Mauritanie: validation de la loi relative à la Haute Cour de justice par le Conseil constitutionnel

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Le 06/11/2020 à 16h08, mis à jour le 06/11/2020 à 16h18

Le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution la création de la Haute Cour de justice (HCJ). Celle-ci complète l'arsenal juridique du pays au moment où l'ancien président Mohamed ould Abdel Aziz fait l'objet d'une enquête pour corruption et mauvaise gouvernance.

La Mauritanie étoffe son arsenal judiciaire dans un contexte politique particulier, marqué par la clameur qui suit la fin de règne de l’ancien président, Mohamed ould Abdel Aziz (2008/2019), dont la décennie de gouvernance fait l’objet d’une enquête préliminaire en cours pour présomption de corruption, déclenchée sur la base d’un rapport parlementaire transmis à la justice le 5 août dernier.

Ainsi, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution, la loi organique du 27 juillet 2020, instituant la Haute Cour de justice (HCJ), à travers un arrêt rendu jeudi 5 novembre.

Le juge constitutionnel avait été saisi pour se prononcer sur la validité de cette loi le 10 août 2020, conformément à l’article 86 de la Constitution.

En déclarant conforme la loi organique de juillet 2020, le Conseil constitutionnel a tenu à rappeler dans le dispositif de sa décision, la première du genre dans l’histoire judiciaire, politique et parlementaire du pays, «les règles en la matière fixées par le Code de procédure pénal (CPP), en particulier celles garantissant les droits de la défense».

La Haute Cour de justice est prévue par l’article 92 de la Constitution mauritanienne adoptée en juillet 1991 et ses différentes retouches.

Cette disposition stipule notamment «qu’il est institué une Haute Cour de justice. Celle-ci est composée de membres élus en leur sein par l’Assemblée nationale et des magistrats de l’ordre judiciaire. Une loi organique fixe la composition, les règles de fonctionnement et la procédure applicable devant la Haute Cour de justice».

Cette juridiction est compétente pour juger le président de la République, en cas de haute trahison, et les membres du gouvernement, pour des infractions d’atteinte à la sûreté de l’Etat.

L’objectif de la loi organique validée jeudi par le Conseil constitutionnel est lié à un souci de conformité avec la Constitution amendée.

Il s’agit «d’appliquer les dispositions de l’article 92 de la Constitution qui prévoit la mise en place d’une Haute Cour de justice après tout renouvellement de la composition de l’Assemblée nationale. De permettre à la Haute Cour de justice de s’acquitter convenablement de sa mission en matière de renforcement du contrôle parlementaire sur l’action gouvernementale et la protection des deniers publics».

Par ailleurs, estime-t-on, cette loi organique vient combler un vide judiciaire persistant dans l’arsenal du droit mauritanien par rapport à une juridiction dont la mission est vitale pour la stabilité et le développement du pays.

La Mauritanie vit un contexte de mauvaise gouvernance endémique et d’impunité couvrant les présumés auteurs d’actes de prévarication depuis plusieurs dizaines d’années, notamment le coup d’Etat de 1978.

A signaler qu’une polémique nourrie accompagne l’enquête préliminaire en cours concernant l’ancien président Mohamed ould Abdel Aziz, ses proches et de nombreux hauts responsables.

Le parquet et les avocats de l’Etat soutiennent la thèse de la compétence de la justice ordinaire dans le traitement des faits reprochés à Aziz et ses compagnons.

Dans le même temps, la défense crie à la violation de l’article 93 de la Constitution, qui confère l’immunité au président de la République dans le cadre de l’exercice de ses fonctions.

Par Amadou Seck (Nouakchott, correspondance)
Le 06/11/2020 à 16h08, mis à jour le 06/11/2020 à 16h18