D’ici quelques décennies seulement, 2050 pour les plus optimistes, dès 2020 pour les pessimistes, la planète devrait voir la disparition des pieds de cacaoyers. Du moins il n’en restera que de très rares endroits où en trouver. Ce n’est pas une prédiction, mais les résultats d’études menées par des centres de recherches américains et européens.
La plus récente de ces études est celle de la National oceanic and atmospheric administration, une agence américaine de surveillances des côtes, des océans et de l’atmosphère, qui a publié son rapport en janvier. Selon cette étude, le cacaoyer est une plante exigeante qui pousse dans des zones spécifiques nécessitant une température stable, une forte humidité du sol, des pluies abondantes ou encore un sol riche en azote. Et tout changement de ces conditions environnementales devrait signer la fin inéluctable du cacao.
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Or la menace semble se préciser. La température mondiale devrait grimper d’ici 2050 de 2,1 degrés Celsius, selon les estimations du Groupe intergouvernemental d’études sur le climat (GIEC). Ce qui devrait entraîner une forte évaporation de l’eau contenue dans le sol et les arbres. Et en l’absence fort probable de précipitations abondantes pour compenser ce manque, ou des pluies trop abondantes et irrégulières, les cacaoyers devraient pâtir de ce nouveau contexte de «stress hydrique».
Dans un reportage diffusé la semaine dernière, la chaîne française France 2 a pu recueillir le témoignage de paysans qui confirment une chute de la productivité depuis quelques années. Il est vrai que dans un pays essentiellement agricole comme la Côte d’Ivoire, qui a perdu les deux tiers de sa forêt, la baisse de la pluviométrie a déjà un impact significatif. Et pour anticiper cette donne, la chaîne indique même que certains industriels en Europe ont déjà commencé à remplacer les fèves de cacao par des noisettes ou des amandes dans leurs recettes.
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Si cet effet du dérèglement climatique est donc le plus largement évoqué, certains chercheurs remettent toutefois en cause l’éventuelle disparition du cacao. Ces derniers arguent des résultats de la recherche qui devraient donc permettre de proposer de nouvelles variétés plus adaptées à cette évolution du climat, ou encore la mise en place de nouvelles méthodes culturales. Mais mieux, certaines recherches tablent sur la modification de l’ADN des plants de cacao qui devraient permettre de réussir cette transition.
La perspective de la rareté du cacao, qui met en branle les chercheurs occidentaux, est à mille lieues des préoccupations des Ivoiriens, du moins en apparence.
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Premier producteur mondial de fèves de cacao avec environ 40% de l’offre mondiale, le pays ne s’est pas particulièrement penché, officiellement en tout cas, sur la question depuis les premières alertes sur la menace climatique au début des années 2010.
Abidjan reste pourtant dépendant de cette culture, contrairement à ses voisins ouest-africains avec lesquels la Côte d’Ivoire représente 70% de la production mondiale, à savoir le Ghana, devenu pays pétrolier, ou encore le Nigeria, où la culture du cacao reste marginale. Le cacao, c’est en effet, officiellement 11,5% du PIB ivoirien et 42,8% des recettes d’exportation, selon les chiffres du ministère en charge de l’Industrie.