Sur les 68 plus grands barrages du monde actuellement en exploitation avec une capacité de production électrique installée supérieure ou égale à 2.000 mégawatts (MW), deux seulement sont africains. Il s'agit du haut barrage d’Assouan (Egypte) construit en 1967-1970 sur le Nil avec une capacité de 2.100 MW et du barrage de Cahore Bassa (Mozambique) réalisé sur le fleuve Zambèze en 1975 et d’une capacité de 2.075 MW, qui se classent respectivement aux 56e et 59e rangs mondiaux de par leur capacité de production électrique installée. Tous les autres barrages construits en Afrique ont des capacités inférieures à 2.000 MW.
Il faut dire que le continent a longtemps privilégié les centrales utilisant les ressources fossiles au détriment des énergies renouvelables, à l’exception de quelques pays comme l’Ethiopie, le Malawi, le Mozambique, la Namibie et la Zambie dont 90% des ressources énergétiques sont tirées des énergies propres et notamment des barrages hydroélectriques.
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Pourtant, le continent africain dont plus de 600 millions de sa population n’a pas accès à l’électricité dispose d’un potentiel hydroélectrique exceptionnellement important. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) l'évalue à 300 gigawatts (GW), soit l’équivalent de la production de 300 réacteurs nucléaires. Sur celui-ci, plus de 92% sont inexploités. Même son de cloche à la Banque africaine de développement (BAD) pour qui seulement 5% du potentiel hydroélectrique du continent sont exploités.
Pour autant, le recours aux barrages hydroélectriques reste globalement faible. En outre, les barrages construits en Afrique montrent des capacités de production électrique relativement basses.
Pourtant le recours aux barrages offre de nombreux avantages. D’abord, le coût de production de l’électricité est parmi les plus bas du monde (environ 0,009 euro le kilowatt/heure) comparativement aux énergies fossiles. Ensuite, ces infrastructures réduisent très fortement les émissions de gaz à effet de serre. De même, ces barrages mettent à l'abri des fluctuations des cours des hydrocarbures qui déséquilibrent les balances commerciales des pays trop dépendants des hydrocarbures pour la production d’électricité.
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Reste que pour de nombreux Etats, le coût élevé de la construction d’un barrage hydroélectrique, généralement 50% plus important qu’une centrale thermique à gaz ou à charbon du fait des infrastructures connexes (canaux, routes, etc.), le délai de réalisation beaucoup plus long que celui d’une centrale thermique à cause des innombrables études d’impacts, et les impacts environnementaux constituent des obstacles majeurs à la mise en place de barrages hydroélectriques.
Du coup, plus un barrage est grand, plus son coût est élevé et plus son financement pose des problèmes. Toutefois, les grands barrages présentent de nombreux mérites. D’abord, ils permettent de faire des économies d’échelles et génèrent des coûts unitaires de production moins élevés. En plus, ces infrastructures permettent de combler plus rapidement le déficit énergétique d’un pays.
Ainsi, grâce aux deux barrages GIBE III et La Grande Renaissance, l’Ethiopie va produire 8.320 MW supplémentaires. Ce qui permet au pays d’atteindre son autosuffisance énergétique, de faire face à sa forte croissance et d’exporter de l’énergie vers les pays voisins. Ainsi, selon les projections, le pays pourra tirer jusqu’à 700 millions d’euros de recettes des exportations d’électricité du barrage de La Renaissance.
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Du coup, de plus en plus de pays africains font le pari des grands barrages. Et les projets se multiplient.
Ainsi, l’Ethiopie a construit et mis en service en 2016 le barrage Gibe III, le plus haut barrage d’Afrique, un ouvrage d’art pharaonique d’une capacité de 1.870 MW d’électricité, soit le 3e barrage le plus important d’Afrique en cours d’exploitation. Le pays est en train de finaliser un barrage d’une capacité de 6.450 MW et plus de 6 milliards de dollars d’investissement.
Pourtant, l’Ethiopie est loin de détenir le plus important potentiel de développement hydroélectrique du continent. La palme revient à la République démocratique du Condo (RDC) dont 200 sites répertoriés représentent un potentiel de 100 GW. Et le grand barrage Inga a lui seul peut résorber plus de la moitié du déficit énergétique de l’Afrique subsaharienne. Le site dispose du plus grand potentiel hydroélectrique du monde avec une capacité potentielle de plus de 43.000 MW, soit environ le double du plus grand barrage hydroélectrique du monde, le barrage chinois des Trois-Gorges et ses 22.500 MW, en exploitation depuis 2012.
Ainsi, la RD Congo s’est-elle engagée à réaliser le barrage Inga III avec une capacité de 4.800 MW pour un investissement de 6 milliards de dollars. De même, plusieurs autres projets de grands barrages sont lancés, dont Cuanza en Angola de 2.172 MW et d’un coût de 4,5 milliards de dollars, Stiegler’s Gorge en Tanzanie pour 2.100 MW et 2 milliards de dollars d’investissement, Grand Eweng au Cameroun de 1.800 MW pour un financement de 3 milliards de dollars, Batoka Gorge Zambie-Zimbabwe de 1.600 MW pour 2,8 milliards de dollars, etc.
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Seulement, la réalisation de ces barrages rencontre des problèmes de financements. Ainsi, à cause du financement et d’innombrables autres problèmes, la première tranche du barrage D’Inga III en RD Congo, second plus important barrage en termes de capacités de production électrique en Afrique après celui de La Renaissance en Ethiopie actuellement en cours de finalisation, tarde à voir le jour, malgré l’implication de l’Afrique du Sud et de la RD Congo aux côtés des acteurs miniers de la région du Katanga et de nombreux bailleurs de fonds.
Il faut dire que face aux coûts de financement de ces infrastructures colossales, les budgets de nombreux Etats africains ne suivent pas. Ainsi, pour le projet éthiopien qui dépasserait les 6 milliards de dollars, au moment où certains parlent de 8 milliards de dollars, l’Etat a recouru à la fibre nationaliste de sa population via des souscriptions à des obligations et à des impôts. En plus, le pays a bénéficié des apports de ses banques et du financement chinois.
Pour les autres pays africains, hormis les financements PPP -Partenariats publics-privés- pour des barrages petits ou moyens, le recours à la Chine reste l’alternative la plus usitée au niveau du continent pour la réalisation des barrages d’une certaine taille. Les Chinois sont devenus aujourd’hui les principaux bras financiers des barrages en cours de construction en Afrique en proposant des solutions clés en main. Ce n’est pas pour rien que la très grande majorité des barrages en cours de construction au niveau du continent sont réalisés par des entreprises chinoises. C’est le cas de Soubré (Côte d’Ivoire), Souapiti et Kaléta (Guinée), Cuanta (Angola), Song Dong (Cameroun), Mitzic (Gabon), etc.
C’est dire que la Chine, qui dispose d’un des plus important réseau de barrages hydroélectriques au monde et de l’expérience dans la réalisation de tels ouvrages, va contribuer à l’accélération du développement de l’hydroélectricité au niveau du continent.
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Outre les prêts à taux d’intérêt bas octroyés par des banques publiques chinoises, certains financements sont réalisés en contrepartie de matières premières, ce qui fait que les pays africains ne déboursent pas souvent de devises pour la construction des barrages. En outre, contrairement à la Banque mondiale, à la Banque africaine de développement ou à d’autres institutions, les Chinois sont peu regardants sur les impacts environnementaux et sociétaux des barrages.
Le seul véritable défaut des barrages chinois en Afrique est qu'ils sont entièrement réalisés par la partie chinoise qui apporte même sa main-d’œuvre. Du coup, les pays africains ne bénéficient d'aucun transfert de technologies. D'où une dépendance vis-à-vis des ingénieurs chinois pour la maintenance de ces ouvrages.