Guinée: après la grève et les émeutes, Condé fait tomber des têtes

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Le 28/02/2017 à 12h39, mis à jour le 28/02/2017 à 15h21

Dans un décret publié lundi 27 février par les médias d'Etat, le président Alpha Condé a procédé à un mini-remaniement de son gouvernement. Les ministres de la Fonction publique, de l'Enseignement pré-universitaire et de l'Environnement ont été limogés, victimes des récents événements.

Le décret n'a pas précisé les raisons de ces limogeages. Mais à Conakry, les départs de Sékou Kourouma et d'Ibrahima Kourouma étaient attendus. Respectivement ministres de la Fonction publique et de l'Enseignement pré-universitaire, ils étaient directement accusés lors de la grève des syndicats de l'éducation qui a prorogé les deux semaines de vacances forcées décrétées auparavant par le gouvernement pour le déploiement de 5 000 nouveaux enseignants. Les violentes manifestations qui ont découlé de cette grève ont fait sept morts à Conakry, une trentaine de blessés et d'importants dégâts matériels.

Alors qu'il s'était donné la mission de mener la réforme de l'administration publique guinéenne, Sékou Kourouma a fait l'objet de toutes les critiques et accusations. L'ancien ministre de la Fonction publique est surtout accusé d'avoir mal négocié la nouvelle grille salariale des enseignants et d'avoir bâclé le concours de recrutement des 5 000 nouveaux enseignants. Sur le second point, des enseignants contractuels non engagés par l'Etat ont dénoncé durant des semaines des magouilles. Certains d'entre eux ont indiqué à la presse guinéenne, avec document à l'appui, que des candidats avaient été enrôlés dans la fonction publique avant même que le concours n'ait lieu. Encore plus grave, Sekou Kourouma aurait engagé secrètement sept membres de sa famille dans la fonction publique.

Quant à Ibrahima Kourouma, ministre de l'Enseignement pré-universitaire depuis 2011, il était accusé d'appuyer la magouille de son collègue Sekou. C'est d'ailleurs lui qui aurait pris la décisionde faire engager plus de 1.000 enseignants contractuels dans la fonction publique. Ces engagements ont été les détonateurs de la grève qui a secoué tout le pays. Par ailleurs, Ibrahima Kourouma a été plusieurs fois accusé dans des affaires de malversations financières dont certaines liées à l'organisation des examens nationaux. Des accusations que le désormais ex-ministre de l'Enseignement pré-universitaire a toujours niées.

" Nous demandons les départs des deux Kourouma ", avaient scandé des syndicalistes, mais aussi des parents d'élèves, durant la période de crise. Faut-il signaler que Sekou Kourouma a été remplacé par son conseiller principal, alors qu'Ibrahima a vu sa place confiée à un directeur communal de l'éducation. " Alpha Condé débarrasse le gouvernement Youla de son talon d'Achille ", a titré le site Guinee7 tout de suite après la publication du décret. Comme pour approuver que les deux ministres ne soient plus appréciés à la tête du gouvernement. Pourtant Ibrahima Kourouma est un ministre qu'Alpha Condé a souhaité reconduire après sa réélection, contre l'avis de certains. 

Le remplacement de madame Christine Sagno par son chef de cabinet à la tête du ministère de l'Environnement et des Eaux et Forêts était inattendu en revanche. Son limogeage reste encore difficile à expliquer. Il est néanmoins su que Sagno éprouvait des difficultés à gérer les grands dossiers de cet important ministère de l'Environnement.

Par Mamourou Sonomou (Conakry, correspondance)
Le 28/02/2017 à 12h39, mis à jour le 28/02/2017 à 15h21