, selon les autorités camerounaises.

«Le cas concerné n’est pas Covid-19, bien qu’au début, pour des raisons liées au contexte, nous l’avons pris en charge dans les mêmes conditions de sécurité, en attendant confirmation», écrit le Dr Roger Ngoulla. Au sujet du montant de la facture, il évoque, entre autres, un prix raisonnable.

«Il s'agit de la médecine en clientèle privée d’accord parties. S’agissant d’une réanimation lourde, le caractère extrêmement dispendieux des prestations médicales fournies ne saurait constituer une surprise, quelle que soit la structure ou le pays (…) Les coûts que nous pratiquons se révèlent d’ailleurs moins élevés que dans le public», estime le concerné pour qui le client a été satisfait des prestations, d’où le règlement intégral de ladite facture.

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 15/05/2020 à 12h06, mis à jour le 16/05/2020 à 13h26