- La survivante
Nomonde Baatjies est assise dans son lit, chez elle, emmitouflée dans sa robe de chambre, toujours affaiblie après quatorze jours d'hospitalisation en soins intensifs.
"Je respirais tout le temps avec un masque à oxygène", se rappelle la grand-mère de 71 ans.
Diabétique, souffrant d'hypertension, elle a frôlé la mort après avoir contracté le Covid-19 en juin. "Ce dont j'avais peur, c'était la mort", explique-t-elle, se souvenant des nuits sans sommeil dans un service hospitalier "rempli".
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"Le matin, tu vois un nouveau patient, et pour l'autre patient qui était là, tu ne sais pas si il a quitté l'hôpital ou autre chose". Sa fille était persuadée de revoir sa mère "dans une boîte emballée dans du plastique". Mais Nomonde Baatjies a déjoué les pronostics et fait figure aujourd'hui de miraculée.
Une semaine après avoir quitté l'hôpital, elle retrouve un peu de force. "Hier (...), je me suis assise sur une chaise et j'ai appelé mes enfants: Apportez-moi de la farine, de la levure. Et, j'ai fait des beignets!"
- Le médecin
"On se retrouve avec 30 à 40% de personnel en moins pour traiter le double de patients", constate le docteur John Black de l'hôpital Livingstone.
Dans la province du Cap-Oriental, plus de 800 personnels de santé ont contracté le Covid-19. Vingt-quatre d'entre eux sont décédés.
Ici, le personnel dépend de donations d'équipements de protection. "C'est une bataille constante", résume John Black.
Le mois dernier, les agents de nettoyage ont entamé une grève pour protester contre leurs conditions de travail. Les détritus se sont accumulés dans les couloirs, les patients se sont retrouvés à dormir dans des draps sales.
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"On était déjà sous pression avant le Covid", soupire John Black. Alors "la pression supplémentaire laisse des traces". "Le gros problème est que nous ne savons pas combien de temps on va continuer à faire cela. Ce serait bien de savoir qu'il y a une ligne d'arrivée."
- L'infirmière
"Je l'ai appris hier", raconte une infirmière de 53 ans, au premier jour de son auto-confinement. La veille, elle a été testée positive au Covid-19.
"J'avais des frissons, de la fièvre", explique-t-elle, soulagée d'avoir des symptômes légers. Pour cette infirmière qui a souhaité garder l'anonymat, son résultat Covid n'est pas une surprise. La clinique où elle travaille a vu récemment affluer un nombre croissant de cas suspects.
"J'ai dû examiner une patiente qui était à bout de souffle, (...) ils ne veulent pas porter de masque quand ils ont tant de mal à respirer", témoigne l'infirmière.
Et le personnel n'a pas d'équipement adapté, dénonce-t-elle, expliquant avoir dû réutiliser des tabliers jetables.
"On les pulvérisait avec du gel hydroalcoolique à la fin de la journée et on ne savait pas si c'était efficace ou pas."
Le gouvernement devrait "se mettre en quatre pour s'assurer (...) qu'on reçoit de l'équipement tous les jours".
Après des mois de travail non-stop, elle s'est dit qu'elle allait profiter de la maladie pour se reposer. Mais "je ne dors pas. Peut-être que c'est par anxiété de se demander comment cela va finir".
- Le croque-mort
"Ils sont venus voir la dépouille", explique Sello Headbush, propriétaire d'un salon funéraire. "Mais on n'a pas le droit de montrer les dépouilles des morts du Covid".
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Sa petite entreprise familiale a connu une augmentation de 50% de son activité depuis le début de la pandémie.
Plusieurs fois par semaine, elle doit préparer les dépouilles de malades du Covid-19, qui sont consciencieusement enfermées dans deux housses mortuaires.
"D'ici, la dépouille va directement au cimetière où seulement mon personnel avec de l'équipement de protection est autorisé à toucher le cercueil", explique Sello Headbush, en soupirant.
"Cela cause beaucoup de détresse" aux familles.
Alors quand cela est possible, Sello Headbush s'arrange pour que le corbillard passe devant le domicile de la famille, pour qu'elle puisse prier devant le véhicule.