Arrogance. C’est le terme qui revenait le plus dans les critiques adressées à l’endroit de l’ex-président Abdoulaye Wade et ses partisans. A côté des scandales politico-financiers, qui ont jalonné le règne du «Pape du Sopi», l’arrogance, érigée en mode de gouvernance pendant douze ans, a largement contribué à sa défaite en 2012.
Pour beaucoup d’analystes d’ailleurs les électeurs ont plus sanctionné Wade et son système qu’ils n’ont adhéré au programme de Macky Sall. Visiblement, le même syndrome guette le régime de Macky Sall. Les insultes et règlements de comptes en public sont devenus monnaie courante entre militants de l’Alliance pour la République (APR), le parti présidentiel.
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Les multiples rappels à l’ordre n’ont, jusque-là, servi à rien. Le dernier épisode a eu lieu ce week-end à Saly Portudal, station balnéaire à 80 kilomètres de Dakar, lors de la 5e édition de l’université d'été de la Convergence des jeunesses républicaines (COJER).
En effet, les jeunes «apéristes» -du parti APR- qui s’écharpent pour le contrôle de cette structure ont offert au chef de l’Etat un condensé des maux dont souffre son parti. Thérèse Faye Diouf, la coordinatrice de la COJER a été huée par des supposés partisans du ministre de la Jeunesse, Mame Mbaye Niang, devant le chef de l’Etat. Une «insolence» que ce dernier n’a pas apprécié.
Condamnant «très fortement» ces comportements, «ce brouhaha insensé», Macky Sall, pour être sûr d’être bien compris, a choisi de s’exprimer d’abord en langue wolof. "Ce n’est pas parce que vous avez un peu d’argent que vous pouvez devenir arrogant"s, dit-il aux responsables de son parti présents dans la salle.
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«Il faut arrêter sinon nous prendrons nos responsabilités. On ne saurait accepter des comportements de ce genre. D’ailleurs, que tout responsable qui est dans cette dynamique sache qu’il sera sanctionné sévèrement», menace le chef de l’Etat visiblement irrité.
Et pour que les choses soient bien claires, Macky Sall de remettre les pendules à l’heure : «Si Thérèse Faye doit quitter la COJER, c’est moi qui en déciderai. Ce n’est pas à vous de changer qui que ce soit », martèle-t-il. Pour sonner définitivement la fin de la récréation, il précise qu’aucune structure de l’APR ne sera renouvelé avant 2019.
Enfin, Macky Sall invite ses partisans à retourner à la base et travailler en perspective des prochaines joutes électorales. «Je n’aimerais pas que ma victoire soit entachée par quelque prétexte que ce soit», dit-il à propos de la présidentielle de 2019.
Créé en 2008, l’APR a conquis le pouvoir après seulement quatre ans d’existence. Le parti souffre d’un problème congénital de structuration. Et comme le pouvoir attire forcément de nouveaux venus, les batailles de positionnement sont lésion. Le cas du vice-président de l’Assemblée nationale, Moustapha Cissé Lô, est illustratif des problèmes que vit le parti au pouvoir. Ce dernier est connu pour sa violence verbale et sa facilité à dégainer une arme, ce qui lui vaut le surnom d’El Pistolero. Contesté par d’autres responsables du parti, Cissé Lô a été contraint de quitter sa base de Touba pour aller militer à Dakar. Il faut dire que des violences l'impliquant directement ou indirectement ont été notées à plusieurs reprises dans la ville sainte.