Sénégal. Tabaski 2017: les Imams sermonnent les hommes politiques

Le president Macky Sall, a la prière de l'Eid el Kabir

Le president Macky Sall, a la prière de l'Eid el Kabir. DR/

Le 04/09/2017 à 21h48

Pape Alioune Moussa Samb et Babacar Ndiour, respectivement imams de la grande mosquée de Dakar et de la mosquée Moussante de Thiès, tancent tour à tour, les autorités et certains milliardaires du pays. Les deux chefs religieux ont profité de leurs semons d’après la prière de la fête de Tabaski.

«La plupart des milliardairs africains ont acquis leur fortune de manière illicite», a asséné Alioune Moussa Samb aux fidèles venus prier à l’occasion de l’Aïd al-Adha. L’Imam de Dakar faisait allusion à certaines personnes proches du gouvernement et aussi aux hommes d’affaires qui, en un temps record, ont acquis des fortunes au Sénégal.

Selon lui, «il est quasi impossible d’acquérir des milliards en étant un simple salarié». Ce n’est malheureusement pas le cas au Sénégal et dans d’autres pays africains où la politique qui est devenue un «métier», est le moyen pour la majorité des responsables de s’assurer une rapide ascension sociale. Et certains hommes d’affaire véreux s’enrichissent sur le dos de leurs concitoyens. Par conséquent, il invite les principaux milliardaires sénégalais à «être plus solidaires avec leurs compatriotes».

Le préfet boude le sermon

Fidele à sa tradition, l’Imam Babacar Ndiour a profité de la prière de l’Aïd pour revenir sur l’actualité nationale et les récentes élections législatives sénégalaises. Le dirigeant de la mosquée Mousanté de Thiès a surtout insisté «sur une meilleure justice» et invite les fidèles musulmans à «la droiture, conformément aux recommandation de l’Islam».

Revenant sur l’organisation cahoteuse des législatives du 30 juillet 2017, l’Imam Babacar Ndiour a rappelé «qu’une élection est un point et non une fin». Selon lui, nous assistons tous les jours à des crises postélectorales dans divers pays du monde. Toutefois, la majorité des Sénégalais pensent que ce genre de problèmes n’arrive que dans d’autres pays ; ce qui n’est absolument pas le cas. «Il est possible au Sénégal, de faire l’économie de ce genre de crise en organisant des élections libres et transparentes comme dans les grandes démocraties», s’est-t-il adressé aux autorités.

Il a par ailleurs regretté le fait que la dernière campagne électorale ait servi de cadre «de dilapidation de l’argent». «De l’argent dont on ignore la provenance a coulé à flot à Thiès et dans toutes les régions du Sénégal», a-t-il souligné.

Profitant de l’ignorance de certains sénégalais, «des dirigeants ont précédé à des achats de conscience». Ce qui est, a-t-il dénoncé, «une forme d’exploitation injuste des nécessiteux». Il a également fustigé les détournements de deniers publics.

Toutefois, ce sermon prononcé par l’Imam Boubacar Ndiour de Thiès a suffi à mettre en colère Alioune Badara Samb. Très remonté contre l’Imam qui l’a mis très mal à l’aise avec ces mots, le préfet du département de Thiès n’a pas attendu la fin du sermon pour quitter la mosquée Moussanté de Thiès.

Prétextant ainsi que «les institutions de la république du Sénégal étaient attaquées», Alioune Badar Samb a alors boudé le sermon. Mais cette attitude «très peu conciliante du préfet de Thiès», n’est semble-t-il, pas appréciée par les fidèles venus nombreux participer à la prière de l’Aïd.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 04/09/2017 à 21h48