L’assaut meurtrier lancé par des combattants djihadistes contre un énorme camp retranché de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA), le 14 avril dernier, semble avoir marqué les esprits et laissé des stigmates, aux yeux de nombreux observateurs.
Le patron de l’opération "Barkhane", le général de division Bruno Guibert, a récemment exprimé une vive inquiétude en parlant du processus d’opérationnalisation de la force antiterroriste du G5 Sahel. Ce militaire de haut rang constate avec une pointe d’amertume que "la communauté internationale fait beaucoup de promesses, mais peine à les concrétiser".
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Convaincu que le Sahel est dans une situation d’urgence sécuritaire, le haut gradé enchaîne: "dernière ce G5, il y a la prise en compte parmi les pays de la région, d’une menace mortelle commune. Chacun à sa façon a compris que le terrorisme met en danger la survie même de son régime. Bien sûr, au regard de la faiblesse des Etats, le remède prendra du temps. Mais il s’agit bien, via la mutualisation nécessaire des efforts, d’une réponse africaine à un défi régional. Le principe d’une brigade conjointe opérant prioritairement dans les zones frontalières, foyers essentiels du fléau djihadiste, ne manque pas de pertinence".
La vraie difficulté, c’est que cette force doit être fournie par des armées dont les Etats figurent parmi les pays des plus pauvres de la planète.
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"Voilà huit (8) mois que la décision a été prise, et il faudrait que cette force soit opérationnelle. On parle de la nécessité de réunir 400 millions d’euros pour atteindre cet objectif. Mais hormis ce qu’a donné la France sous forme d’équipements, il n’y a pas grand-chose qui a été fait. Or c’est maintenant que nos partenaires africains ont besoin d’aide pour mettre sur pied une force conjointe qui n’a même pas de budget de fonctionnement", poursuit Bruno Guibert.
Une telle sortie de la part d'un militaire est inhabituelle. Les gradés préfèrent généralement se taire et laisser les déclarations publiques aux décideurs politiques.
En l'occurrence, on peut supposer que le commandant en chef de la force française au Sahel a remué 1.000 fois sa langue dans sa bouche avant de tenir un tel discours, au regard d'une situation qui, malgré de multiples réunions entre chefs d’Etats du G5 Sahel, partenaires occidentaux et bailleurs de fonds, n'évolue pas.