Franc CFA. Le FMI enfonce le clou: jusqu'à 34% du PIB partis en fumée

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Le 25/10/2016 à 11h55, mis à jour le 25/10/2016 à 12h03

Dans son rapport paru aujourd’hui, mardi 25 octobre 2016, le Fonds monétaire international jette un nouveau pavé dans la mare en affirmant que le régime du CFA coûte des points de croissance aux pays l’ayant adopté, sans toutefois les nommer. En 15 ans, entre 25% et 34% du PIB sont partis en fumée.

Après la sortie très médiatisé de l’adjoint de Ban Ki-moon qui a dénoncé le caractère "désuet" du franc Cfa, et celle du livre très critique d’éminents économistes africains sur le même sujet, voilà que le FMI prend part au débat. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ses conclusions se passent de tout commentaire, tant elles vont dans le sens du constat selon lequel le CFA freine le développement des pays africains. A aucun moment, le FMI ne parle directement de la monnaie des ex-colonies françaises, lui préférant le terme édulcoré de "régime de change fixe". L’allusion au CFA est à peine voilée, sachant qu’en Afrique subsaharienne, 15 des 25 pays ayant un régime fixe appartiennent à cette zone monétaire. Le FMI affirme, en substance que le franc CFA coûte jusqu’à 2 points de croissance aux pays l’ayant adopté. 

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"En termes de croissance, les résultats ont été contrastés, variant selon les régimes et les périodes", affirment les économistes du Fonds monétaire international qui ont rédigé le rapport paru ce mardi 25 octobre et intitulé "Perspectives économiques régionales : Afrique subsaharienne, une croissance à plusieurs vitesses".

1 à 2 points de croissance

Ils constatent surtout qu’avant 2000, "la croissance par habitant ne divergeait guère entre les pays en fonction du régime de change choisi". Mais les 15 dernières années vont connaître un changement majeur. Puisque "depuis 2000 environ, les pays d’Afrique subsaharienne dotés de régimes plus flexibles affichent des taux annuels de croissance de la production par habitant supérieurs de 1 à 2 points à ceux des pays à régime fixe". Le constat est donc fait que le CFA freine le développement des pays l’ayant adopté.

Théoriquement, après analyse, une moyenne de 1,5 point de PIB perdu sur 15 ans signifie 25% de son PIB en moins. Alors que 2 points de PIB en moins correspondent à 34% de la richesse qu'est sensé produire une nation. Est-ce que c’est ce que des pays comme la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Cameroun, le Congo ou le Gabon ont perdu ? Le FMI ne le dit pas ouvertement, mais on le comprend aisément.

Le CFA tue la compétitivité

L’institution de Bretton Woods affirme en plus que "cet écart de croissance n’est pas constaté dans d’autres pays en développement" qui ont des régimes de change différent. Et les experts de poser la question qui tue: "à quoi tient donc ce différentiel ?" Leur réponse est sans équivoque: "globalement, il semble imputable au fait que certains pays à régime fixe (comme la zone CFA, ndlr) ont des taux de change réels moins compétitifs que les pays à régime flexible ou intermédiaire". En d’autres termes, en se cantonnant à maintenir le régime du franc Cfa dans sa forme actuelle, les gouvernants africains sont complices d’une absence de compétitivité de leurs économies respectives. Ces mêmes dirigeants ne veulent malheureusement pas ouvrir le débat concernant la nécessaire réforme du franc Cfa.

D'éminents experts l'ont déjà dit

Dans sa sortie, fin septembre, Carlos Lopes, l’adjoint du secrétaire général des Nations Unies, dénonçait un mécanisme "désuet". L’homme sait bien de quoi il parle, puisqu’il est également le secrétaire exécutif de la Commission économique de l’ONU pour l’Afrique. Il fait également partie du think tank mis en place par Paul Kagamé, le président rwandais, devant faire des propositions pour la réforme de l’Union africaine.

De même, quatre éminents économistes africains avaient dénoncé le régime actuel du Franc Cfa dans leur ouvrage paru fin septembre, intitulé "Sortir l’Afrique de la servitude monétaire. À qui profite le franc CFA ?". Il ne s’agissait pas de n’importe qui, puisqu’il y a comme chef de file Kako Nubukpo, ancien ministre des Finances togolais, en charge actuellement de la Francophonie économique. Les autres co-auteurs de l’ouvrage sont notamment Bruno Tinel, maître de conférences à l’université Paris 1-Panthéon Sorbonne, Demba Moussa Dembelé, directeur du Forum africain des alternatives et coordonnateur de l’Africaine de recherche et de coopération, ou encore Martial Ze Belinga, économiste et sociologue, rédacteur en chef du site Afrikara.com.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 25/10/2016 à 11h55, mis à jour le 25/10/2016 à 12h03