Pas une semaine ne passe sans qu’une compagnie aérienne africaine n’annonce des acquisitions ou des commandes d’avions visant à rajeunir et à agrandir sa flotte. La tendance est particulièrement manifeste chez les plus importantes compagnies aériennes du continent: Ethiopian Airlines, EgyptAir, Royal Air Maroc, Air Algérie, etc.
Cette course s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, il y a la libéralisation du ciel africain annoncée par l’Union africaine et qui pourrait connaître un début de matérialisation à partir de la fin du mois de janvier courant. Plusieurs grandes compagnies aériennes du continent dont Ethiopian Airlines, EgyptAir, Kenyan airways et South African Airlines soutiennent cette création d’un Marché unique de transport aérien africain, un des projets phare de l’Agenda 2063 de l’Union africaine. Un projet pour lequel 23 pays du continent ont déjà donné leur accord et qui pourrait être lancé en marge du 30e sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine qui se tiendra du 22 au 29 janvier 2018 à Addis-Abeba, en Ethiopie.
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Ensuite, il y a la volonté des compagnies aériennes africaines de rajeunir leurs flottes avec des avions de dernière génération plus maniables, offrant des commodités à même d’améliorer la qualité des services (wifi), et surtout plus compétitifs avec une moindre consommation de carburants (kérosène) et donc offrant plus de rentabilité. Les avions de dernière génération consomment globalement moins de 20% de carburant que les vieux avions de même capacité.
En outre, bien qu’il soit encore très modeste, le transport aérien africain qui ne représentant que 3% du transport mondial de passagers, alors que l’Afrique abrite 15% de la population du globe, est appelé à croître d’environ 6% l’an au cours des 20 prochaines années.
Ainsi, grâce à cette évolution, alors qu’en 2015 on comptait 111 millions de passagers transportés par les compagnies aériennes africaines au niveau du continent, ce nombre devrait connaître une forte hausse grâce à l’augmentation de la classe moyenne africaine, la baisse des prix des billets résultant de la libéralisation du transport aérien et la plus grande connectivité entre les pays grâce au développement de nouveaux réseaux de liaison entre pays africains.
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Ainsi, selon l'Association internationale du transport aérien (IATA) , sur la période 2015-2035, le nombre de personnes transportées au niveau du continent par les compagnies aériennes africaines devrait croître de 173% pour atteindre 303 millions de passagers. De quoi aiguiser l’appétit des pavillons nationaux qui ont les moyens d’accroître leur flotte pour tirer profit de cette hausse annoncée du trafic en Afrique.
Enfin, c’est uniquement avec des flottes de taille que les grandes compagnies aériennes africaines pourront faire face aux mastodontes étrangers (Air France-KLM, Emirates, Turkish airlines, Brussels airlines, Qatar airways, Etihad airways, etc) fortement présents sur le secteur long-courrier en Afrique.
Selon les prévisions de Boeing, la flotte des compagnies africaines devrait doubler pour atteindre près de 1.450 avions en 2035. Et le fait est que les grosses compagnies africaines multiplient les commandes et les achats d’avions.
- Ethiopian airlines: un leader ambitieux
Le leader du transport aérien en Afrique, Ethiopian Airlines, qui opère avec plus de 93 avions d'une moyenne d’âge de cinq ans, dont 20 Boeing 787 Dreamliner, déployés sur les lignes long-courriers, compte ainsi fortement accroître sa flotte dans le cadre de son plan stratégique «Vision2025».
La compagnie se prépare à acquérir 19 Airbus A350-900 (un total de 24 commandés), 4 Boeing 787-9 et 5 Bombardier Q400. Elle attend aussi la livraison de 30 Boeing 737 Max 8.
Depuis 2010, Ethiopian Airlines a investi plusieurs milliards de dollars pour acquérir 32 nouveaux avions et s’est fixée comme objectif de disposer d’une flotte de 150 avions à l’horizon 2025.
Avec cette flotte, Ethiopian Airlines qui dessert plus de 100 destinations internationales sur cinq continents compte renforcer son réseau de dessertes aussi bien en Afrique que vers le reste du monde.
- Royal Air Maroc: des commandes de qualité
Après une période de restructuration réussie, Royal Air Maroc, qui ambitionne d’être la première compagnie africaine en termes de qualité de service, de qualité des avions et de connectivité, a entamé la modernisation et le renforcement de sa flotte d’avions.
Dans ce cadre, Boeing a dévoilé tout dernièrement une commande de la RAM portant sur 4 Boeing 787-9 pour un montant de 1,1 milliard de dollars. Des avions de dernière génération qui viendront renforcer les 5 Dreamliner qu’exploite déjà la compagnie marocaine.
Par ailleurs, selon des sources sûres, la compagnie marocaine a commandé auprès du constructeur américain 4 Boeing 737-MAX, des avions de la 4e génération de cette gamme. Ces appareils seront livrés à partir de décembre 2018.
Avec la livraison de tous ces appareils, la RAM disposera d’une flotte 64 appareils. Avec plus de 850 vols par mois et 32 destinations couvertes au niveau du continent, la RAM confirme ainsi son rang d’une des compagnies les mieux équipées d'Afrique.
- Air Algérie: 35 appareils à acquérir d’ici 2020!
Air Algérie, qui compte actuellement 58 appareils de ligne (35 Boeing, 15 ATR et 8 Airbus), s’est fixé comme objectif d’accroître et de rajeunir sa flotte avec l’acquisition de 35 nouveaux avions d’ici 2025. Il s’agit d’une annonce faite dernièrement par le directeur général d’Air Algérie, Bakhouche Allleche. Toutefois, celle-ci avait déjà été annoncée il y un peu plus de deux ans sans connaître de concrétisation à cause de la crise financière que traverse le pays.
En détail, sur ces 35 avions annoncés, 15 avions viendront grossir la flotte existante alors que les 20 autres seront destinés à remplacer les avions vieillissants. Air Algérie envisage d’acquérir des avions Bombardier (CSeries), ATR 72-600 et des Embraer.
Avec cette flotte, la compagnie qui disposera de 73 appareils à l’horizon 2025, envisage d’étendre son réseau de pays desservis en Afrique (Tchad, Cameroun, Gabon, etc.) et ouvrir d’autres lignes, vers les Etats-Unis notamment si la Federal aviation administration (FAA), agence gouvernementale américaine chargée des règlementations et des contrôles concernant l’aviation civile aux Etats-Unis, accorde son certificat à l’autorité d’aviation civile algérienne.
EgyptAir: d'importantes commandes
EgyptAir, qui détient la seconde flotte africaine, a annoncé dernièrement avoir lancé une commande de 12 avions CS 300 au constructeur canadien Bombardier en marge du salon de Dubaï. Parallèlement, la compagnie égyptienne a aussi révélé des droits d’achats pour 12 appareils supplémentaires, confirmant ainsi une commande de 24 appareils au constructeur canadien pour un montant global estimé à 2,2 milliards de dollars.
Avant cette annonce, EgyptAir avait également annoncé sa décision d’acquérir 6 nouveaux avions Boeing 787-9 Dreamliner qui sont considérés comme les moins gourmands en kérosène de leur catégorie. Il s’agira des premiers Dreamliner de la compagnie égyptienne qui a également commandé 15 Airbus A320neo. Au total, les commandes fermes et prévues de la compagnie égyptienne s'élèvent à 45 appareils.
Ces achats rentrent dans le cadre du rajeunissement de la flotte égyptienne qui prévoie le remplacement de 25 appareils.
Outre ce rajeunissement, EgyptAir compte accroître sa flotte qui compte actuellement 60 avions.
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De nombreuses autres compagnies africaines, plus modestes (Air Ivoire, Asky, RwandAir, etc.), se sont également lancées dans des acquisitions d‘avions pour renforcer leurs flottes.
Reste que cette course à la taille fait des exceptions. En effet, South African Airlines, l’une des grandes compagnies aériennes africaines, malgré une injection de 10 milliards de rands (environ 665 millions d’euros) reste lourdement endettée et sous-capitalisée. Elle a été obligée de se séparer de 5 avions et de réduire ses programmes de vols de 23% pour réaliser des économies.