Des perquisitions ont été opérées le lundi 14 mai au bureau du banquier Mohamed ould Bouamatou et au domicile de son bras droit Mohamed ould Debagh, tous les deux en exil et sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis le 1er septembre 2017. Cette descente surprise de la police mauritanienne entre dans le cadre d’une "instruction pour corruption" visant également 12 ex-sénateurs, des journalistes et des syndicalistes de l'opposition, et a pour objectif l’ouverture d’une nouvelle procédure auprès d'Interpol.
De telles précisions ont été apportées par un communiqué des avocats de la défense du célèbre banquier, signé par maîtres William Bourdon et Elyezid ould Yezid..
«Ces perquisitions semblent intervenir à la suite de l’ouverture précipitée, par le parquet de Nouakchott, d’une nouvelle procédure visant des faits d’évasion fiscale et de blanchiment, procédure opportunément ouverte contre X (d’évidence pour tenter vainement de neutraliser son caractère opportuniste).
Cela, après que le juge d’instruction a refusé, à juste titre, de scinder cette deuxième procédure de la première ayant conduit à la diffusion de mandats d’arrêt et de notices rouges, aujourd’hui soumis à l’examen de la commission d’interception de la police internationale (Interpol). Le parquet a saisi la chambre d’accusation qui a accepté le principe de deux procédures séparées».
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La défense dénonce par la suite «l’acharnement judiciaire sans limite, mis en œuvre par le pouvoir du président Aziz en Mauritanie contre ses clients».
Le communiqué de la défense de Bouamatou rappelle que «cette procédure avait déjà conduit à de grossières falsifications et à une instrumentalisation éhontée de la loi réprimant la corruption des agents publics étrangers, pour tenter de criminaliser nos clients du fait du soutien qu’ils ont apporté à l’opposition, et essentiellement aux sénateurs ayant refusé l’année dernière le coup de force du président Aziz visant à entériner un référendum lui permettant de voter un projet de révision constitutionnelle sur mesure».
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Par ailleurs, la défense de Bouamatou perçoit à travers cette deuxième procédure «une sorte de plan B pour le pouvoir de Nouakchott. C’est-à-dire maintenir la possibilité de diffuser de nouveaux mandats d’arrêt, dans l’hypothèse et comme la défense l’espère, ou la commission d’interception d’Interpol annulerait les premiers mandats d’arrêt diffusés le 1er septembre 2017. Cette procédure numéro 2, d’évidence parfaitement artificielle, est la démonstration aussi en creux des caractères tant infondés qu’irréguliers des premières poursuites. Tous les principes les plus élémentaires (séparation des pouvoirs, procès équitable, respect des droits de la défense) sont largement foulés au pied du mur».
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Au-delà de l’inquiétude et des dénonciations, les avocats de Bouamatou et Debagh signalent avoir d’ores et déjà alerté Interpol dans l’hypothèse de diffusion de nouveaux mandats d’arrêt visant leurs clients, sur l’imminence de ces nouvelles mesures relevant «de la marche forcée du régime mauritanien vers une stratégie visant à criminaliser nos clients par tous les moyens aux fins de leur interdire de jouer un rôle dans la vie publique et politique, en perspective des prochaines élections qui doivent se tenir en Mauritanie» aux cours des prochains mois.
La Mauritanie va vers un agenda électoral chargé avec des législatives, des régionales, des municipales en 2018, ainsi qu’une élection présidentielle au milieu de l’année 2019.
En vertu du principe de la limitation des mandats, le président Mohamed ould Abdel Aziz ne devrait pas se présenter pour ce scrutin.