Shebab, Boko Haram, Nusrat al-Islam, qui sont ces groupes qui ensanglantent l’Afrique?

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Le 05/11/2017 à 16h21, mis à jour le 06/11/2017 à 11h49

Qui sont les Shebab, Boko Haram et Nusrat al-Islam wal Muslimin, les principaux groupes terroristes africains? Voici ce que l'on sait sur leurs sources de financement, leur modus operandi et le nombre de leurs combattants.

Le samedi 14 octobre 2017, un attentat à la voiture piégé frappait Mogadiscio, capitale de la Somalie. Il s’agit de l'attentat le plus meurtrier qu’ait connu le continent africain depuis l’apparition des groupes terroristes à idéologie religieuse. Il a fait plus de 358 morts, 228 blessés et 56 disparus. L’attentat n’a pas été revendiqué. Certainement à cause du nombre élevé de civils innocents tués durant l’explosion. Mais tous les yeux sont rivés sur les Shebab, groupe terroriste somalien qui combat depuis des années les régimes en place.

Un groupe qui rivalise avec Boko Haram, désigné comme le groupe terroriste le plus sanglant en Afrique subsaharienne, loin devant le dernier né des groupes terroristes sur le continent, Nusrat al-Islam wal Muslimin.

Mais qui sont ces groupes terroristes à idéologie religieuse qui ensanglantent l’Afrique subsaharienne? Quels sont leurs idéologies, leurs affiliations, le nombre de leurs combattants, leurs sources de financement?

Les Shebab somaliens: l’attentat le plus sanglant d’Afrique

Même s’il n’est pas revendiqué, l’attentat meurtrier du samedi 14 octobre dernier porte la marque du groupe islamiste somalien Harakat al-Shabab al-Moudjahidin, plus connu sous l’appellation de «Shebab» ("jeunes" en arabe). 

Issu du regroupement de plusieurs groupes islamistes somaliens de l’Union des tribunaux islamiques qui faisaient la loi à Mogadiscio, lors de la guerre entre factions tribales au niveau de la capitale somalienne, le mouvement terroriste «Shebab» a été créé en 2000.

Les Shebab ont été délogés de Mogadiscio par une coalition des pays voisins (Éthiopie, Kenya et Ouganda) soutenue par les États-Unis.

Du point de vue idéologique, les Shebab ont pour objectif d’instaurer un État islamique fondé sur la charia. Ils sont affiliés au groupe Al-Qaida. Toutefois, contrairement à Boko Haram, les Shebab ne ferment pas les écoles dans les régions qu’ils contrôlent et ne sèment pas le désordre, d’où leur acceptation par les populations des zones rurales où ils font régner l’ordre via des tribunaux islamiques.

Ne pouvant faire face à armes égales avec les forces étrangères et à leurs 22.000 soldats en Somalie, dont ceux des pays voisins et l’Union africaine, les Shebab recourent aux attentats dans la capitale somalienne et essaient autant que possible d'exporter la guerre dans les pays voisins.

Affiliés à la mouvance Al-Qaida, à laquelle ils ont fait allégeance, les Shebab ont pour marque de fabrique l’attentat-suicide ou la voiture piégée. Parmi leurs faits d’armes, en plus des nombreux attentats sanglants à Mogadiscio, il y a l’attaque contre le centre commercial Westgate de Nairobi, au Kenya, en septembre 2013, qui avait fait 67 morts. Toutefois, l’attaque du samedi 14 octobre dernier, perpétrée par le biais d’un camion bourré d’explosifs qui a fait plus de 358 morts et 228 blessés, demeure l'attentat le plus sanglant attribué aux Shebab.

Selon les estimations, les Shebab représentent une force de quelque 10.000 membres.

À l’instar des autres groupes terroristes, les Shebab se financent grâce au soutien de certaines associations et ONG à but non lucratif, au trafic de drogue et d’armes, au soutien de la diaspora somalienne et érythréenne ou aux actes de piraterie.

Boko Haram: plus de 20.000 morts et 2,6 millions de déplacés

Boko Haram, groupe fondé en 2002 à Maiduguri par le prédicateur Mohamed Yusuf, est un mouvement insurrectionnel et terroriste d’idéologie salafiste djihadiste. Il s’agit au départ d’un groupe prônant un islam radical et rigoriste, hostile à toute influence occidentale, d’où son nom: Boko (book/livre) Haram (interdit), pour signifier le «rejet d’un enseignement perverti par l’occidentalisation». Son idéologue considère que l’école occidentale détruit la culture islamique. Très rigoriste, le groupe condamne la mixité des sexes, le relâchement des mœurs, la corruption, l’utilisation du calendrier grégorien, etc.

Son objectif idéologique est l’instauration d’un califat islamique et l’application de la charia dans le nord du Nigeria.

Pour y arriver, le groupe lance en 2009 une insurrection armée. Après la mort de son guide fondateur, la même année, Abubakar Shekau prend la relève et le groupe se rapproche des thèses djihadistes d’Al-Qaida.

En mars 2015, dans le sillage de la percée de l’État islamique, Boko Haram, dont le nom officiel est le Groupe sunnite pour la prédication et le djihad, prête allégeance à Abubakr Al-Baghdadi et prend le nom d’État islamique en Afrique de l’Ouest.

Toutefois, en août 2016, Abubakar Shekau est écarté pour son extrémisme et sa violence. Le groupe se scinde en deux parties et l’État islamique décide de remplacer Abubakar Shekau par Abou Mosab al-Barnaoui. Shakau reprend son ancien nom et ses opérations sanglantes.

Boko Haram est considéré comme le groupe terroriste le plus sanglant du continent africain. Il est à l’origine de nombreux massacres, enlèvement, attentats suicides au Nigeria, Cameroun, Niger et Tchad. Ces attaques touchent aussi bien les membres des forces de sécurité que des civils. Selon les estimations, Boko Haram a fait plus de 20.000 morts et plus de 2,6 millions de déplacés. Les pertes occasionnées par le groupe dans les économies des pays touchés sont estimées à 5,2 milliards d’euros par la Banque mondiale.

L’un des actions marquantes de Boko Haram reste l’enlèvement de 276 lycéennes Chibok en avril 2014, dont certaines sont toujours détenues par la nébuleuse.

Pour combattre Boko Haram, le Nigeria, le Cameroun, le Niger et le Tchad ont mis en place des forces communes. Toutefois, si ce groupe a perdu du terrain, il contrôle encore des pans importants du Nigeria.

Côté financement, Boko Haram bénéficie des dons de fidèles, du soutien de certains hommes politiques du Nord et de fondations et peut compter sur ce que lui rapportent les attaques de banques, le trafic d’essence et de drogue, etc.

On estime aujourd’hui que les forces de Boko Haram avoisinent les 30.000 combattants.

Nusrat al-Islam wal Muslimin: une liste de 11 pays ennemis

À côté de Boko Haram et des Shebab somaliens, le groupe Jammat Nusrat al-Islam wal Muslimine «Groupe pour le soutien de l’islam et des musulmans» (GSIM) est de création très récente. Créé le 1er mars 2017, le groupe est né de la fusion de plusieurs groupes terroristes du Sahel: Ançar Dine, Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), la Katiba de Macina et la Katiba Al-Mourabitoune. Le GSIM constitue en quelque sorte un parapluie pour tous les groupes djihadistes actifs au nord Mali. Ces différentes organisations d’obédience salafistes étaient étroitement liées avant leur fusion et collaboraient dans diverses opérations.

Après l’annonce de la création de ce groupe, ces dirigeants ont prêté allégeance à l’émir d’Al-Qaida Ayman al-Zawahiri et désigné Iyad Ag Ghali comme le chef du GSIM.

L’objectif du GSIM est, selon Ag-Ghali, de «réveiller la Oumma, d’appeler la Oumma à se mobiliser, pour qu’elle mette fin à l’oppression et combatte l’occupant français, ses associés et ses collaborateurs qui occupent nos terres, qui corrompent notre religion et notre monde, et qui exploitent nos ressources et nos moyens de subsistance, jusqu’à ce qu’ils quittent notre pays, et alors nous répandrons la justice et la Shura (concertation) et gouvernerons notre pays selon la loi d’Allah».

Cinq jours après sa création, le groupe revendique sa première attaque au Mali à Boulikessi qui sera suivie par plusieurs autres attaques.

Le 5 juillet, le GSIM revendique sa première attaque au Niger, affirmant ainsi sa volonté de s’imposer au niveau du Sahel où il doit faire face à une force commune en gestation, la Force G5 Sahel, regroupant 5.000 hommes des 5 pays membres: Mauritanie, Mali, Niger, Burkina Faso et Tchad.

Selon Iyad Ag-Ghali, la stratégie militaire de Nusrat al-Islam wal Muslimin est «d’élargir sa présence dans un plus grand espace géographique, d’affaiblir l’ennemi et de le cibler partout où il se trouve» via des actions armées basées sur un modèle de guérilla.

Le GSIM a dressé une liste de 11 pays «ennemis»: États-Unis, Allemagne, France, Pays-Bas, Suède, Tchad, Guinée, Côte d’Ivoire, Burkina Faso, Sénégal et Niger. C’est ce groupe qui détenait les 11 soldats maliens qui seraient morts lors d’une tentative de libération menée par les forces Barkhane française il y a une semaine.

C’est certainement le groupe qui compte le moins de combattants, comparativement aux Shebab et à Boko Haram.

Outre l’apport d’al-Qaida, le groupe se finance via divers trafics, notamment le trafic de drogue mais aussi d'armes et de carburant, le braconnage, les rançons tirées des enlèvements d’étrangers, le soutien des ONG et d'associations à but non lucratif.

C’est aussi le groupe qui a fait le moins de victimes du fait de sa création récente. Toutefois, en tenant compte des morts provoquées par les différents groupes constituant le GSIM depuis 2012, date de l’invasion du Mali, son bilan macabre est important.

Par Moussa Diop
Le 05/11/2017 à 16h21, mis à jour le 06/11/2017 à 11h49